Le poker de l’automobile mondiale connaît un changement majeur avec l’arrivée des constructeurs chinois. Présents à près de la moitié du Salon de l’automobile de Munich (IAA), ces nouveaux acteurs de la mobilité ont un atout majeur : des coûts de production réduits grâce à une main-d’œuvre bon marché.
Cette stratégie, bien que peu originale, a déjà fait ses preuves dans des secteurs technologiques tels que l’électroménager, la téléphonie ou encore l’informatique. Alors que Tesla, seul sur le marché pendant dix ans, est contraint de baisser ses prix face à la concurrence, il doit également continuer d’innover et de rester compétitif pour affronter cette vague de nouveaux acteurs. La voiture électrique “made in Europe” et abordable doit relever un défi de taille pour ne pas être mise de côté.
Si l’industrie automobile européenne a jusqu’à présent réussi à échapper à la concurrence des constructeurs chinois bon marché, cette situation ne devrait pas durer. En effet, de nombreuses marques chinoises préparent actuellement leurs modèles pour le Vieux Continent, comme en témoigne leur forte présence à l’IAA de Munich. Ces nouveaux arrivants allient une avance technologique acquise grâce aux investissements massifs dans l’électrique ces dernières années, ainsi qu’un faible coût de main-d’œuvre.
Les gouvernements européens exhortent les constructeurs du continent à rendre la mobilité électrique accessible, en vue de l’interdiction des véhicules thermiques ou hybrides d’ici 2035. Cependant, cette volonté politique pourrait mettre les constructeurs historiques dans une position délicate.
Les prix des voitures électriques en Chine sont jusqu’à 60% moins chers qu’en Allemagne, selon les experts de l’industrie automobile. Cependant, il ne s’agit pas seulement du prix d’une voiture exportée et livrée en Europe. Les constructeurs chinois doivent également déployer leurs réseaux de distribution, ce que Tesla a eu du mal à accomplir jusqu’à présent. Par conséquent, leurs voitures peuvent être plus difficiles à réparer.
Une marque chinoise très présente sur le marché européen est MG, qui propose des prix autour de 30 000 euros, hors bonus environnemental. Fondée en Grande-Bretagne en 1924 et relancée après sa faillite en 2005 par le géant chinois de l’automobile SAIC, MG bénéficie d’une notoriété d’ancienne marque occidentale et de la compétitivité du marché chinois.
Au premier semestre de cette année, les marques chinoises ont capté 8% du marché de l’électrique en Europe occidentale, alors qu’elles étaient quasi absentes en 2019, selon les analystes. Le premier constructeur chinois de voitures électriques, BYD, prévoit de conquérir le marché européen à partir du deuxième semestre 2023 avec son modèle Atto 3, déjà en tête des ventes en Suède.
Face à cette concurrence, les constructeurs européens s’efforcent de réduire leurs coûts de production et de proposer des modèles plus abordables. Même Mercedes, spécialisé dans les berlines de luxe, promet de rendre l’électrique “accessible”. Volkswagen présente également la future ID.2, prévue pour 2025 et dont le prix est inférieur à 25 000 euros. Stellantis mise sur la Citroën C3 électrique et Renault sur la citadine R5, toutes deux proposées à moins de 30 000 euros. Opel envisage également de proposer un modèle “autour de 25 000 euros” peu après 2025.
L’augmentation du nombre de modèles électriques permettra d’atteindre une économie d’échelle et de réduire les prix, selon les prévisions des constructeurs. En France, le gouvernement propose également des offres de location de voitures électriques à prix abordable, avec un leasing à partir de 100 euros par mois, sous conditions de ressources. Cependant, la pertinence des primes et des bonus écologiques est remise en question, notamment en raison de la baisse des prix des voitures électriques cette année. En Allemagne, le gouvernement envisage même de supprimer progressivement les primes à l’achat pour encourager les constructeurs à proposer des modèles abordables.
La révolution des prix dans le monde des voitures électriques est en marche. Les constructeurs européens doivent s’adapter à cette concurrence chinoise en proposant des modèles plus abordables, tout en maintenant un niveau de technologie élevé. Les prochaines années seront décisives pour l’avenir de l’industrie automobile en Europe.