Ne serait-il pas déjà “trop tard” pour acheter une voiture électrique ? En effet, les prix ne font qu’augmenter, la charge rapide devient très chère, et la disponibilité des infrastructures de recharge publique peine à décoller. Dressons ensemble le portrait actuel de la mobilité électrique pour tenter d’y voir plus clair.
Un coût de recharge qui s’envole
Si cela vous a échappé, les tarifs de recharge rapide pour les véhicules électriques ont atteint des sommets en cette première moitié de l’année 2022, peu importe le réseau utilisé. En considérant une consommation moyenne sur autoroute de 20 kWh aux 100 kilomètres, il devient difficile de parcourir 100 kilomètres pour moins de 15 euros. A comparer aux 12 euros pour une voiture diesel consommant 6 litres aux 100 kilomètres sur autoroute.
Une station de recharge Fastned
Tesla, Fastned, Totalenergies ou encore Ionity proposent tous un prix variant entre 0,50 et 0,79 euro par kWh, ce qui correspond peu ou prou à un prix compris entre 10 et 16 euros pour 100 kilomètres d’autoroute. Il faut toutefois nuancer puisque les possesseurs d’une auto électrique du consortium Ionity (Audi, BMW, Mercedes-Benz, Ford, Porsche et Hyundai) peuvent bénéficier d’un abonnement permettant de réduire drastiquement la facture, avec un coût de l’ordre de 0,30 euro par kWh. Si vous n’êtes pas client de ces constructeurs, il est également possible de souscrire à l’abonnement IONITY Passeport (à 17,99 euros par mois) pour bénéficier d’un tarif réduit à 0,35 euro par kWh.
Il est donc encore possible de rouler en électrique sur autoroute pour moins cher qu’une voiture thermique, surtout avec la récente envolée du prix de l’essence et du diesel.
Le Hyundai Kona electric à une borne Ionity // Source : Yann Lethuillier pour Frandroid
Si les grands trajets en voiture électrique peuvent en effet parfois être plus coûteux que le même trajet en véhicule thermique, il faut replacer le coût dans un contexte global. En effet, pour l’immense majorité des personnes effectuant uniquement de grands trajets pour les vacances, et chargeant à domicile le reste du temps, la moyenne annuelle du coût aux 100 kilomètres sera toujours sous 5 euros, voire même sous 3 euros dans de nombreux cas, ce qui reste exceptionnellement bas.
Cependant, nous remarquons une augmentation globale des coûts liés à la recharge, et plus généralement la fin des recharges gratuites sous différentes formes. En effet, chez Tesla notamment, il y a eu une longue période où les Supercharges étaient gratuites (soit avec l’achat d’un véhicule, soit grâce aux parrainages), mais cela est bel et bien terminé. De la même manière, des constructeurs comme Porsche, Audi ou BMW offraient parfois jusqu’à trois années de gratuité chez Ionity avec l’achat d’un véhicule électrique, mais ce n’est aujourd’hui plus d’actualité.
Enfin, alors qu’il était pendant des années assez facile de charger gratuitement sur des bornes publiques, avec les parkings de supermarchés, ou encore dans des hôtels où l’on passait une nuit, tout cela est en passe de disparaître au profit de bornes payantes, maintenant que leur taux d’utilisation augmente. Tous ces coûts qui apparaissent sont à garder en tête lorsque l’on tient un budget relatif à une voiture électrique, et il faut anticiper d’ores et déjà leur probable augmentation dans un futur proche. Malheureusement, les coûts liés à la charge ne sont pas les seuls à avoir subi une hausse.
Des délais et des tarifs qui augmentent
La star des voitures électriques de 2021 en France qu’était la Tesla Model 3 a vu son prix bondir depuis le début de l’année 2022, passant d’une entrée de gamme disponible à partir de 36 800 euros (en tenant compte du bonus écologique maximal de 7 000 euros en début d’année 2021) à 48 990 euros au moment d’écrire ces lignes.
Une Tesla Model 3 achetée aujourd’hui est affichée à 50 990 euros hors bonus
Une augmentation de 33 % du ticket d’entrée en un peu plus d’un an, cela est tout sauf négligeable. Cet exemple de la Tesla Model 3 est loin d’être isolé, même si les autres constructeurs n’ont pas augmenté leur prix dans des proportions comparables. Même la moins chère des électriques, la Dacia Spring, n’a pas été épargnée par la hausse des prix : c’est désormais 14 % de plus qu’en début d’année qu’il faudra débourser pour en devenir propriétaire.
Outre les tarifs, on se retrouve aujourd’hui dans une situation assez inédite dans le monde des véhicules électriques, avec des délais de livraison qui s’envolent, à tel point que certains constructeurs réfléchissent à arrêter d’accepter de nouvelles commandes, par crainte de ne pas pouvoir honorer les tarifs auxquels les véhicules ont été commandés.
La pénurie de certains composants associée aux tensions sur les matières premières que l’on connaît au niveau mondial ont pour conséquence une situation très incertaine sur le coût de fabrication des voitures électriques. Si l’on reprend l’exemple d’une Tesla Model 3, la commander en mai 2022 ne vous permettra pas d’être livré avant le second trimestre de l’année 2023, soit quasiment un an d’attente, preuve en est que l’augmentation conséquente des prix n’a pas refroidi les potentiels acheteurs. Nuançons toutefois les dates annoncées par Tesla, puisque l’une de nos connaissances ayant commandé une Model 3 en avril 2022 a déjà vu sa date de livraison être modifiée plusieurs fois de suite, oscillant entre juin et novembre 2022.
De plus en plus de véhicules électriques roulent sur nos routes, et il est nécessaire de recharger ces véhicules en déplacement. Alors qu’à une certaine époque, les bornes de recharge étaient sous-utilisées, cela a bien changé en 2022. Faisons le point sur un autre problème potentiel : la disponibilité des bornes de recharge.
Des bornes de recharge qui ne sont pas en nombre suffisant
Les véhicules 100 % électriques représentent aujourd’hui plus de 10 % des ventes de voitures neuves en France, et la part de véhicules branchés frôle même les 20 % en avril 2022 selon le baromètre de l’Avere. Avec bientôt 900 000 véhicules électriques et hybrides rechargeables en circulation dans l’hexagone, qu’en est-il de la disponibilité des bornes de recharge ?
Durant le mois d’avril 2022, près de 24 000 voitures branchées ont été immatriculées en France (véhicules 100 % électriques et hybrides rechargeables), et dans le même laps de temps, 2 308 points de recharge ouverts au public ont été ajoutés, ce qui correspond environ à un point de charge installé pour 10 voitures immatriculées.
Une Opel Mokka-e sur Superchargeur // Source : D. Nogueira
L’explosion des ventes de voitures 100 % électriques depuis 2020 a fait passer le nombre de véhicules électriques par borne de recharge de 9,66 en 2019 à 14,76 en 2022. En effet, alors qu’en 2019 l’Avere indiquait qu’il y avait 28 537 bornes de recharge ouvertes au public, et 275 565 véhicules électrifiés en France, en avril 2022 le nombre de véhicules branchés en circulation a été multiplié par trois, mais le nombre de bornes n’a que doublé.
On remarque d’ailleurs que l’écart s’est drastiquement creusé en 2020, où le nombre de véhicules branchés en circulation a grimpé de 70 % en France, quand le nombre de bornes n’a augmenté que de 15 %. En 2021 et 2022, l’évolution du nombre de bornes et du nombre de véhicules électrifiés se sont toutefois rapprochées pour suivre la même courbe.
Avec de longs trajets de plus en plus chers, des tarifs qui augmentent, des délais qui s’allongent et une infrastructure de recharge qui apparaît insuffisante, reste-t-il tout de même certains bons côtés à la voiture électrique en 2022 ? Bien entendu !
Une incitation à l’achat toujours présente
Les objectifs annoncés de l’Europe pour 2035 sont clairs : aucun véhicule qui n’est pas zéro émission durant sa phase d’utilisation ne pourra être vendu. Si le véhicule thermique neuf doit être enterré d’ici là, il en va de même pour les véhicules hybrides, qu’ils soient rechargeables ou non. Seuls les véhicules 100 % électriques pourront rester au catalogue, et pour pousser les consommateurs à se diriger vers des véhicules électriques, les incitations financières ne manquent pas.
Le bonus écologique de l’état est un dispositif bien connu, permettant de baisser le coût d’acquisition d’une voiture électrique de 6 000 euros dans certains cas. Il est possible de cumuler ce bonus écologique avec une prime régionale ou départementale dans certains cas, pour atteindre parfois 11 000 euros d’aides. En plus de cela, une prime de mise à la casse de plusieurs milliers d’euros est octroyée sous condition, lorsque vous vous séparez d’une voiture thermique ancienne.
Toutes ces aides ont pour but d’accélérer la transition vers la voiture électrique, et montrer qu’il est possible de franchir le pas tout en limitant les dépenses. En effet, bien que les véhicules électriques soient plus onéreux que leur équivalent thermique au niveau du coût d’achat, le coût global au kilomètre est dans l’immense majorité des cas bien inférieur, surtout si l’on compare des véhicules thermiques aussi puissants, qui auront quant à eux un malus écologique conséquent à l’achat.
Conclusion
Si l’exemple des longs trajets du début de ce dossier était là pour rappeler que certaines utilisations seront coûteuses, au prix actuel du kilowattheure (0,17 euro), en chargeant un véhicule électrique à domicile, le coût aux 100 kilomètres sera situé sous les 3,5 euros, ce qui correspond à moins de deux litres de carburant.
Ainsi, celles et ceux pour qui le portrait actuel d’un véhicule électrique en France ne serait pas assez attrayant ne doivent pas oublier ce qu’est l’alternative thermique disponible aujourd’hui. Bien que moins cher à l’achat, le bilan global d’une voiture thermique est encore plus négatif sur tous les plans : les coûts d’entretien, le coût à l’utilisation ou encore l’impact environnemental sont toujours bien plus élevés que ceux d’une voiture électrique.