Selon le Réseau de transport d’électricité (RTE), la France sera en mesure de fournir de l’électricité à 16 millions de véhicules électriques d’ici 2035. Cette hypothèse, qui avait déjà été présentée en 2019, semblait alors trop ambitieuse. Cependant, avec 600 000 véhicules électriques actuellement en circulation, un déploiement à grande échelle nécessitera une capacité de recharge pour des millions de batteries simultanément. Lors d’une conférence de presse jeudi matin, Maïté Jaureguy-Naudin, directrice de l’innovation et des données chez RTE, a déclaré que le système électrique serait en mesure de produire suffisamment d’électricité pour recharger ces véhicules.
Le transport propre avec l’électricité zéro carbone
Le secteur des transports est actuellement le principal émetteur de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, l’électricité zéro carbone apparaît comme une solution pour un transport plus propre. Pour relever ce défi, RTE prévoit que d’ici 2035, la France disposera de 615 TWh de production décarbonée, principalement d’origine nucléaire et renouvelable. Cette capacité de production sera suffisante pour couvrir la consommation, qui sera inférieure à 500 TWh à ce moment-là. De plus, la demande liée à la mobilité électrique ne représentera qu’à peine plus de 10% de la demande totale. Dans cette optique, RTE a validé six scénarios allant de 50 à 100% d’électricité renouvelable d’ici 2050.
Le concept de “vehicle-to-grid” (V2G), ou “du véhicule au réseau”, apparaît également comme une solution bénéfique à la fois pour les consommateurs et pour le réseau électrique, qui doit rester en équilibre pour éviter une panne de courant. Ce concept repose sur l’idée de recharger son véhicule lorsque l’électricité est produite en excès, mais également de devenir un producteur en réinjectant l’énergie de sa batterie dans le système électrique en cas de besoin.
Les avantages pour les automobilistes
Le coût d’achat d’un véhicule électrique, qui est encore d’au moins 40 000 euros pour une petite familiale, reste un frein pour les utilisateurs. Cependant, malgré un coût d’utilisation et de recharge plus intéressant par rapport à l’essence, ainsi que la prime gouvernementale à l’achat d’une voiture électrique, il est nécessaire d’avoir un capital de départ plus important que pour un modèle thermique. Malgré cela, selon RTE, les automobilistes réalisent des économies à long terme en passant à l’électrique.
Actuellement, le coût annuel moyen pour le carburant d’un véhicule essence s’élève à 1 240 euros pour une utilisation d’environ 15 000 kilomètres par an. En passant à un modèle électrique avec une recharge de base, ce coût d’utilisation est réduit de quatre fois (420 euros), notamment parce qu’une charge complète d’électricité coûte moins cher qu’un plein d’essence. Ces économies augmentent progressivement, notamment en optant pour un mode de recharge plus sophistiqué. Pour cela, RTE compte également sur les fournisseurs d’électricité pour proposer des tarifs incitatifs encourageant les consommateurs à recharger leurs batteries pendant les périodes creuses. En utilisant ces heures creuses, le coût annuel pourrait avoisiner les 280 euros.
L’empreinte environnementale du véhicule électrique
Ces dernières années, les acteurs de l’industrie pétrolière ont régulièrement affirmé que les véhicules électriques ne sont pas aussi vertueux qu’on le pense. Sur l’ensemble du cycle de vie, ils seraient moins écologiques qu’un véhicule essence dès leur sortie d’usine. Ce phénomène serait notamment dû aux pays où les batteries sont actuellement fabriquées, tels que la Chine et la Pologne, qui ont une production électrique encore très carbonée, ce qui a un impact environnemental plus important. Cependant, selon Maïté Jaureguy-Naudin, en France, une voiture électrique devient plus écologique qu’un véhicule essence après 15 000 kilomètres, soit en moyenne un an d’utilisation en termes d’émissions de CO2.
Aujourd’hui, les émissions de CO2 de la France s’élèvent à 440 millions de tonnes, dont 136 millions sont causées par les transports. L’objectif de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) est de réduire de 40% les émissions totales de la France d’ici 2030 par rapport à l’année 1990. En parallèle de l’effet direct de l’utilisation d’un véhicule électrique sur l’environnement, il existe également d’autres leviers de réduction tels que la production de batteries en France, ce qui permettrait de réduire de 2 à 3 millions de tonnes supplémentaires de CO2 chaque année. Le “smart charging”, qui consiste à gérer intelligemment la recharge, ainsi que l’accès facilité aux stations de recharge électrique, permettraient de réduire les émissions de CO2 de 5 millions de tonnes par an d’ici 2030. Tout cela suppose évidemment un changement de nos habitudes de déplacement : lorsque nous ne conduirons pas notre voiture électrique, il faudra préférer le train et les transports en commun, ce qui nous ferait économiser 6 millions de tonnes supplémentaires de CO2 par an.