Les droits fondamentaux sont essentiels pour comprendre le fondement du droit, que ce soit en tant qu’élément du droit positif ou en tant que concept utilisé dans un discours théorique. Cependant, dans les discours juspositivistes, il est intéressant de constater qu’il existe une nette indépendance entre la notion théorique servant à fonder le système juridique (la norme fondamentale) et une norme faisant partie intégrante du système juridique (les droits fondamentaux).
Ainsi, les droits fondamentaux ne jouent pas de rôle spécifique dans les discours théoriques des auteurs normativistes. Cela ne signifie pas pour autant qu’aucune réflexion ne peut être élaborée sur le fondement du droit dans ce cadre. En réalité, la question du fondement du droit peut être traitée à partir d’autres notions telles que la norme fondamentale, la hiérarchie des normes ou la méta-norme.
Dans ces discours, le fondement du droit apparaît comme un élément insaisissable qui ne peut être abordé en termes de contenu. Il se révèle comme inconsistant. Par conséquent, les discours normativistes tendent à ignorer les droits fondamentaux et à les rendre inaptes à caractériser la norme fondamentale. Cela signifie que les droits fondamentaux n’ont pas d’utilité théorique quant à l’élucidation du fondement d’un ordre juridique.
Certains discours peuvent être vus comme une stratégie d’occultation. Ces stratégies ne se concrétisent pas de manière uniforme dans tous les cas. Elles peuvent prendre différentes formes, comme le détournement par ricochet de la norme fondamentale kelsenienne par rapport aux droits fondamentaux. Cependant, l’effet de cette occultation est le même : elles permettent aux discours théoriques d’échapper au piège logique de la détermination substantielle du fondement du droit.
Il est intéressant de noter que les discours de M. Troper s’inscrivent dans cette stratégie d’occultation, bien que de manière différente. Dans sa théorie kelsenienne, il utilise les droits fondamentaux comme prétexte pour justifier la construction théorique de la norme fondamentale. En revanche, il ne les considère pas comme une notion spécifique.
La théorie normativiste du droit la plus typique, celle de Kelsen, considère le droit comme un produit de l’État. Elle ne fait plus référence à l’État en tant que tel, mais plutôt à un ordre juridique constitué de normes cohérentes hiérarchiquement plutôt que substantiellement. Kelsen ne propose pas une théorie de l’État, mais une théorie du droit en tant qu’ensemble de normes.
Il convient également de souligner que la théorie de Kelsen ne prend pas les droits fondamentaux au sérieux de la même manière que R. Dworkin. En effet, la conception dworkinienne du système juridique met en lumière une conception des droits fondamentaux axée sur des valeurs, une suprématie et une substance, alors que la théorie de Kelsen les considère simplement comme des normes parmi d’autres.
Il est intéressant de noter que M. Troper propose une variante de la théorie kelsenienne. Son discours théorique se distingue par une réflexion sur l’interprétation, mais il n’adopte pas une position théorique spécifique concernant les droits fondamentaux. Il s’intéresse plutôt à la façon dont le droit est interprété.
En conclusion, il est clair que les discours normativistes occultent souvent les droits fondamentaux et le fondement du droit. Les théories de Kelsen et de Troper, bien qu’avec des nuances différentes, confirment cette tendance à occulter ces éléments. Cependant, il est important de souligner que le traitement des droits fondamentaux et du fondement du droit varie selon les différents discours théoriques.