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La réponse de Marine Lefebvre, psychologue/psychothérapeute:
Sur le plan neuro-bio-chimique, on a appris que les hypersensibles auraient un taux de sérotonine plus bas que la moyenne. Or, la sérotonine agit comme un filtre à stress. Les hypersensibles partiraient donc avec un handicap sur la gestion de leurs émotions et le traitement du stress.
Ils auraient également une fonction exécutive du cerveau qui marcherait moins bien, l’inhibition latente. Cette fonction a pour objectif de mettre en arrière-plan de manière automatique les informations jugées «non pertinentes» par le cerveau. Or il s’avère que, chez les hypersensibles, cette fonction fait défaut. Cela implique que toutes les informations deviennent aussi importantes les unes que les autres. Vous voyez le joyeux bazar…Un peu comme s’ils devaient tout trier à la main.
Ce qui ne signifie pas que l’on ne peut rien faire. Même si les hypersensibles ont des émotions qui sont plus intenses et qui durent plus longtemps, par nature, il est possible de canaliser le flot d’informations et de sensations.
Pensée automatique
Tout d’abord, les émotions surviennent quasi instantanément avec une pensée automatique, c’est-à-dire le sens que l’on attribue à ce qui nous arrive. C’est conscientisé ou non. Lorsque ce n’est pas conscientisé, le cerveau fonctionnant par analogie va comparer ce qui se passe à ce qu’il connaît déjà et parfois, envoyer le «programme automatique» de réaction, à notre insu.
On va pouvoir remettre en cause cette pensée automatique, la challenger, la passer au tamis d’une plus grande objectivité. En étant dans la plus grande honnêteté avec soi-même.
Cela n’est pas toujours facile ni simple, surtout au début. Puis ça peut devenir une habitude, voire un jeu. Ne pas croire tout ce que je me dis, ne pas prendre pour vérité les éléments de mon discours intérieur.
Vision subjective
De la même façon, toutes mes émotions ne renvoient pas à une réalité objective. Si je me sens coupable, ce n’est pas nécessairement vrai, cela peut juste être une interprétation. Si je suis angoissé par un évènement à venir, cela ne veut pas dire que cela se passera mal pour autant. Beaucoup de situations viennent appuyer sur des blessures encore ouvertes et nous font réagir. Nous pouvons travailler sur ces blessures pour les désactiver. Ça, c’est pour nos «programmes automatiques».
Lorsque c’est conscientisé, en revanche, on peut aller «attraper» la pensée automatique, l’identifier puis la corriger. Tout ce que je me dis à moi-même aura une influence directe sur mon ressenti émotionnel. C’est là que l’on peut agir, en modifiant l’interprétation de la situation, en élargissant les perspectives, les choix.
Nous pouvons également faire un pas en arrière, en conscience, tel le hamster qui sort de sa roue et qui la regarde tourner. Nous pouvons apprendre à relativiser davantage notre processus de réaction émotionnelle. «Oui, là, je suis profondément triste ou inquiet, je regarde mon émotion et je la sens dans mon corps. Oui cette émotion m’indique quelque chose. Quoi?» Cherchons, quoi? Mais cette émotion dans laquelle je baigne ne correspond pas pour autant à une réalité et je vais la regarder faire son chemin et partir. Sans m’accrocher à elle, sans me dire qu’elle est vérité, sans en faire un drame. Elle aussi, passera.
Les émotions font partie de la vie de chacun d’entre nous et plus particulièrement des hypersensibles. Elles donnent des couleurs et du relief à nos vies. Elles nous apportent des messages. Mais nous ne sommes pas obligés de les prendre si au sérieux que ça, encore moins de nous identifier à elles.
Ne cherchez pas à lutter contre, vous ne ferez que les faire grandir. Accompagnez-les au contraire avec bienveillance, recul, objectivité et portez plus d’attention aux pensées qui les accompagnent, pour les faire évoluer si nécessaire.