On a tous rêvé devant une voiture ancienne venue tout droit des États-Unis. Des véhicules étincelants à des prix très concurrentiels. Une Ford Mustang GT de 1967 pour seulement 16 000 dollars, une Citroën SM de 1971 à 27 000 dollars… Des offres alléchantes que l’on ne trouve plus chez nous. Pourtant, derrière cette apparente beauté se cache souvent un loup. Une restauration toute récente, “made in USA”, qui peut réserver de mauvaises surprises à l’acheteur final. Comment éviter ce piège ?
Comprendre le contexte américain
Aux États-Unis, les règles de restauration automobile sont bien différentes de celles en Europe. Contrairement à chez nous, il n’y a pas de contrôle technique à l’échelle fédérale. De plus, les inspections réalisées dans les États sont bien moins rigoureuses. Certains États ont même abandonné toute forme d’inspection des voitures. Dans d’autres, ces inspections ne sont pas régulières mais seulement lors de la vente des véhicules. De plus, ces inspections n’interdisent aucune transformation des voitures.
Il est donc possible de trouver des voitures restaurées à la mode américaine, qui ne pourront pas prendre la route en Europe. De plus, la responsabilité des vendeurs automobiles est bien moindre aux États-Unis que chez nous. Le contrat de vente suffit à dégager le vendeur de sa responsabilité, tandis qu’en France, un vendeur professionnel est tenu des vices cachés, même s’il n’en avait pas connaissance.
De plus, les formations de carrossier-peintre automobile ne sont probablement pas les mêmes ici et là-bas. Dans l’ensemble, les collectionneurs américains ont moins de soucis à modifier l’électricité, le freinage, l’allumage ou la direction des voitures. Il est donc risqué d’acheter une voiture restaurée aux États-Unis.
5 astuces pour bien acheter une voiture restaurée aux États-Unis
Il est légitime de se méfier des restaurations américaines, mais il ne faut pas généraliser. En réalité, de nombreuses techniques de restauration à la mode américaine, comme l’utilisation de sprays de peinture ou de l’aérogommage, sont désormais courantes en Europe. L’Amérique est souvent une terre d’innovations qui réserve de bonnes surprises, avec des voitures restaurées à moindre coût. Mais comment faire la différence entre une bonne et une mauvaise restauration ?
Exiger un “restoration book”
Il est essentiel de pouvoir contrôler les travaux effectués lors d’une restauration. Aux États-Unis, comme en Europe, les restaurateurs prennent souvent des photos des travaux en cours. Ces photos permettent d’évaluer les techniques utilisées, en particulier pour le traitement de la carrosserie. Elles permettent également de vérifier les pièces qui ont été réellement changées. De plus, elles donnent une idée du temps et de l’attention consacrés à la restauration. Il est donc important d’exiger un “restoration book” et de le présenter à un professionnel pour obtenir son avis.
Vérifier les “matching numbers”
En Europe, le remplacement d’un moteur ou d’une boîte de vitesses n’est généralement pas un problème, même si cela affecte la cote des voitures anciennes. Aux États-Unis, c’est une autre histoire. L’échange standard n’est pas la norme et il est fréquent de trouver des associations mécaniques improbables. Par exemple, une MGA avec une boîte Nissan ou une Porsche 911 avec un moteur de Corvette. Il est donc essentiel de vérifier les numéros de moteur et de boîte.
Privilégier les restaurations légères
Aux États-Unis, il est courant de dissimuler les défauts des voitures avec du mastic, une nouvelle peinture et un “blaxonnage” du châssis. Cette méthode permet de masquer la rouille persistante ou les accidents mal réparés. En revanche, une voiture qui conserve une partie de sa peinture d’origine offre plus de garanties, car les problèmes potentiels de corrosion se limitent aux zones restaurées. Il est également important de pouvoir inspecter visuellement le châssis en métal, car une corrosion profonde peut nécessiter un démontage complet et coûteux du véhicule.
Faire inspecter la voiture
Compte tenu des risques liés aux restaurations américaines, il est judicieux de faire inspecter une voiture avant de l’acheter. Aux États-Unis, ces inspections sont réalisées par des sociétés qui peuvent travailler sans la présence du client. Cependant, la qualité de ces inspections peut varier. En France, il est possible de solliciter l’avis d’un expert automobile avant l’achat. Il est recommandé de trouver un expert spécialisé dans les voitures anciennes.
Choisir le bon vendeur et le juste prix
Il existe de bons vendeurs et de mauvais vendeurs, tant aux États-Unis qu’en Europe. Les collectionneurs passionnés qui conservent les voitures pendant plusieurs années et ne sont pas animés d’une logique purement commerciale font partie des bons vendeurs. Certains concessionnaires spécialisés sont également fiables, car ils travaillent avec des artisans reconnus et veillent à leur réputation, y compris en Europe. En revanche, il faut se méfier des petits entrepreneurs et des “businessmen” sans historique connu, car leur logique est souvent à court terme et ils ne disposent généralement pas des ressources techniques nécessaires à une restauration professionnelle.
Enfin, le prix reste un indicateur important de la qualité de la restauration. Si cela semble trop bon marché, c’est que la restauration a été faite rapidement, ce qui n’est pas compatible avec une restauration complète. Il est donc préférable de prévoir des frais supplémentaires à l’avenir.
Conclusion
Grâce à ces quelques principes, il est possible d’éviter les pièges des restaurations américaines. En s’appuyant sur un “restoration book” complet, l’avis d’un spécialiste de la restauration, un rapport d’inspection et une relation de confiance avec le vendeur, il est possible de dénicher la perle rare. Car oui, ces perles rares existent encore en Amérique… Certains acteurs du monde de la voiture ancienne, comme les marketplaces ou les importateurs, peuvent être de bons alliés en présélectionnant les véhicules qu’ils proposent.
Thibaut Perez est un économiste amoureux des belles automobiles. Collectionneur lui-même, il restaure ses voitures et est l’un des fondateurs de Rétroenchères, une marketplace européenne dédiée aux véhicules de collection.