Les batteries sont au cœur des enjeux technologiques actuels. Malgré les différentes alternatives qui émergent, Jean-Marie Tarascon, professeur au Collège de France et directeur du Réseau sur le stockage électrochimique de l’énergie (RS2E), affirme que la technologie lithium-ion (Li-ion) continuera à dominer le marché au moins jusqu’en 2030. Les batteries Li-ion ont connu une amélioration significative de leur densité d’énergie massique, passant de 90 Wh/kg à plus de 250 Wh/kg. Dans les prochaines années, cette densité pourra même atteindre les 300 Wh/kg.
Des solutions lithium-ion optimisées
Les batteries Li-ion liquides sont couramment utilisées, mais elles présentent des risques de réactivité et d’inflammabilité. C’est pourquoi les batteries Li-ion gélifiées et les batteries Li-ion tout solides (Solid State) sont considérées comme étant des solutions plus sûres. Bien que la densité d’énergie massique des batteries Li-ion gélifiées ne dépasse probablement pas les 300 Wh/kg, elles pourraient offrir un compromis intéressant entre performance et sécurité si elles sont disponibles dès 2022-2023.
D’autre part, les batteries Li-ion Solid State et Lithium Metal, prévues respectivement pour 2025 et 2027, devraient afficher des densités d’énergie massique de 400 Wh/kg et 450 Wh/kg. L’utilisation de nickel, de manganèse et de cobalt à la cathode est commune à ces deux technologies. Au lieu du graphite-silicium traditionnel à l’anode, on pourrait éventuellement utiliser une bande de lithium métal à l’avenir.
Dans la famille des batteries à électrolyte solide, la technologie lithium-soufre pourrait atteindre une densité d’énergie massique jusqu’à 500 Wh/kg d’ici 2030. De plus, certains processus de fabrication pourraient être modifiés en supprimant les solvants, ce qui réduirait les coûts et l’impact environnemental. Les progrès dans ce domaine sont lents, mais l’augmentation de la durée de vie des batteries est plus significative.
Recyclage : combler l’écart avec la Chine
Un autre défi majeur est le recyclage des batteries. La durée de vie des batteries est plus longue que prévu, allant jusqu’à 10 ou 15 ans. Cela soulève la question du traitement des batteries usagées, qui pourraient atteindre 50 000 tonnes en Europe dès 2027. Une première option consiste à réutiliser les batteries en fin de vie pour des applications stationnaires pendant sept à huit ans, car elles conservent encore de 70 à 80% de leur capacité initiale.
La deuxième option est le recyclage. Il est intéressant de noter qu’une batterie d’entrée de gamme (40 kWh) contient environ 5,5 kg de cobalt, tandis qu’une voiture haut de gamme (90 kWh) peut contenir jusqu’à 11 kg de cobalt. Le prix du cobalt, le matériau le plus coûteux dans une batterie, a varié entre 21 750 et 95 000 euros la tonne au cours des cinq dernières années.
L’Europe cherche à rattraper la Chine, qui recycle déjà 69% des batteries dans le monde chaque année (100 000 tonnes) et intègre le recyclage dans ses usines de production de batteries. Selon l’Alliance européenne pour la batterie, le recyclage européen pourrait couvrir 10% des besoins en cobalt d’ici 2030.
Technologie de rupture
Une alternative innovante est la technologie sodium-ion, qui ne nécessite pas les métaux classiques utilisés dans les batteries lithium-ion tels que le lithium, le nickel, le manganèse, le cobalt, le cuivre et le graphite. Laurent Hubard, PDG de Tiamat, une start-up spécialisée dans cette technologie, affirme que malgré une autonomie deux fois moindre que celle des batteries Li-ion liquides, la recharge dure à peine 5 minutes. De plus, cette technologie est beaucoup moins chère.
Actuellement, Tiamat cherche à boucler un tour de table de 25 millions d’euros pour construire une usine pilote d’une capacité de 1 MWh. L’avenir de cette technologie dépendra en grande partie du soutien des industriels européens, en particulier dans la période incertaine de l’après-Covid-19.