Asthme : Comment éviter les urgences

Asthme : Comment éviter les urgences

On oublie souvent que l’asthme continue de faire des victimes en France en 2018. Malgré une baisse significative depuis les années 2000, 900 personnes décèdent encore chaque année à la suite d’une crise d’asthme aiguë. Selon le Professeur Nicolas Roche, président de la Société de pneumologie de langue française, cela est inacceptable compte tenu des traitements disponibles. Il est primordial de contrôler la maladie en amont pour éviter de tragiques conséquences.

Des avancées dans la prise en charge, mais des problèmes persistants

Il y a eu des progrès dans la prise en charge médicale de la crise d’asthme aiguë, mais les patients évaluent encore trop tardivement la gravité de leur crise. Le Dr Jean-Philippe Marre, pneumologue à Tours, explique que l’asthme aigu n’a généralement pas un début brutal, mais est souvent précédé d’une crise habituelle qui s’intensifie sur plusieurs heures. Si cette crise ne répond pas au traitement bronchodilatateur habituellement efficace, il est essentiel de contacter le 15 (numéro des urgences en France). Une crise d’asthme peut s’aggraver à tout moment, il ne faut donc pas essayer de se rendre à l’hôpital par ses propres moyens.

200 000 passages aux urgences chaque année

Les 4 millions d’asthmatiques en France génèrent chaque année 200 000 passages aux urgences, avec deux pics annuels : la saison des pollens et celle des virus. Les urgences identifient immédiatement les patients en crise d’asthme et leur prodiguent les soins nécessaires. Le traitement repose sur les corticoïdes et les bronchodilatateurs à forte dose. Une fois l’hôpital quitté, les patients se voient prescrire des corticoïdes oraux de courte durée et un traitement “de fond” pour prévenir les rechutes et traiter la maladie sous-jacente.

L’expérience de Tours pour prévenir les retours aux urgences

Malheureusement, seulement six asthmatiques sur dix reçoivent un traitement de fond, selon l’étude Asur 1. Ce constat est d’autant plus préoccupant que la plupart des personnes qui se rendent aux urgences ne voient pas de pneumologue par la suite. Par conséquent, 30 % des patients voient leur situation se détériorer le mois suivant et la plupart d’entre eux retournent aux urgences.

Face à ce problème, les urgentistes et les pneumologues de Tours ont collaboré pour éviter les retours aux urgences trop rapides. Pendant leur séjour à l’hôpital, les patients remplissent un questionnaire et discutent avec un membre du personnel infirmier formé spécifiquement pour évaluer leur niveau de connaissance, identifier les facteurs déclenchants de leur crise et leur apprendre à utiliser un débit expiratoire de pointe pour mesurer la gravité de la crise. Les questionnaires sont ensuite transmis à l’École de l’asthme, qui propose des séances d’éducation thérapeutique dans les trois semaines suivant la sortie du patient. L’objectif est que le patient prenne le contrôle de sa maladie en apprenant à la connaître.

Les craintes autour des corticoïdes

En plus des traitements de la crise, l’asthme nécessite un traitement de fond à base de bêta-2 mimétiques à longue durée d’action et de corticoïdes inhalés. La majorité des asthmatiques, s’ils prennent correctement leur traitement de fond, devraient éviter les crises aiguës d’asthme. Cependant, de nombreuses personnes se rendant aux urgences pour une crise d’asthme ne sont pas suffisamment traitées. Certaines n’ont pas de traitement de fond, voire aucun traitement du tout car elles ne savent pas qu’elles sont asthmatiques. Dans les autres cas, le traitement de fond est rarement pris correctement.

Environ la moitié seulement des patients atteints de maladies chroniques suivent leur traitement de manière adéquate. Outre le déni de la maladie ou la peur des corticoïdes, l’utilité du traitement de fond est mal comprise. Beaucoup pensent que les corticoïdes inhalés, qui constituent la base du traitement, ne doivent être pris que lorsque leur état se détériore. Cette méconnaissance explique les mauvaises surprises lors des crises.

L’expérience menée à Tours vise à amener les patients à bien suivre leur traitement de fond, dans le but de réduire les passages aux urgences et d’améliorer leur qualité de vie quotidienne. Une étude réalisée en 2012 dans le cadre d’une thèse a montré que cette approche avait permis de réduire de 38 % à 28 % la récidive des crises après trois mois. En parallèle, la fréquentation de l’École de l’asthme a augmenté, la moitié des patients suivis ayant été référés après un passage aux urgences.

Ainsi, grâce à une meilleure prise en charge médicale, à une évaluation précoce des crises et à une communication efficace avec les patients, il est possible de prévenir les retours aux urgences et d’améliorer la qualité de vie des personnes asthmatiques. Il est essentiel que les asthmatiques comprennent l’importance de leur traitement de fond et apprennent à connaître leur maladie pour mieux la contrôler au quotidien.