L’industrie automobile française fait un grand pas en avant. La première grande usine de batteries pour voitures électriques a été inaugurée ce mardi 30 mai dans le nord du pays. Cette usine marque une étape clé dans la transformation industrielle visant à rattraper le retard des constructeurs chinois. Alors que la filière était au point mort, l’usine d’Automotive CellS (ACC), une co-entreprise de Stellantis, Total et Mercedes, est la première réalisation concrète de cette transformation, selon Bercy.
Une “gigafactory” révolutionnaire
Pour l’inauguration de cette “gigafactory”, qui a été construite en 18 mois à Billy-Berclau dans le Pas-de-Calais, pas moins de cinq ministres français et étrangers sont attendus. Bruno Le Maire (ministre de l’Économie), Agnès Pannier-Runacher (ministre de la Transition Énergétique) et Roland Lescure (ministre de l’Industrie) seront présents, aux côtés de responsables italiens et allemands ainsi que des PDG de Mercedes, Stellantis et TotalEnergies. La production dans cette usine de 640 mètres de long sur 100 mètres de large devrait débuter cet été, et les batteries seront commercialisées d’ici la fin de l’année 2023.
Une révolution électrique dans l’automobile
Cette inauguration symbolise le virage à marche forcée du secteur automobile vers l’électrification, en préparation de l’interdiction des moteurs thermiques dans l’Union européenne à partir de 2035. Le groupe ACC, qui se voit comme l’”Airbus de la batterie”, sera l’un des premiers en Europe à produire ces batteries. Quatre autres usines de batteries sont prévues en France, toutes situées dans les Hauts-de-France, où émerge un écosystème baptisé “Vallée de la batterie”, selon les élus et les industriels.
Au niveau européen, une cinquantaine de projets similaires ont été annoncés ces dernières années. L’enjeu est de taille : ne pas dépendre des fournisseurs asiatiques, et notamment chinois, qui ont une avance de 10 à 20 ans dans ce domaine. Le gouvernement français s’est fixé pour objectif de produire deux millions de véhicules électriques par an en France d’ici 2030. Selon les estimations de Bercy, ACC devrait produire suffisamment de batteries pour équiper 500 000 véhicules chaque année d’ici cette date.
Les défis de l’électrification
La France souhaite fournir à son industrie automobile des batteries assemblées sur son territoire d’ici 2027, avant de se lancer dans l’exportation. Cependant, elle reste handicapée par le coût de l’énergie, comparé à la Chine ou aux États-Unis, qui subventionnent massivement cette industrie. Pour témoigner de son soutien, le groupe ACC a reçu plus d’1,2 milliard d’euros de fonds publics sur les 7 milliards d’euros d’investissements nécessaires pour les différents sites, notamment l’usine de Billy-Berclau, un centre de recherche en Charente, et deux futures usines prévues en Allemagne et en Italie.
La technologie lithium-ion utilisée dans la première ligne de production d’ACC nécessite des métaux stratégiques dont l’approvisionnement est largement dominé par la Chine, comme le lithium, le nickel ou le manganèse. La transition vers l’électrification représente également un défi social majeur, avec la disparition annoncée de dizaines de milliers d’emplois, selon les syndicats et les organisations patronales. En parallèle, la Vallée de la batterie devra recruter et former plus de 20 000 personnes en quelques années. La CGT du site Stellantis de Douvrin, voisin d’ACC et voué à la fermeture, prévoit d’ailleurs de manifester mardi matin contre les conséquences sociales de cette électrification.
Avec l’ouverture de cette gigafactory en France, l’industrie automobile fait un pas de plus vers l’électrification et la transition vers des véhicules plus respectueux de l’environnement. La création de cette usine est un symbole fort pour la France et l’Europe dans leur course à l’électrification et leur volonté de ne pas dépendre des fournisseurs asiatiques dans le secteur des batteries pour véhicules électriques.