La technologie ne peut pas tout résoudre. Il y a des problèmes auxquels elle se heurte, des limites physiques apparemment insurmontables. Ce constat s’applique notamment au stockage de l’énergie électrique. Les chercheurs ont depuis plus d’un siècle échoué à développer un dispositif compact capable de stocker de grandes quantités d’énergie électrique. En comparaison, si on voulait stocker l’équivalent en énergie d’un bidon de 50 litres d’essence dans des batteries électriques, il faudrait plus d’une tonne d’espace volumineux. Certes, nous sommes bien familiers avec les batteries peu énergivores équipant nos téléphones, vélos électriques et autres appareils de bricolage.
Cependant, les grands constructeurs européens veulent nous faire croire que le futur de la circulation routière, même à long terme, repose sur les voitures électriques avec batteries rechargeables. Bien que cette technologie présente des avantages incontestables, elle reste une solution de transition au mieux et n’a pas d’avenir à long terme. Elle est un pis-aller en attendant autre chose, une alternative dont il serait préférable de se débarrasser au plus vite.
Une technologie inadaptée à nos besoins
Pouvons-nous imaginer que toutes les voitures seront “électriques” demain ? Leur autonomie limitée et les temps de recharge des batteries rendent cette hypothèse absurde. En effet, cette motorisation est clairement incompatible avec les pics de trafic autoroutier observés pendant les périodes de vacances. Nous devrions donc, même dans un futur lointain, posséder deux voitures : une “électrique” pour les petites ou moyennes distances, et une “autre” pour les longues distances et les vacances.
De plus, la fabrication de ces batteries a une empreinte écologique considérable. Elle nécessite l’extraction et la purification de terres rares (lithium, graphène) par des procédés qui entraînent le rejet de grandes quantités d’eau polluée par des acides, des métaux lourds et même des éléments radioactifs tels que l’uranium et le thorium. Dans les pays concernés, cette production fait souvent appel à une main-d’œuvre peu qualifiée travaillant dans des conditions que nous n’acceptons plus aujourd’hui. Le recyclage à grande échelle des batteries en fin de vie pose également d’importants problèmes techniques et financiers, qui ne sont pas encore correctement maîtrisés. De plus, les filières de recyclage ne prétendent actuellement recycler au mieux que 95 % des composants des batteries.
Enfin, même si la voiture “électrique” a un avenir à long terme, cette technologie est inapplicable aux véhicules énergivores tels que les poids lourds, les autocars, les engins de chantier, les bateaux, les trains ou peut-être, dans le futur, les avions. Tous ces véhicules sont à l’origine de sources importantes de pollution et de gaz à effet de serre. La société ne peut pas s’en accommoder. Il nous faut donc autre chose, et rapidement !
Les possibilités de l’hydrogène
La consommation d’énergie électrique devrait idéalement être concomitante à sa production, conformément aux lois de la physique. C’est ce que les gestionnaires des grands réseaux électriques cherchent à accomplir en adaptant en permanence la production à la consommation. L’idéal serait donc une voiture électrique qui produirait l’électricité dont elle a besoin plutôt que de dépendre d’une énergie électrique embarquée. Et cette technologie idéale existe déjà aujourd’hui : c’est le moteur à hydrogène ! Il génère de l’électricité grâce à une pile à combustible qui utilise l’air ambiant et de l’hydrogène stocké dans un réservoir. Il ne rejette dans l’atmosphère qu’un peu de vapeur d’eau. Son autonomie est comparable à celle de nos voitures actuelles, son réservoir a un volume similaire, et le plein peut être fait en quelques minutes à un prix comparable. De plus, le moteur à hydrogène peut également équiper les véhicules très énergivores !
Quelques exemples pour convaincre les sceptiques : la flotte parisienne de taxis Hype compte déjà plusieurs centaines de voitures à hydrogène et prévoit d’en avoir plus de 600 d’ici fin 2020. Le Land de Basse-Saxe, siège d’Alstom Allemagne, a commandé 14 trains à hydrogène qui devraient être mis en service d’ici fin 2020. Le constructeur belge Van Hool a également reçu une commande d’une quarantaine de bus à hydrogène pour le marché allemand. De nombreux autres exemples existent pour soutenir cette technologie, il suffit de faire une recherche sur internet pour s’en convaincre.
L’exemple du Japon
Pourquoi cette technologie ne s’impose-t-elle pas dès aujourd’hui ? Voici quelques raisons.
Tout d’abord, il y a le problème de la poule et de l’oeuf. Il y a peu de voitures à hydrogène, et elles sont chères, car il y a peu de stations de ravitaillement en hydrogène. De même, le réseau de distribution est quasi inexistant en raison du faible nombre de voitures et de leur coût élevé. Il faudra donc construire progressivement un réseau de pompes à hydrogène, comme cela a été fait pour les pompes à essence au début de l’ère automobile. Les pays asiatiques, en particulier le Japon, sont fortement engagés dans cette voie. Par exemple, le Japon compte déjà une centaine de stations de ravitaillement en hydrogène en 2019 et prévoit d’en avoir 900 d’ici 2030, pour alimenter 800 000 voitures.
Ensuite, les grands constructeurs automobiles européens investissent massivement dans les voitures “électriques” avec batteries, mais seulement marginalement dans les voitures à hydrogène. Ils ont donc un intérêt objectif à rentabiliser leurs investissements sur la période la plus longue possible, et donc à retarder l’avènement d’une technologie plus performante.
Enfin, la plupart des gouvernements européens font preuve d’inertie, voire d’indifférence, en ce qui concerne l’essor de l’industrie automobile à hydrogène, à l’exception peut-être de l’Allemagne.
Il existe également un obstacle financier bien réel : pour le moment, les électrodes des piles à combustible des moteurs à hydrogène sont recouvertes de platine, un métal précieux presque aussi cher que l’or ! Cependant, différentes alternatives sont actuellement en cours de test, de sorte que ce handicap devrait bientôt être surmonté.
Certes, à court terme et peut-être à moyen terme, les voitures “électriques” avec batteries rechargeables constituent une avancée écologique significative. Cependant, leurs limitations physiques en termes de consommation d’énergie et leur impact environnemental condamnent cette motorisation à plus long terme. Comme la technologie avance à grands pas, il est fort probable que ce type de moteur finira par être relégué au rang des dinosaures industriels dans une ou deux décennies. Si l’Europe ne prend pas la mesure de l’enjeu, elle risque de voir son marché envahi d’ici 2030 par des véhicules à hydrogène, tels que ceux proposés par Toyota, Hyundai et Honda.