Prendre rendez-vous avec un dermatologue en France peut s’avérer être un véritable parcours du combattant. Dans certaines régions, les délais peuvent atteindre jusqu’à 9 mois, ce qui constitue une perte de chance pour les patients, notamment dans le cas de la prise en charge d’un mélanome.
Selon une récente étude publiée par la Société Française de Dermatologie (SFD), les patients doivent attendre en moyenne 64 jours pour obtenir une consultation, contre 41 jours il y a seulement 10 ans, soit une augmentation du délai de 23 jours.
Cette situation a également un impact sur le temps que les praticiens peuvent consacrer à chaque patient lors de la consultation. Certains patients atteints de maladies chroniques, comme le Vitiligo, se sentent abandonnés par la médecine, ce qui entraîne des ruptures de liens entre le patient et le praticien.
Alors, quelles sont les causes de cette dégradation des délais de consultation en France et comment y remédier ?
Une pénurie de dermatologues : un frein à l’accès aux soins
Selon les chiffres officiels du Conseil de l’Ordre des Médecins, la profession a perdu 10% de ses effectifs en 10 ans, passant de 3 821 en 2007 à 3 410 en 2017. De plus, la proportion de dermatologues exerçant une activité libérale ou mixte a également fortement diminué, passant de 85% en 2009 à 78% en 2017, ce qui équivaut à une baisse de 524 dermatologues sur la période.
Une répartition inégale en fonction des régions
Tous les Français ne sont pas logés à la même enseigne en fonction de leur lieu de résidence. Si les habitants du Rhône, du Nord, des Bouches-du-Rhône ou encore de Paris sont plutôt bien lotis, avec une densité supérieure à 100 dermatologues pour 100 000 habitants, certaines régions comme l’Ariège, le Cher, le Jura ou la Lozère comptent moins de 5 dermatologues pour 100 000 habitants.
Un vieillissement de la population de praticiens
Cette tendance ne risque pas de s’améliorer dans les prochaines années si l’on considère l’âge des praticiens. Aujourd’hui, 35% des dermatologues ont plus de 60 ans, contre seulement 11% en 2007, et seulement 16% ont moins de 40 ans. La diminution du nombre de dermatologues formés ne permettra donc pas de compenser les départs en retraite qui s’annoncent importants dans les années à venir.
Paradoxalement à cette diminution du nombre de dermatologues en exercice, le vieillissement de la population, la pollution et les excès de nos modes de vie engendrent une augmentation de toutes les pathologies dermatologiques : cancers cutanés, eczéma, rosacée…
Il est donc urgent de trouver des solutions afin de permettre aux patients d’avoir un niveau de prise en charge à la hauteur de leurs attentes. Dans son livre blanc de la dermatologie, la SFD présente ses principales recommandations.
Entre augmentation du Numerus Clausus, formation et télémédecine…
La première solution évidente consiste à augmenter le nombre de dermatologues en formant davantage d’internes en dermatologie et en facilitant les démarches d’installation en libéral. Cependant, il faut noter qu’il faut 10 ans pour qu’un étudiant en médecine puisse débuter une activité libérale, il est donc nécessaire de trouver des alternatives plus rapides pour améliorer l’accès aux soins pour les patients.
Réorganiser le parcours de soin du patient en structurant la télémédecine fait partie des enjeux prioritaires de la SFD. La dermatologie constitue un modèle pertinent pour la mise en œuvre de la télémédecine, notamment en raison de l’importance du diagnostic visuel. La télémédecine présente un intérêt direct, notamment dans les régions à très faible densité de dermatologues.
Les professionnels de santé de proximité, tels que les médecins généralistes ou les pharmaciens d’officine, peuvent également jouer un rôle clé pour résoudre un certain nombre de demandes. Cependant, leur formation sur les maladies de peau et les nouveaux traitements reste assez sommaire à ce jour. Un renforcement de leur formation permettrait de mieux orienter les patients et de définir quels “profils” de patients doivent être adressés directement aux dermatologues et ceux qui peuvent être pris en charge directement par la médecine générale ou le pharmacien d’officine.
Espérons que nos gouvernants puissent entendre ces recommandations et permettre ainsi à toute personne souffrant de problèmes de peau d’avoir accès à une prise en charge rapide et efficace.