Lorsque nous pensons à l’instant, nous le considérons souvent comme un simple moment dans le temps. Cependant, selon le philosophe Vladimir Jankélévitch, l’instant est bien plus que cela. Dans son livre “Ecclesia”, inspiré par la philosophie de Bergson, Jankélévitch explore le mystère de l’instant et nous incite à prendre du recul par rapport à notre vision utilitaire du temps. L’instant est un surgissement, une nouveauté radicale qui nous permet de pressentir un au-delà du temps et de son écoulement.
L’Instant: Entre le “Pas Encore” et le “Déjà Plus”
L’instant est un concept complexe qui nous échappe souvent. Entre le “pas encore” et le “déjà plus”, il se situe à la frontière de deux temporalités. Pour le comprendre pleinement, nous devons nous défaire de notre utilitarisme habituel et appréhender l’instant comme un moyen de saisir l’essence du réel. Jankélévitch emprunte à Jean de la Croix les termes de “je-ne-sais-quoi” et de “presque-rien” pour définir cette pointe subtile du réel qu’est l’instant.
L’amour: Le Mystère Morale et Ethique
Outre le mystère de l’instant, Jankélévitch est également connu pour être un philosophe de la morale et de l’éthique. Selon lui, l’expérience morale suppose à la fois une loi universelle et rationnelle inhérente à la dignité humaine et une expérience intime, intense et débordante qui nous pousse toujours au-delà de notre devoir. C’est dans l’ouverture à l’amour et dans la surprise de l’être qui surgit que se trouve l’essence même de l’éthique.
Le Pape François et les Surprises de l’Amour
Il est intéressant de noter que les idées centrales de Jankélévitch résonnent avec les enseignements du pape François. Ce dernier prône un amour qui nous pousse au-delà de nous-mêmes, vers les périphéries de l’Église et de l’humanité. Il encourage également une disposition intérieure ouverte aux surprises de Dieu. Ces idées, essentielles dans le nouveau pontificat, dessinent les grandes lignes de sa vision un mois après son élection.
La Relation du Pape avec les Signes
Outre ses enseignements, le pape François se distingue par sa relation singulière avec les signes. Depuis son apparition sur le balcon de Saint-Pierre sans l’étole pontificale jusqu’à sa messe d’intronisation sans mitre, il utilise les signes liturgiques de manière délibérée pour exprimer sa simplicité et sa proximité avec les fidèles. Ces choix surprenants ont suscité de nombreuses réactions, mais ils illustrent sa volonté de se décentrer pour mieux remplir sa fonction.
Les Signes et la Pauvreté
Si certains voient ces signes comme une manifestation de la simplicité évangélique prônée par le pape François, il est important de comprendre leur signification spécifique dans la liturgie. Les signes liturgiques expriment l’office exercé par un homme et sont porteurs d’une signification précise. Bien que François d’Assise ait été intransigeant sur la question de la pauvreté, il faisait respecter rigoureusement les signes qui permettent à l’Église de se manifester au monde. Modifier ces signes sans en donner la raison claire expose le ministère pétrinien à l’ambiguïté et au risque de perdre son essence.
En conclusion, “Ecclesia” nous invite à réfléchir sur le mystère de l’instant et sur la relation entre les signes et la fonction qu’ils expriment. Tout comme Jankélévitch, le pape François nous rappelle l’importance de l’amour et de la disponibilité à la surprise de Dieu. À travers ses choix symboliques, le pape nous invite à nous interroger sur la place des signes dans notre compréhension de la pauvreté et de l’humilité.