Groupe Laurent : la chute tragique d’un empire régional

Groupe Laurent : la chute tragique d’un empire régional

Les souvenirs du marché des pièces automobiles sont encore vifs : le Groupe Laurent était le plus grand distributeur indépendant français. Il incarnait à lui seul l’élite parmi les acteurs de l’industrie des pièces qui avaient su prospérer pendant les années fastes. À la fin du siècle dernier, lorsque notre magazine Après-Vente Auto s’appelait encore Le Distributeur Automobile, les reportages sur les initiatives et les succès du Groupe Laurent étaient rédigés avec le respect dû à cette institution. Les témoignages reçus en commentaires ci-dessous soulignent à quel point l’identité et l’humanité du groupe étaient connues et reconnues.

Un géant régional

À la fin des années 90, le Groupe Laurent affichait avec fierté un chiffre d’affaires de près de 800 millions de francs. En 2013, cette entreprise affichait encore un chiffre d’affaires de 147 millions d’euros. Il s’agissait d’une performance rarement atteinte par un distributeur indépendant régional, approchant ainsi le milliard de francs que beaucoup lui prédisaient avant l’avènement de l’Euro.

Fondée en 1937 par le grand-père de la dynastie Laurent, l’entreprise était fortement implantée dans la région stéphanoise et rayonnait sur tout le sud-est de la France. À son apogée, elle comptait une centaine de sites, dont sept dédiés à Fica, l’activité industrielle du groupe. À l’époque, un distributeur respectable se devait de proposer à la fois des pièces automobiles et des pièces industrielles. Cependant, en 2014, Laurent Père & Fils perdait 1,5 million d’euros et vendait son activité industrielle au Britannique Brammer.

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C’était également une époque où l’émergence des grandes concentrations dans le secteur de l’après-vente automobile offrait au Groupe Laurent une belle opportunité de se vendre à un bon prix. Mais visiblement, Laurent voulait rester Laurent…

Des sommets aux abysses

Fin 2017, malgré les turbulences déjà présentes (avec un résultat d’exploitation affichant -4,5 millions d’euros), tout semblait encore possible. Vincent Laurent, petit-fils du fondateur, présentait alors une stratégie de relance du groupe stéphanois qui mêlait BtoC, BtoB, digital et “phygital” grâce à 46 magasins non affiliés, accompagnés d’un nouveau type d’entrepreneurs itinérants. Malheureusement, cette nouvelle approche n’a pas fonctionné. Bien que le groupe pèse encore 118 millions d’euros fin 2018, son résultat d’exploitation chute à -6 millions d’euros et la perte atteint -5 millions d’euros.

Ainsi, en 2019, l’empire régional s’est effondré. Le 17 septembre dernier, Exadis, la principale pièce du groupe avec ses 73 millions d’euros de chiffre d’affaires, a été cédée à une coentreprise détenue par Mobivia et Renault. Par la suite, sa filiale de peinture Colaur (2,7 millions d’euros de CA) a été vendue le 31 octobre au distributeur Rhône Peinture Automobile (01-Neyron). Puis, fin novembre, les 20 millions d’euros de sa filiale Poids Lourd CAP VI passaient sous le contrôle du Britannique Bremsen Technik.

Il reste encore à trouver d’éventuels repreneurs pour les 5,3 millions d’euros de Lube & Fluid (vente de lubrifiants), les 3 millions d’euros de First Equipements (outillages et gros équipements de garage) et la filiale EGS Formation.

Les trois dernières offres de reprise ont été jugées insuffisantes par le tribunal. La société Laurent Père & Fils, qui représentait le reste du groupe avec un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros provenant de 27 comptoirs et de l’activité de rénovation diesel, a finalement mis la clé sous la porte à la fin de l’année, apparemment en raison du retrait du soutien bancaire final. Les pertes accumulées année après année, notamment les 5 millions d’euros de pertes enregistrées en 2018, ont été fatales. Les 130 derniers employés sur les 700 que comptait le groupe ont été licenciés.

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Et ainsi, l’empire régional du Groupe Laurent a connu une fin tragique, mettant un terme à une histoire emblématique de la réussite économique régionale en France.

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