Si vous êtes actif sur les réseaux sociaux, vous avez sûrement remarqué ces étranges photos de vos amis ou de célébrités avec des visages ridés, cheveux blancs et rides apparentes. Peut-être avez-vous même succombé à la tentation de voir à quoi vous ressemblerez dans quelques décennies. L’application responsable de ces résultats étonnants, FaceApp, connaît un succès phénoménal ces derniers jours. Elle est actuellement l’application gratuite la plus téléchargée sur Google Play (la boutique pour les smartphones Android), où elle a déjà conquis plus de 100 millions d’utilisateurs, ainsi que sur l’App Store.
Un succès viral et des résultats impressionnants
Le succès soudain de FaceApp s’explique par la popularité d’un défi sur les réseaux sociaux qui encourage les internautes à partager des photos d’eux-mêmes vieillis artificiellement, mais aussi par la qualité des résultats obtenus. Grâce à la technologie de reconnaissance faciale, FaceApp utilise un algorithme et une intelligence artificielle pour produire des images particulièrement réalistes.
Certains internautes se sont amusés à comparer les résultats de l’application avec des photos de célébrités, ce qui a donné lieu à de nombreux détournements amusants.
Des conditions d’utilisation controversées
Ce n’est pas la première fois que FaceApp suscite autant d’attention. Créée en 2017, cette application propose plusieurs filtres permettant d’ajouter automatiquement un sourire à une photo, de transformer des visages masculins en versions féminines (et vice-versa) ou encore de modifier la couleur de la peau, ce qui avait déjà suscité des critiques. Mais cette fois-ci, c’est surtout les conditions d’utilisation de l’application qui ont été mises en avant, suscitant une véritable polémique autour de son éditeur, la société russe Wireless Lab.
En utilisant FaceApp, l’utilisateur cède les droits de propriété de ses images à l’entreprise. De plus, il donne également l’autorisation à FaceApp de télécharger les photos qu’il souhaite retoucher sur ses serveurs, contrairement à d’autres applications similaires qui effectuent le traitement directement sur le smartphone. Cette pratique est justifiée par l’entreprise pour des raisons de capacité de traitement. Cependant, sans un accord explicite, l’application n’a pas accès aux autres photos stockées dans le téléphone.
Transfert des données et préoccupations
Wireless Lab informe également ses utilisateurs que les informations collectées à leur sujet peuvent être transférées dans des pays où l’entreprise possède des infrastructures (sans préciser lesquels), et que leur utilisation sera donc soumise aux lois en vigueur dans ces pays. Cette formulation soulève des inquiétudes quant à l’utilisation des informations et des photos collectées par l’entreprise. En effet, le géant américain IBM a récemment été critiqué pour avoir utilisé des photos d’internautes à leur insu afin de former ses logiciels de reconnaissance faciale.
Tous ces éléments ont provoqué une véritable levée de boucliers de la part des internautes et ont contribué à créer un véritable buzz à double tranchant. La situation est d’autant plus préoccupante aux États-Unis où les soupçons d’ingérence de la Russie dans la politique intérieure sont omniprésents depuis l’élection de Donald Trump. Certains responsables du parti démocrate, dont certains membres ont été victimes de hackers russes en 2016, ont même recommandé aux équipes de campagne des candidats à la primaire de “supprimer immédiatement” l’application, selon le Washington Post. Le sénateur démocrate Chuck Schumer a lui-même demandé officiellement au FBI et à la FTC (l’agence de protection des consommateurs) de lancer une enquête pour évaluer les risques potentiels pour la sécurité nationale et la vie privée, étant donné que des millions d’Américains ont utilisé FaceApp.
Ces critiques ont poussé le PDG de Wireless Lab, Iaroslav Gontcharov, à prendre la parole publiquement. Dans une interview accordée au Washington Post, il a affirmé que l’entreprise n’utilisait pas les photos à d’autres fins que celles prévues par l’application, et que la plupart d’entre elles étaient supprimées de leurs serveurs 48 heures après leur téléchargement. Il a également affirmé que les données des utilisateurs n’étaient pas transférées en Russie.