Lorsque l’on est passionné par l’automobile moderne ou ancienne, il existe des événements que l’on attend chaque année avec impatience. Parmi ceux-ci, on peut citer le Salon de Reims, le Rétromobile, le Concours de Villa d’Este, le Salon Privé, Goodwood, les 24h du Mans, Beaulieu, la Monterey Car Week, le Salon Epoqu’Auto, et bien sûr, le LBVCR, qui signifie London to Brighton Veteran Car Run, mieux connu sous le nom de “London to Brighton” en France.
Le London to Brighton en bref
Avec ses 126 ans d’existence, le London to Brighton est la plus ancienne manifestation automobile au monde. Au fil du temps, cet événement a su préserver la tradition tout en y apportant une touche de modernité, tel un peintre impressionniste ajoutant des touches de couleur à un magnifique tableau.
L’organisation de ce rendez-vous historique est confiée au RAC (Royal Automobile Club). Dès 5h du matin, les participants se rendent dans Hyde Park pour rejoindre leurs plateaux. Les bénévoles s’affairent sur place, tandis que Jeremy Vaughan, le Directeur du département Motoring du Royal Automobile Club, vérifie que tout est en ordre : des drapeaux rouges prêts à être déchirés aux chasubles des Marshalls (400 sont nécessaires pour le bon déroulement de l’épreuve), en passant par les parapluies dont la protection est plus symbolique que réelle.
Une légende prétend que le London to Brighton doit être annulé s’il ne pleut pas… Comme s’il pleuvait en Grande-Bretagne ! Presque jamais, pour être exact. Les propriétaires de voitures à vapeur chauffent leurs machines pendant une bonne heure avant de prendre le départ. Les automobilistes et leurs passagers revêtent souvent des tenues d’époque, ou d’épaisses pelisses censées les protéger de la pluie et du froid.
Les participants se connaissent souvent et se retrouvent avec plaisir. Les collectionneurs de voitures anciennes forment une communauté particulière. Le London to Brighton est leur grand rendez-vous, et ils viennent des 5 continents pour participer à cette course ô combien addictive. Il est intéressant de noter qu’avant 1905, près de la moitié des automobiles produites dans le monde étaient françaises, témoignage de l’influence de l’industrie automobile française à cette époque.
Au départ du London to Brighton
Cette année, ce sont 336 voitures et 15 vélos et motos qui se sont élancés. On compte 96 constructeurs automobiles représentés, répartis comme suit :
France : Aster, Barré, Berliet, Bertrand, CGV, Clément, Clément Bayard, Clément Panhard, Colliot, Darracq, De Dietrich, De Dion Bouton, Decauville, Deckert, Delahaye, Gamage Aster, Georges Richard, Gladiator, Hurtu, Lacoste et Battmann, Lambert, Léon Bollée, Marot Gardon, Mors, Napoléon, Panhard et Levassor, Peugeot, Phebus, Raynaud, Renault, Rochet, Rochet-Schneider, Tony Huber, Vallée.
Grande-Bretagne : Albion, Alldays, Argyll, Arrol-Johnston, Brown, Brush, Century, Daimler, Dennis, English Mechanic, Gamage Aster, Humber & Humberette, James & Browne, Lanchester, MMC, Maxim, Napier, New Orleans, Norfolk, Phoenix, Rover, Salvesen, Siddeley, Star, Sunbeam, Swift, Talbot, Thornycroft, Vauxhall, Vulcan, Wolseley.
Allemagne : Adler, Benz, Lutzmann, Mercedes, Mercedes Simplex.
USA : Autocar, Brennan, Cadillac, Columbia & Columbia Electric, Covert, Crest, Flint, Ford, Haynes Apperson, Knox, Locomobile, Maxwell, Oldsmobile, Orient, Peerless, Pierce, Pope Toledo, Rambler, Stanley, Stevens Duryea, Warwick, While, Yale.
Belgique : Delin et Germain.
Avant de lancer cette édition 2022 du London to Brighton, il est intéressant de faire plusieurs constatations :
- Aujourd’hui, les constructeurs automobiles sont présents sur tous les continents, mais il fut un temps où il n’y en avait que deux : l’Europe et l’Amérique du Nord.
- Les constructeurs qui ont survécu sont moins d’une dizaine, et ce sont ceux qui ont opté dès le début pour une production en série axée sur des volumes plutôt que pour la recherche de sophistication ou de complexité.
La conclusion est que l’automobile est un produit synonyme de liberté individuelle pour toutes les populations, et donc un produit de “volumes”.
C’est parti !
Le départ du London to Brighton est donné à 7h02 du matin, et les voitures, les vélos et les motos s’élancent entre 7h02 et 8h45. Deux chanceux ont même l’honneur de déchirer le drapeau rouge. Cette année, Doug Hill, directeur des collections du Musée de Beaulieu, a été choisi pour cette tâche. A l’époque, avant l’Abolition Act, le drapeau rouge était agité par un piéton devant l’automobile en ville, criant “Attention automobile !” pour avertir la foule. Ce rôle de piéton était limité à une vitesse maximale de 4 km/h, et donc l’intérêt des automobiles était alors quasi nul. C’est Lord Montagu qui a bravé cette règle en entrant dans la Chambre des Lords au volant de sa Daimler, prononçant un discours émouvant appelant les Lords à ne pas manquer un rendez-vous industriel qui aurait eu de graves conséquences économiques pour le pays. Les Lords se sont levés, l’ont applaudi à l’unanimité et ont voté cet “abolition act”. Commémorer cet événement aujourd’hui est bien plus qu’anecdotique : c’est un hommage à la liberté individuelle et au pragmatisme économique.
Le départ est donné, et pendant une heure et demie, les véhicules prennent la route. Il est important de souligner que le London to Brighton n’est pas une course. C’est un hommage rendu aux pionniers de l’automobile, et le meilleur moyen de rendre cet hommage est d’associer les premières voitures automobiles à celles d’aujourd’hui. Ainsi, une De Dion peut attendre patiemment à un feu de circulation aux côtés d’une Golf avec deux jeunes conducteurs casqués à l’envers, et alors ?
Où voir passer le LBVCR ?
Malgré la pluie, le public se déplace en grand nombre sur les trottoirs le long des routes pour admirer et saluer les participants. Sourires et bonne humeur sont de rigueur. Les passagers qui décident de répondre aux milliers de signes en agitant la main doivent être de véritables athlètes. Le London to Brighton est avant tout une occasion de sympathie, de gentillesse et de célébration de la liberté. Des centaines de milliers de spectateurs rendent hommage à cette procession et à ses acteurs, simplement par leur présence.
Pour les passionnés qui décident de se rendre à Londres, voici quelques incontournables :
- De 5h à 7h : Hyde Park
- De 7h10 à 8h30 : Prendre “LA” photo sur le pont de Westminster avec Big Ben en arrière-plan
- De 8h à 11h35 : Redhill (au croisement A23 Brighton Road, Mill Lane, Hooley Lane)
- De 8h25 à 14h00 : Centre-ville de Crawley
- De 10h à 16h30 : Madeira Drive à Brighton
Les pannes
Au cours des 126 années d’existence du London to Brighton, l’organisation a acquis une certaine expérience. Les collectionneurs connaissent leurs voitures anciennes sur le bout des doigts, et celles-ci ont été soigneusement entretenues, restaurées et révisées. Aucun participant ne prend le départ sans avoir préalablement vérifié son véhicule dans les moindres détails. De plus, grâce à l’assistance du RAC, de CARS (partenaire transporteur officiel) et à l’entraide des concurrents et du public, il est rare qu’une panne ne puisse être réparée. Les pannes les plus courantes concernent une courroie qui saute, une chaîne qui déraille, une crevaison ou une bougie qui grille. Il n’y a pas d’électronique sur ces ancêtres de l’automobile.
Une fois sortis des faubourgs de Londres, de nombreux clubs partenaires s’installent au bord de la route pour admirer, saluer et rendre hommage aux participants. Ce sont également eux qui fournissent de nombreux marshalls. Sans leur contribution, rien ne serait possible pour le bon déroulement du London to Brighton.
Conclusion
Le London to Brighton est bien plus qu’une simple commémoration historique. C’est un hommage, une fête, une célébration de la liberté et une ode aux pionniers de l’automobile. Grâce au talent du RAC et des équipes du département motoring, cet événement est devenu un week-end formidable. Les sourires sur les visages des participants à l’arrivée à Brighton, malgré les 120 km de froid et de pluie, en disent plus long que tous les discours.
Si vous ne l’avez jamais fait, participez au London to Brighton, vous ne le regretterez pas. Les Anglais sont maîtres dans l’organisation de manifestations historiques sérieuses, sans se prendre trop au sérieux, avec le sourire. Vous adorerez l’ambiance, et je suis prêt à parier que vous reviendrez, car une fois que vous y aurez goûté, vous ne pourrez plus vous en passer.
Retrouvez plus d’informations sur le site officiel du London to Brighton : Veteran Car Run.
Remerciements et félicitations à Ben Cussons, président du Royal Automobile Club, ainsi qu’à Jeremy Vaughan, directeur de l’événement, Grace Schulp, responsable de l’événement, Pippa Schulp, administratrice de l’événement, Ruppert Bassadone, responsable des opérations, Fay Morris, exécutante des opérations, Perry Chatwin, exécutant des opérations, Tony Payton, responsable du site de Crawley, et John Picken, responsable du site de Brighton.