Les travailleurs frontaliers qui commencent un emploi en Suisse et vivent en France se posent tous les mêmes interrogations : “Comment fonctionnent les comptes bancaires pour les frontaliers ?” et “Comment ouvrir un compte en Suisse en tant que frontalier ?”. En effet, ces clients frontaliers ont des besoins spécifiques en matière bancaire. Étant rémunérés en francs suisses, ils ont besoin de comptes (ou de solutions) gérant deux devises : les euros (EUR) et les francs suisses (CHF). Ils sont également exposés aux fluctuations du taux de change, tant pour les transferts de fonds mensuels, par exemple pour leur salaire, que pour les crédits immobiliers. Voici les informations essentielles à connaître sur les banques et les services bancaires pour les frontaliers en Suisse.
La banque quotidienne pour les frontaliers
Les besoins bancaires des travailleurs frontaliers en Suisse sont particuliers, car ils reçoivent un salaire en CHF et doivent donc convertir cette somme en euros pour alimenter leur compte bancaire. Cela leur permet de régler leurs dépenses et leurs factures dans leur pays de résidence (France, Allemagne, Italie, etc.). Cette situation nécessite une organisation spécifique des comptes bancaires.
Pourquoi les revenus des frontaliers dépendent-ils du taux de change EUR/CHF ?
Supposons que le salaire d’un travailleur frontalier soit constant sur une année. Selon le taux de change EUR/CHF, le salaire qu’il recevra, après conversion, sur son compte en euros en France, par exemple, sera différent chaque mois, car le taux de change EUR/CHF évolue en permanence. Illustrons ces fluctuations de change avec un exemple simple : imaginons qu’un frontalier soit rémunéré à hauteur de 5000 CHF nets par mois. Si le taux de change EUR/CHF est de 1,1405, il recevra sur son compte français un montant de 4 384 EUR. En 2008, le taux de change avait atteint 1,60 : à cette époque, pour le même salaire en francs suisses, un frontalier recevait 3 125 EUR, soit une différence de 1 259 EUR. Ainsi, le revenu d’un frontalier est soumis à ce que l’on appelle un risque de change, lié aux variations du taux de change entre l’euro et le franc suisse.
Comment s’organiser au niveau bancaire en tant que frontalier
1. Avoir une banque “traditionnelle” en Suisse et une banque “traditionnelle” en France
Cette solution offre une grande flexibilité pour les dépenses effectuées à la fois en Suisse et dans le pays de résidence des frontaliers, où les dépenses sont généralement en euros. Elle permet également de mettre en place des opérations à terme pour les francs suisses (service de garantie de change qui permet de fixer un taux de change euro/franc suisse dont l’utilisation doit être limitée à un maximum de 30% du salaire compte tenu du risque). Cependant, cette option est la plus coûteuse en termes de frais bancaires et de frais de change, étant donné les marges appliquées par ces établissements.
2. Avoir une banque “traditionnelle” en Suisse et une banque digitale en France
Cette tendance connaît une forte croissance ces derniers mois. En optant pour une banque digitale, les frontaliers bénéficient de frais réduits, voire quasi nuls (pas de frais de tenue de compte, pas de frais liés à l’utilisation d’une carte de crédit ou de paiement). En revanche, aucune de ces banques ne propose de comptes en francs suisses ou ne gère les opérations de change. Il est donc conseillé d’utiliser un service de change de devises en ligne offrant des frais de change réduits et des conditions très avantageuses par rapport aux banques traditionnelles. À la fin de l’année, les économies réalisées grâce à ce service peuvent atteindre environ 500 à 600 euros pour un salaire de 5000 CHF échangé chaque mois.
3. Avoir une banque “traditionnelle” en France permettant de gérer un compte en euros et un compte en francs suisses
Quelques établissements proposent de gérer tous les besoins bancaires depuis la France, ce qui permet de n’avoir qu’une seule banque. Sur le plan pratique, cela présente des avantages, car le client frontalier n’a pas à jongler entre les comptes de sa banque en Suisse et de sa banque en France. En revanche, cela peut être plus coûteux, certains de ces établissements facturant des frais relativement élevés, notamment pour la réception de virements SEPA en euros en provenance de banques suisses. De plus, le taux de change proposé par ces banques est généralement peu avantageux par rapport aux services de change en ligne.
4. Avoir une banque 100% digitale en France et un service de change de devises en ligne basé en Suisse
Ce dispositif est de loin le plus avantageux en termes de coûts. Une étude que nous avons menée met en évidence les économies significatives réalisées par les frontaliers utilisant cette combinaison bancaire. L’absence de comptes en devises et de service de gestion des opérations de change dans la banque digitale en France est compensée par le fait que le service de change de devises en ligne, obligatoirement basé en Suisse, peut fournir un IBAN suisse sur lequel l’employeur peut transférer le salaire en CHF. Néanmoins, il convient de noter que tous les employeurs suisses n’acceptent pas encore ce dispositif, car l’IBAN proposé par le service de change en ligne n’est pas un IBAN propre au client, mais un IBAN qui contient les coordonnées du client. Cela peut poser problème aux frontaliers affiliés à la LAMal (l’assurance maladie suisse des frontaliers), car les caisses auront besoin d’un compte en francs suisses.
Notre avis: Parmi tous ces modèles, les deux options les plus intéressantes sont : le modèle 2 (une banque digitale en France, une banque traditionnelle en Suisse et un service de change en ligne), qui permet de bénéficier de frais bancaires et de change très réduits tout en conservant une certaine flexibilité, ainsi que le modèle 4 (une banque digitale en France et un service de change de devises en ligne). Ce dernier offre la solution bancaire la plus avantageuse en termes de coûts, même si l’absence de compte en francs suisses dans une banque suisse peut poser certains problèmes, que ce soit pour le versement du salaire ou pour les dépenses en Suisse.
Les meilleures banques traditionnelles pour les frontaliers côté France
Les banques traditionnelles françaises présentes en zone frontalière proposent généralement des services spécifiquement dédiés aux frontaliers. Elles offrent notamment :
- Des comptes en euros et en francs suisses.
- Des services de garantie de change pour se protéger des variations de cours entre le franc suisse et l’euro.
- Des moyens de paiement : cartes de crédit valables en euros ou en francs suisses.
- Des services de virements internationaux : Swift, LSV.
- La possibilité de recevoir directement le salaire de l’employeur suisse sur le compte en francs suisses de la banque française. Cependant, ce service comporte des inconvénients importants, tels que la facturation des virements SEPA reçus en euros provenant de banques suisses, ce qui incite les frontaliers à effectuer le change de devises dans ces établissements à des taux peu avantageux.
Les banques françaises proposant ces services sont les suivantes : Banque Laydernier, Banque de Savoie, Banque Populaire des Alpes, CIC, Crédit Agricole, Crédit Mutuel et Société Générale.
Les meilleures banques traditionnelles pour les frontaliers côté Suisse
Les banques suisses entretiennent des relations particulières avec les frontaliers. Étant donné que l’argent des frontaliers ne fait généralement que transiter par les banques suisses (la plupart transfèrent l’argent vers un service de change en ligne ou vers leur banque en France), ces clients ne représentent pas un intérêt majeur pour les banques suisses. Cependant, ces banques gardent à l’esprit que certains frontaliers sont des résidents potentiels (surtout ceux ayant les revenus les plus élevés) et qu’ils peuvent également souscrire à des produits d’épargne-retraite, ce qui représente des marges phénoménales pour les banques et les compagnies d’assurance. Au fil du temps, les banques ajustent donc leurs conditions d’ouverture de compte et leurs tarifs en fonction de leur volonté d’attirer ou non certains types de clients. Par exemple, le Crédit Suisse a augmenté ses tarifs de manière significative afin de cibler exclusivement une clientèle de frontaliers. D’autres banques, telles que la Raiffeisen, refusent d’ouvrir un compte en Suisse aux clients frontaliers. Parmi les banques suisses les plus favorables aux frontaliers, on trouve la banque Migros et l’UBS, qui sont relativement ouvertes aux relations avec ces clients et proposent des frais mensuels très réduits. Les banques étrangères implantées en Suisse, notamment les banques françaises, sont également intéressées par les clients frontaliers. Cependant, certaines de ces banques incitent fortement les frontaliers à ouvrir un compte dans leur établissement en France, ce qui est rarement la solution la plus avantageuse sur le plan financier, car ces banques appliquent souvent des frais cachés, tels que les frais de change ou les frais de tenue de compte.
Notre conseil pour convertir vos francs suisses en euros au meilleur taux
Les frontaliers ont la particularité d’avoir un salaire en francs suisses et des dépenses en euros. Il est donc dans leur intérêt de convertir leurs francs suisses en euros au meilleur taux et dans les meilleures conditions. Voici quelques options possibles :
- Changer physiquement l’argent au guichet de leur banque habituelle, qu’elle soit suisse ou française.
- Faire appel à une société spécialisée dans le change de devises, comme la société genevoise b-sharpe. D’autres services existent, tels que Wise (anciennement Transferwise) au Royaume-Uni ou Currencyfair en Irlande.
- Effectuer le change dans un bureau de change, comme le Change Migros par exemple.
- Procéder au change dans sa banque suisse et virer des euros sur son compte français.
- Procéder au change dans sa banque française en convertissant les francs suisses transférés en euros.
Il est important de noter que ces solutions de change de devises sont toutes très différentes et ont des conséquences différentes sur le plan financier et en termes de sécurité. Par exemple, le changement d’argent physique présente des risques de perte ou de vol réels et le taux de change franc suisse/euro proposé n’est généralement pas le meilleur. Les banques suisses ou françaises appliquent la plupart du temps une marge, qui varie d’un établissement à l’autre, mais qui est généralement très coûteuse (en moyenne entre 1,65% et 2,2% des montants échangés sont prélevés par la banque). En revanche, les sociétés spécialisées dans le change de devises offrent des coûts et des frais bien moins élevés (en moyenne réduits de 70% par rapport aux banques). Ces sociétés ont des frais de fonctionnement plus réduits, ce qui leur permet de proposer à leurs clients des marges plus faibles sur les opérations de change (0,5% en moyenne, contre 1,65% pour les banques). Nous recommandons vivement ce type de service pour le change de devises franc suisse/euro. Référez-vous à l’article “Comment économiser sur les frais de change de devises en tant que frontalier ?” pour plus de détails.
Les prêts immobiliers pour les frontaliers
Étant donné que les frontaliers perçoivent un salaire en franc suisse, tandis qu’ils vivent en France et ont des dépenses en euros, les banques “locales” ont développé des offres spécifiques de financement pour l’achat de biens immobiliers : les prêts immobiliers pour frontaliers en francs suisses. Ces prêts immobiliers spécifiques permettent notamment d’éviter les problèmes liés aux fluctuations du taux de change auxquels seraient soumis les frontaliers ayant souscrit à un prêt immobilier “classique” en euros. Toutefois, en fonction de la conjoncture des taux (taux de change et taux d’intérêt), le prêt en devise n’est pas nécessairement la meilleure solution de financement pour un bien immobilier. En plus des banques mentionnées précédemment, qui proposent toutes des prêts en devises (aussi bien pour les crédits immobiliers que pour les crédits à la consommation), BNP Paribas propose également des crédits en devises (cependant, BNP Paribas ne propose pas de service spécifique de gestion quotidienne pour les frontaliers).
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