Un objectif audacieux pour un avenir sans faim
La marche à suivre selon David Laborde
David Laborde, chercheur principal de la division Marchés, commerce et institutions à l’Ifrpi (Institut international de recherche sur les politiques alimentaires), a récemment partagé des études issues du projet Ceres 2030. Ces recherches, qui reçoivent des financements conjoints du gouvernement allemand et de la fondation Bill et Melinda Gates, tracent la voie pour éliminer la faim dans le monde d’ici 2030.
Le coût de l’éradication de la faim
Lorsqu’on lui demande combien cela coûterait d’éliminer la faim dans le monde, David Laborde explique que, dans le cadre du projet Ceres 2030, ils ont calculé que 14 milliards de dollars supplémentaires d’aides extérieures devraient s’ajouter aux 16 milliards de dollars d’investissements des pays destinataires chaque année jusqu’en 2030, soit un total de 30 milliards de dollars par an.
Des besoins spécifiques pour chaque pays
Les besoins varient d’un pays à l’autre. Par exemple, l’Inde a d’énormes besoins mais dispose également de ressources nationales considérables. En revanche, des pays comme la Centrafrique devront financer leurs programmes agricoles grâce à des financements extérieurs.
Il est également nécessaire de réallouer certaines ressources provenant de pays moins nécessiteux. Par exemple, le Ghana est considéré comme un bon élève en matière de réduction de la faim, et les investisseurs y sont confiants en raison du faible risque. Toutefois, il est essentiel de ne pas se concentrer uniquement sur les pays qui ont déjà fait des progrès, mais aussi d’investir dans des pays moins habitués à recevoir des investissements.
Un débat similaire à celui sur le climat
Un débat similaire à celui sur la lutte contre le changement climatique émerge également. Les pays du G7 investissent traditionnellement beaucoup, mais ils demandent maintenant à de nouveaux pays riches comme la Chine ou l’Arabie saoudite de prendre leur part de responsabilité. Cependant, ces pays ont une approche de l’aide internationale bien différente. Les pays destinataires se retrouvent pris au piège de ce débat entre pays émergents et anciennement riches.
Elon Musk et l’appel du PAM
David Beasley, directeur du Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM), a récemment interpellé Elon Musk, le milliardaire et homme le plus riche du monde, sur Twitter. Beasley suggère que 2 % de la fortune de Musk, soit 6 milliards de dollars, pourraient constituer une aide financière substantielle dans la lutte contre la faim dans le monde.
Cependant, ces 6 milliards de dollars ne correspondent qu’à l’urgence de la situation actuelle. La crise économique due à la pandémie et aux conflits au Yémen, en Syrie, au Sud-Soudan et en Éthiopie met en danger 40 millions de personnes qui ont besoin d’une aide d’urgence. Ce chiffre de 6 milliards de dollars est crédible pour répondre à cette situation d’urgence.
En revanche, cette somme n’a rien à voir avec la lutte durable contre la faim dans le monde. Au niveau mondial, on estime que 800 millions de personnes souffrent de la faim de manière chronique, ce qui a des conséquences sur leur développement physique et mental. Les images choquantes d’enfants squelettiques ne sont que le reflet le plus extrême de la faim.
Dans certains pays, la situation est comparable à celle vécue par les paysans européens au XIXe siècle, qui s’effondraient épuisés faute de calories suffisantes en fin de journée. Mais atteindre la sécurité alimentaire va au-delà de cela. Il s’agit de permettre à tous d’avoir une alimentation variée, et non simplement de remplir leur estomac.