Le sida, une maladie qui a marqué l’histoire, a suscité de l’angoisse et de la stigmatisation avant de devenir le terrain d’une lutte acharnée. Revenons sur cette histoire pleine d’enjeux et de rebondissements.
Les débuts du sida et la stigmatisation
En 1982, Anne-Marie Moulin, spécialiste en parasitologie, rencontre son premier patient atteint d’une maladie qui n’a pas encore de nom : le sida. Ce patient, mourant, a été stigmatisé et tourmenté à cause de son homosexualité présumée. Cette anecdote révèle la stigmatisation dont les personnes atteintes du sida ont été victimes dès le départ.
En 1981, des épidémiologistes nord-américains ont émis une première théorie sur les origines du sida, en se référant aux groupes déjà discriminés tels que les héroïnomanes, les homosexuels, les hémophiles et les Haïtiens.
La reconnaissance du sida comme épidémie
C’est en juin 1981 que le grand public découvre le sida pour la première fois, lorsqu’une note publiée dans le “Morbidity and Mortality Weekly Report” révèle que cinq patients ont été traités pour une forme de pneumonie associée à un système immunitaire affaibli. Cette maladie est alors appelée “syndrome d’immunodéficience acquise”.
Cependant, l’histoire du sida remonte plus loin. Des échantillons de sérum datant des années 1920 ont permis d’estimer que le virus serait apparu en Afrique centrale avant de se propager suite à des déplacements entre les pays du continent et Haïti.
Le sida, une épidémie des marges
Pourquoi cette maladie a-t-elle été associée à des groupes sociaux spécifiques ? Les premiers cas identifiés chez des homosexuels masculins en 1981 étaient liés à une période de libération sexuelle qui avait entraîné la propagation d’infections sexuellement transmissibles. Les femmes sont restées en dehors des cibles de prévention, à l’exception des mères et des prostituées.
Dans les années 1980, le sida est considéré comme le “cancer gay” et les attaques contre les militants homosexuels se multiplient. Cependant, cette recherche de boucs émissaires est commune à toutes les épidémies.
L’activisme des malades
Face à l’impuissance de la médecine, les malades du sida ont revendiqué leur expertise basée sur leur expérience et ont demandé à être associés aux décisions politiques. Les années 1980 ont vu l’émergence des tests de dépistage, qui ont soulevé la question des personnes séropositives, vivant plusieurs années sans développer la maladie.
Les associations de lutte contre le sida ont joué un rôle majeur dans la mise en place des politiques et le développement des traitements. L’activisme thérapeutique a poussé l’industrie pharmaceutique et la recherche médicale à accélérer la mise à disposition des traitements.
Victoires et évolution de la perception du sida
Les associations de lutte contre le sida, telles que Act Up, Aides ou Les Soeurs de la perpétuelle indulgence, ont remporté plusieurs victoires, notamment la prise en charge à 100% par la Sécurité sociale des personnes infectées par le VIH dans les années 1990.
Avec l’apparition de la trithérapie en 1996, les personnes infectées ont pu vivre quasi normalement, bien que les effets secondaires soient importants. Les médecins ont également joué un rôle central dans la prévention et la prise en charge du VIH.
Des inégalités persistantes
Malgré les avancées, le sida reste une maladie chronique avec des inégalités persistantes à l’échelle mondiale. En Afrique, par exemple, seul environ 30% des séropositifs sont traités. L’accès aux traitements n’est pas le seul problème, la prévention reste également un défi dans certains pays où les minorités sexuelles sont réprimées.
Leçons à tirer pour la gestion des crises sanitaires
Après quarante ans de lutte contre le sida, il est légitime de se demander si des enseignements ont été tirés pour la gestion de la crise du Covid-19. Malheureusement, de nombreux chercheurs estiment que la crise actuelle n’a pas su tirer profit des enseignements de démocratie et de civisme issus de l’expérience du sida.
En conclusion, l’histoire du sida est marquée par l’angoisse, la stigmatisation mais aussi par une lutte acharnée et des victoires importantes. Malgré les progrès réalisés, le combat contre cette maladie et les inégalités persistantes demeurent des défis pour le futur.
