Lorsqu’il s’agit de détecter et de traiter les cancers de la prostate, les chercheurs et les médecins sont confrontés à un défi crucial. Il est essentiel d’éviter de prescrire un traitement lourd et inutile à certains patients, tout en proposant une prise en charge personnalisée à d’autres, afin d’augmenter les chances de réussite des traitements futurs.
Les outils actuels
À ce jour, l’évaluation initiale d’un cancer de la prostate repose sur un certain nombre d’indicateurs objectifs. La taille de la tumeur ainsi que son degré d’extension constituent les premières informations mesurables. Lorsqu’une biopsie est réalisée, les cellules cancéreuses peuvent être observées au microscope, ce qui permet d’établir un score numérique reflétant le degré d’agressivité de la tumeur, également connu sous le nom de score de Gleason. Le taux sanguin de PSA (antigène spécifique de la prostate) est également pris en compte lors du diagnostic, permettant d’estimer l’agressivité ou la taille de la tumeur prostatique.
Le score de Gleason est déterminé en examinant les cellules prélevées lors de la biopsie. L’anatomopathologiste se concentre sur les deux types de cellules les plus représentés et évalue leur degré de différenciation sur une échelle de 1 à 5. Si les cellules sont encore relativement bien différenciées, semblables aux cellules normales de la prostate, une valeur basse est attribuée. À l’inverse, si les cellules ont perdu complètement leurs caractéristiques normales (on dit qu’elles sont dédifférenciées), une valeur plus élevée est attribuée. Le score de Gleason est donc un simple ajout des valeurs attribuées aux deux types cellulaires, allant de 2 (tumeur non agressive, voire non cancéreuse) à 10 (tumeur potentiellement plus agressive).
Elargir le champ des recherches
Bien que ces informations permettent de déterminer le stade d’évolution de la maladie et de se faire une idée de son agressivité, elles n’offrent qu’un aperçu de la complexité des tumeurs prostatiques. Pour mieux comprendre cette complexité dès les premières étapes du diagnostic et pour envisager une meilleure adaptation des traitements à chaque patient, de nouvelles informations plus approfondies sont nécessaires.
Les chercheurs se posent de nombreuses questions : quelles mutations génétiques caractérisent les cellules cancéreuses ? Comment la tumeur s’intègre-t-elle dans les tissus environnants ? Quel est son degré de consommation de nutriments, son niveau d’oxygénation, etc. ? La liste est longue mais donne un aperçu des paramètres qu’il est pertinent de prendre en compte, compte tenu des recherches récentes. L’accès à ces informations est déjà partiellement possible, grâce au développement d’outils de séquençage à haut débit et de l’imagerie. Au fil des ans, ces approches ont réussi à élargir leur champ d’action. En laboratoire, l’analyse génétique ne se limite plus à quelques mutations dans un gène donné, mais examine des centaines de gènes, voire le génome dans son intégralité. Elle parvient également à se concentrer sur les gènes exprimés uniquement par les cellules cancéreuses – et il y en a des milliers.
Parallèlement, la tomographie par émission de positons (TEP-scan) et surtout l’imagerie par résonance magnétique (IRM) permettent d’obtenir différents points de vue sur la tumeur prostatique. Ces techniques permettent de mieux définir les contours de la tumeur, d’identifier plus précisément les différents foyers tumoraux et d’estimer leur activité métabolique.
Actuellement, deux enjeux primordiaux se présentent. Tout d’abord, il est essentiel de trouver, parmi toutes ces informations, celles qui peuvent être mises en correspondance avec les profils cliniques déjà connus, tels que la vitesse de progression des tumeurs, la sensibilité à tel ou tel traitement, le risque de résistance ou de récidive, etc. Ensuite, que ce soit des données moléculaires ou des caractéristiques d’imagerie, ces “biomarqueurs” devront être intégrés à la pratique clinique courante afin d’améliorer le diagnostic et d’orienter la prise en charge des patients.
Se focaliser sur les explorations non-invasives
Actuellement, l’accès aux caractéristiques moléculaires d’un cancer de la prostate requiert une biopsie, un geste qui n’est pas anodin et peut être difficile pour les patients. Par conséquent, il est essentiel de développer des biomarqueurs non invasifs pour évaluer l’agressivité d’une tumeur prostatique. L’imagerie, comme mentionné précédemment, offre déjà cette possibilité. Cependant, de nombreux espoirs reposent également sur la possibilité de détecter des biomarqueurs moléculaires accessibles grâce à une simple prise de sang. Les scientifiques recherchent donc de l’ADN, de petites vésicules, voire des cellules entières provenant de la tumeur et qui pourraient être détectées dans le sang. Ces sources d’information sont inestimables, à condition de pouvoir les collecter et les interpréter correctement. Une fois que des données claires seront établies, il sera essentiel de les intégrer à la pratique clinique.
En conclusion, l’identification des marqueurs précoces d’agressivité des cancers de la prostate est un enjeu majeur pour les chercheurs et les médecins. Les avancées dans le domaine de l’imagerie et de l’analyse génétique permettent d’obtenir des informations plus approfondies sur la nature de la tumeur. En les intégrant à la pratique clinique, il sera possible d’améliorer le diagnostic et d’adapter les traitements de manière plus personnalisée, tout en évitant les traitements inutiles et lourds pour les patients.