Les trains du futur ont envahi notre imaginaire depuis des décennies, mais en réalité ils ne sont pas réellement des trains. En effet, ils ne “traînent” rien et sont dépourvus de roues et de rails. Leur utilisation abusive du terme “train” vise simplement à attirer des subventions publiques pour le projet. Cependant, ces prétendus “trains” sont loin de posséder les avantages du chemin de fer, tels que la facilité de déplacement, la sécurité offerte par les rails, la faible consommation d’énergie et la capacité de transporter plusieurs centaines, voire milliers, de personnes dans un seul convoi.
L’un de ces projets futuristes est l’Aérotrain de Jean Bertin. Il s’agit d’un engin expérimental ressemblant à un avion de chasse amoureusement croisé avec une voiture américaine. Cet engin fascinant n’apporte aucune révolution ferroviaire, mais il a tout de même contribué à la conversion de la SNCF à la grande vitesse.
Dans les années 1950, 1960 et 1970, une période appelée “Trente Glorieuses”, les décideurs politiques et les technocrates étaient obsédés par le tout-pétrole, le tout-automobile et le tout-béton. Ils détestaient le chemin de fer et le considéraient comme une relique du passé. Pour eux, le train était condamné à disparaître. Heureusement, certains ingénieurs à la SNCF pensaient différemment. Convaincus que le train classique avait atteint ses limites en termes de vitesse, ils cherchaient à développer de nouvelles technologies pour répondre à la concurrence aérienne.
C’est ainsi que Jean Bertin, un ingénieur français, a réussi à attirer l’attention des autorités publiques sur un tout nouveau système : l’Aérotrain. À partir du milieu des années 1960, la SNCF a développé son Service de la Recherche et s’est intéressée à la traction par turbines à gaz, même si cette technologie avait été abandonnée par la plupart des réseaux ferroviaires du monde.
La création de ce service de recherche était une véritable révolution pour la SNCF. Il marquait le début d’une nouvelle ère pour le chemin de fer en France, avec une intégration plus étroite des politiques et des techniques de traction dans l’offre et la demande économiques. Cette période a également vu l’apparition du TGV, avec ses essais initiaux en 1970 et sa mise en service de la ligne Paris-Sud-Est en 1981.
L’engouement pour l’Aérotrain de Jean Bertin a poussé la SNCF à développer une politique décisive en matière de vitesse pour les voyageurs, intégrée à une stratégie commerciale ambitieuse. Cette nouvelle politique est apparue avec le lancement du train Paris-Toulouse, appelé Le Capitole, en 1967. Ce train roulait à 200 km/h sur une partie de son parcours, rompant ainsi avec la doctrine des trains lourds, rares, lents et peu coûteux.
Le pétrole a finalement joué un rôle déterminant dans l’abandon de l’Aérotrain de Bertin. La crise pétrolière de 1973-1974 a modifié la position de la SNCF vis-à-vis de la grande vitesse. Elle a permis aux partisans de la grande vitesse au sein de la SNCF de convaincre leur Maison de l’importance stratégique de cette nouvelle technologie. Ainsi, le TGV est né et a connu un succès fulgurant.
Malheureusement, l’Aérotrain de Jean Bertin a été abandonné en 1976, un an après la mort de son créateur. Son incompatibilité avec le réseau ferré existant et sa faible capacité de transport ont eu raison de ce projet révolutionnaire. Toutefois, l’idée de l’Aérotrain a perduré et a suscité l’intérêt des chercheurs japonais. Ils ont récemment développé un prototype utilisant la technologie de l’Aérotrain pour un nouveau réseau à grande vitesse. Bien que ces recherches soient encore en cours, elles montrent que l’Aérotrain de Jean Bertin continue d’influencer le futur du transport ferroviaire.
En fin de compte, l’Aérotrain a peut-être perdu la bataille face au TGV, mais son héritage perdure. Les avancées technologiques et les recherches qu’il a suscitées ont permis de repousser les limites de la vitesse ferroviaire et ont ouvert la voie à des innovations futures dans le domaine du transport. Aujourd’hui, nous pouvons profiter des voyages à grande vitesse du TGV, qui doit une partie de son succès à l’Aérotrain de Jean Bertin.