Carburant de synthèse : l’alternative écologique pour les voitures à essence après 2035?

Carburant de synthèse : l’alternative écologique pour les voitures à essence après 2035?

Au lieu de changer de voiture, pourquoi ne pas changer de carburant ? Alors que l’Europe se dirige progressivement vers une transition vers les véhicules électriques d’ici 2035, avec pour objectif de ne vendre que des voitures neuves à zéro émission de CO2, certains constructeurs recherchent des solutions alternatives pour continuer à rouler avec des moteurs à combustion interne tout en limitant la pollution. L’une de ces solutions s’appelle le carburant de synthèse, également connu sous le nom d’e-fuel ou d’e-carburant.

Une technologie éprouvée

Le carburant de synthèse est un carburant qui ne provient pas du pétrole, mais qui est obtenu par un processus chimique à partir de matières premières contenant du carbone et de l’hydrogène. Pour produire ce carburant de manière écologique, il est possible d’utiliser de l’hydrogène vert, produit par électrolyse en utilisant de l’électricité renouvelable (solaire, éolienne, hydraulique…) ou faiblement carbonée, comme l’énergie nucléaire. En ce qui concerne le CO2, il est possible de réutiliser les émissions provenant de certains sites industriels en récupérant le dioxyde de carbone.

Ce procédé n’est pas nouveau. Certains pays ont d’ailleurs été contraints de produire ce type de carburant par manque de pétrole. C’est le cas de l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale ou de l’Afrique du Sud dans les années 50-60, alors soumis à des sanctions internationales en raison de l’apartheid. Le carburant de synthèse était alors obtenu à partir du charbon, avec un bilan carbone assez désastreux. L’enjeu actuel est donc de réussir à le produire de manière plus propre.

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Porsche en pointe sur le sujet

Dans le secteur de l’automobile, les marques allemandes sont particulièrement intéressées par cette technologie. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le ministre des Transports Volker Wissing a récemment évoqué la possibilité de continuer à vendre des véhicules équipés de moteurs à combustion interne après 2035, en mettant en avant l’utilisation de carburants synthétiques propres. Selon lui, il ne suffit pas de compter uniquement sur les véhicules électriques à batterie ou à hydrogène pour répondre aux besoins de mobilité du futur.

Porsche est notamment en pointe sur cette nouvelle technologie. En septembre dernier, la marque a annoncé le début de la construction de la première usine au monde dédiée à la production d’un carburant de synthèse quasiment neutre en CO2 au Chili, en partenariat avec Siemens Energy, la société chilienne Highly Innovative Fuels (HIF), le pétrolier ExxonMobil et le spécialiste italien de l’énergie Enel.

Cette usine pilote, basée en Patagonie, produira dès cette année 130 000 litres d’e-fuel, avec pour objectif d’atteindre 55 millions de litres en 2024 et 10 fois plus en 2026. Une première utilisation de ce carburant est prévue dans le cadre du sport automobile, avec des voitures participant à la Porsche Mobil1 Supercup qui seront alimentées en e-fuel. Une véritable vitrine, à l’image de la Formula-e pour les véhicules électriques.

Des carburants réellement plus écologiques ?

Logiquement, les différents projets mettent en avant des bilans prometteurs : Porsche évoque par exemple une réduction de 90% des émissions de CO2 d’origine fossile pour les moteurs à combustion. En se passant du pétrole, l’objectif est de développer un carburant synthétique beaucoup plus efficace que ses prédécesseurs fossiles, ne contenant pas d’”ingrédients indésirables”. En évitant la combustion d’éléments tels que le soufre ou le benzène, on limite déjà les émissions polluantes.

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Le plus de cette technologie est aussi la possibilité de remplir les réservoirs des véhicules à la fois modernes et anciens. En conservant des véhicules fonctionnels tout en réduisant facilement leurs émissions de CO2, on favorise ainsi un cercle vertueux.

Cependant, il est encore difficile d’évaluer l’impact réel des carburants de synthèse. Certaines études ont montré qu’il était possible de réduire considérablement les émissions de particules fines et d’oxyde d’azote grâce à ces carburants. D’autres études se montrent plus sceptiques, notamment une étude de Transport & Environnement publiée en décembre dernier, l’organisation à l’origine des révélations sur le dieselgate. Selon cette ONG, en ce qui concerne les émissions de CO2, le bilan n’est pas aussi bon, avec seulement 40% de réduction. Si l’on prend en compte l’ensemble du cycle de vie du produit, la voiture électrique reste plus vertueuse à partir de 60 000 à 75 000 kilomètres parcourus.

Près de 5 euros le litre aujourd’hui

Au-delà de la question écologique, se pose également la question financière. À une époque où les prix des carburants ne cessent d’augmenter, le carburant de synthèse peut-il représenter une alternative bon marché ? Selon une étude de Transport & Environnement, il s’agirait d’un carburant destiné aux plus fortunés, avec un surcoût estimé à 10 000 euros sur 5 ans par rapport à une voiture électrique à 100%.

Les estimations actuelles des futurs tarifs, avec une production encore très faible, semblent donner raison à cette étude : près de 5 euros le litre, de quoi relativiser les prix à la pompe ces derniers jours.

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Cependant, une étude du pétrolier Aramco anticipe une diminution du coût à mesure que la production en volume augmentera, avec un objectif de 1 euro le litre d’ici 2027 à 2030… Il est important de noter qu’il s’agit ici du coût de production, qui est d’environ 0,65 centime pour un litre d’essence sans plomb.

Porsche e-fuel

En conclusion, le carburant de synthèse offre une alternative intéressante pour continuer à utiliser des voitures à moteur thermique après 2035 tout en réduisant les émissions de CO2. Cependant, il reste encore des défis à relever, tant sur le plan environnemental que financier. Malgré ces incertitudes, il est encourageant de voir que des constructeurs comme Porsche investissent dans cette technologie, ce qui ouvre la voie à un avenir plus durable pour l’industrie automobile.