La Citroën Méhari, produite de 1968 à 1987, aurait dû disparaître progressivement du paysage automobile français. Cependant, la nostalgie qui l’entoure lui a donné une seconde vie.
Sa silhouette cubique intemporelle et sa bouille sympathique captivent notre attention. On ne peut s’imaginer qu’elle a été créée il y a près de 50 ans. Ses formes simples et logiques la situent hors des modes. Si on devait la recréer aujourd’hui, elle serait exactement la même. Elle évoque toujours cette petite voiture en plastique rouge ou verte avec laquelle nous jouions quand nous étions enfants. C’est un jouet grandeur nature pour adultes.
Le Méhari Club Cassis, qui a racheté l’outil de production à Citroën en 1987, contribue à son regain d’intérêt en rénovant des Méhari presque neuves. Cela explique pourquoi elle est devenue très tendance, en particulier dans les régions côtières. Les prix des Méhari entièrement rénovées se situent entre 20 000 et 25 000 euros. Mais pour Christophe, ce n’est pas une question de snobisme. La Citroën Méhari évoque sa jeunesse et c’est pourquoi il a choisi une version rare 4X4, produite en seulement 1213 exemplaires sur un total de près de 145 000 en 19 ans de production.
Il y a 30 ans, Christophe, alors artisan doreur, avait opté pour une Citroën Méhari orange avec une capote noire pour visiter ses clients. Été comme hiver, il parcourait 30 000 kilomètres par an. Il se souvient de combien il avait froid l’hiver, conduisant avec une couverture sur les genoux et des gros gants. Ses pieds étaient brûlés par le chauffage tandis que son cou était glacé par les courants d’air. Mais il était jeune et cela lui plaisait. Après trois ans et près de 100 000 kilomètres parcourus, il a acheté une autre Méhari en 1981, cette fois en version 4X4. Il a grimpé des endroits incroyables, que ce soit sur le sable ou dans la neige lors de ses voyages au ski. C’était une voiture géniale.
Après avoir conduit des voitures plus conventionnelles pendant un certain temps, Christophe est revenu aux voitures anciennes en gérant un petit musée à la Teste, dont il est le responsable associé. Au quotidien, il conduit une Mustang Cabriolet de 1964 avec 6 cylindres. Le plaisir de conduire des voitures anciennes et la popularité croissante des Méhari autour du Bassin d’Arcachon, où il vit, lui ont donné envie de rouler à nouveau avec cette voiture légendaire. Il vient de trouver une Méhari 4X4 de 1981, première main, qui n’a parcouru que 25 000 kilomètres, dont très peu en mode 4 roues motrices.
Il est intéressant de noter que la Méhari a été conçue sur la base de la 2CV Citroën, plus précisément sur celle de la Dyane 6, qui offrait une mécanique plus puissante. Elle a été pensée dans l’esprit de la Mini-Moke ou d’une Jeep par une société indépendante de Citroën. Bien qu’à l’origine, elle était destinée à un usage utilitaire, elle s’est rapidement orientée vers les loisirs. Malgré son succès auprès des administrations, des pompiers et de l’armée, la version 4X4 n’a pas connu le même engouement en raison de sa faible puissance. Son prix plus élevé explique pourquoi seulement 1213 exemplaires ont été produits. Aujourd’hui, elle est la Méhari la plus convoitée par les passionnés réunis au sein du Méhari Club de France.
La Méhari a été moulée en ABS (Acrylonitrile Butadine Styrène), un matériau composite thermoplastique flexible teinté dans la masse. Ce choix a permis une production en série et l’a rendue insensible à la corrosion et aux légers chocs. Sa carrosserie, composée de 11 éléments fixés sur une fine structure tubulaire rivée sur la plateforme de la Dyane, peut être facilement remplacée en cas de gros pépin. Cependant, elle est sensible aux rayons UV et la carrosserie de la voiture de Christophe a perdu de son éclat.
Au volant d’une Méhari, on retrouve les qualités et les défauts de la 2CV. Sa fameuse suspension souple permet de digérer les creux des chemins en balançant doucement ses passagers. Sa garde au sol relativement élevée lui permet de grimper partout, tant que cela ne monte pas trop. Elle offre une bonne adhérence sur le bitume, est efficace sur terre et impériale sur la neige. Son entretien est symbolique.
Le grand plaisir des propriétaires de Méhari était de rouler les cheveux au vent, pare-brise abaissé et portillons avant optionnels enlevés. À 100 km/h maximum, avec l’accélérateur collé au plancher, ils avaient le sentiment de piloter un DC3 au décollage. Le bruit assourdissant du vent, les grincements divers de la carrosserie, le claquement du hayon, le jappement du moteur et le chuintement de la transmission : tout cela rendait l’expérience jubilatoire. En enclenchant la boîte courte, Christophe nous fait avaler un énorme talus avec délectation. “Si on dégonfle les pneus à 500 grammes, ça passe partout !” s’exclame-t-il, visiblement ravi. Au volant d’une Méhari, il revit les années heureuses des années soixante-dix, avec tous les souvenirs qui vont avec. Et après tout, payer 30 000 euros pour revivre sa jeunesse, ce n’est pas cher payé !