Le Comité social et économique dispose de plusieurs prérogatives lui permettant d’accomplir correctement ses missions. Parmi celles-ci figure le droit d’alerte.
Ainsi, en cas d’atteinte dans l’entreprise aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles, tout membre de la délégation du personnel au CSE peut saisir l’employeur. Le droit d’alerte s’applique en cas d’atteinte non justifiée par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché.
Le Code du travail et les ordonnances Macron régissent les dispositions relatives à ce droit, ainsi que les procédures à adopter selon les situations qui surviennent au sein de l’entreprise.
À quoi correspond le droit d’alerte du CSE ?
Les membres du Comité social et économique disposent de différentes prérogatives, dont le droit d’alerte. Ce droit permet aux membres de demander à l’employeur de leur fournir des explications dans certaines situations.
Il s’agit d’une mesure d’urgence qui s’inscrit dans la continuité du droit d’alerte de l’ancien comité d’entreprise.
Le champ d’application du droit d’alerte du Comité social et économique dépend de la taille de l’entreprise. Ainsi, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le CSE peut exercer le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles des salariés.
Dans une entreprise de plus de 50 salariés, le Comité social et économique dispose de prérogatives plus étendues. En effet, il peut alerter l’employeur en cas d’alerte économique ou d’alerte sociale.
Ainsi, le Comité social et économique est habilité à exercer le droit d’alerte au moindre signe pouvant mettre en péril la société ou les droits des salariés. En effet, il n’est pas obligé d’attendre les réunions du CSE pour alerter l’employeur.
Quelles sont les différentes situations conduisant à l’exercice du droit d’alerte du CSE ?
Au sein de l’entreprise, différentes situations peuvent inciter le Comité social et économique à exercer son droit d’alerte. En effet, il peut être utilisé :
- En cas d’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise ;
- En cas de danger grave et imminent ;
- En cas de risque pour la santé publique et l’environnement ;
- En cas d’alerte économique ;
- En cas d’alerte sociale.
En cas d’atteinte aux droits des personnes
Conformément à l’article L.2312-59 du Code du travail, le droit d’alerte peut être utilisé lorsqu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique ou mentale ou aux libertés individuelles. Il peut s’agir d’une victime de harcèlement moral ou sexuel, de violences physiques, de discrimination ou encore d’abus de faiblesse.
Par exemple, si un salarié de l’entreprise est victime de harcèlement au travail et que cela porte atteinte à sa personne, il est nécessaire d’alerter l’employeur.
Lorsqu’il existe une atteinte aux droits d’une personne, le Comité social et économique exerce son droit d’alerte via une lettre qu’il adresse à l’employeur ou en sollicitant directement un entretien avec celui-ci.
Ensuite, une enquête à l’initiative du lanceur d’alerte et de l’employeur doit être effectuée, afin de prendre les mesures adéquates pour faire cesser les troubles dont la personne est victime. A la suite de cette enquête, l’employeur et le CSE dressent un bilan des informations recueillies.
En cas de carence de l’employeur et si aucune solution n’est apportée pour résoudre le problème, le salarié ou le CSE peut saisir le juge du conseil de prud’hommes en référé.
En cas de danger grave et imminent
Le Comité social et économique doit exercer le droit d’alerte lorsqu’il constate un danger imminent au sein de l’entreprise, susceptible d’avoir un impact sur le salarié. Les notions « danger » et « imminent » renvoient à une situation grave, imprévue, qui peut se déclencher à n’importe quel moment.
Ainsi, selon l’article L.4131-1 du Code du travail, les membres du Comité social et économique peuvent alerter l’employeur dès lors qu’ils constatent l’existence d’un danger grave et imminent pour la vie ou la santé des salariés, ou si des défectuosités sont constatées dans les systèmes de protection.
En cas de risque pour la santé publique et l’environnement
Le Comité social et économique alerte l’employeur dès lors qu’il estime que les produits de fabrication utilisés par l’entreprise peuvent engendrer un risque grave pour la santé publique ou pour l’environnement.
Le droit d’alerte économique
Le droit d’alerte économique est réservé au Comité social et économique des entreprises de plus de 50 salariés.
L’employeur doit informer le Comité social et économique des stratégies adoptées par la société, afin d’assurer un suivi de la situation économique et financière de l’entreprise.
Ainsi, le Comité social et économique dispose d’un droit d’alerte économique : conformément à l’article L.2312-63 du Code du travail, lorsque le CSE a connaissance des faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications.
Cette demande est immédiatement inscrite à l’ordre du jour de la prochaine réunion du CSE.
Le droit d’alerte sociale
Le droit d’alerte sociale est une prérogative du CSE qui ne s’applique que dans les sociétés composées de plus de 50 salariés.
Il peut être lancé lorsque l’employeur a recours de manière abusive à des contrats précaires pour embaucher du personnel. Ainsi, selon l’article L.2312-70 du Code du travail, une alerte peut être lancée dès lors qu’il existe une augmentation significative du nombre de contrats à durée déterminée ou de contrats d’intérim.
Par ailleurs, le Comité social et économique peut, conformément à l’article L.2312-71 du Code du travail, alerter l’inspection du travail s’il a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux contrats précaires.
Quelle est la procédure à suivre pour déclencher le droit d’alerte du CSE ?
Le droit d’alerte doit être exercé par le Comité social et économique en respectant une certaine procédure. En principe, le lanceur d’alerte fait part de la situation à l’employeur avant de prendre une décision. Une enquête doit être effectuée pour déterminer la gravité du danger, afin d’adopter les solutions adéquates.
Ainsi, le droit d’alerte exercé par les représentants du personnel obéit à une procédure particulière selon le type d’alerte lancée.
Les circonstances nécessaires
L’exercice du droit d’alerte suppose que la situation au sein de l’entreprise soit suffisamment préoccupante et qu’elle puisse avoir un impact direct sur les salariés. En effet, il ne peut pas être exercé de manière systématique. À ce titre, le Comité social et économique peut exercer son droit d’alerte lorsque :
- Un salarié est victime de discrimination ;
- Un salarié est victime de harcèlement de la part d’un collègue ou de la part de l’employeur ;
- Un salarié subit une forme de violence de la part d’un collègue ou de la part de l’employeur ;
- Une situation au sein de l’entreprise nuit à la productivité ou à l’intégrité physique des salariés ;
- Les équipements mis à disposition du personnel sont défectueux.
Lorsqu’il existe un danger grave et imminent, il est indispensable d’en alerter immédiatement l’employeur ou son représentant.
L’enquête conjointe avec l’employeur
L’employeur procède immédiatement à une enquête avec le représentant du CSE qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.
L’enquête se déroule sous le regard actif du salarié. Cette enquête permet de recueillir le témoignage des salariés concernant la nature du danger, et permet de déterminer les causes de la problématique.
L’objectif consiste à rechercher les causes du danger. L’enquête va révéler les risques professionnels à l’origine de l’incident.
A la suite de cette enquête, si l’employeur et le CSE ont trouvé un accord, des mesures adaptées seront mises en place pour remédier au problème. Toutefois, s’ils ne parviennent pas à trouver un accord commun, le conseil de prud’hommes sera saisi par le CSE ou par la victime.
La procédure étape par étape
La procédure à suivre pour déclencher le droit d’alerte varie en fonction de la nature du danger. En effet, il existe une procédure spécifique pour chaque type d’alerte lancée.
La procédure du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes
En cas d’atteinte aux droits des personnes, le CSE doit suivre la procédure suivante :
- Constat d’une atteinte aux droits des personnes par un membre du CSE, ou par l’intermédiaire d’un salarié ;
- Un membre du CSE saisit l’employeur ;
- Alerter l’employeur de la nature des événements ;
- Procéder à une enquête conjointement avec l’employeur : s’ils trouvent une solution commune, ils mettent en place des mesures adaptées.
- Si aucune solution n’est trouvée, possibilité de saisine du conseil de prud’hommes par le Comité social et économique ou par la victime.
La procédure du droit d’alerte en cas de danger grave et imminent
En cas de danger grave et imminent, le CSE doit suivre la procédure suivante :
- Constat d’un danger grave et imminent au sein de l’entreprise ;
- Un membre du CSE saisit l’employeur ;
- Alerter l’employeur de la nature des événements ;
- Emettre un avis et inscrire la nature du danger dans un registre spécial ;
- Enquêter conjointement avec l’employeur ;
- Si aucun accord n’a été trouvé pour remédier au problème, organiser une réunion d’urgence dans un délai maximum de 24 heures ;
- Informer et inviter à la réunion, à l’initiative de l’employeur, l’inspecteur du travail et un agent du service de prévention de la caisse régionale d’assurance maladie ;
- Trouver un nouvel accord entre l’employeur et la majorité des membres du CSE sur les mesures à adopter ;
- En l’absence d’accord, l’employeur est dans l’obligation de saisir l’inspection du travail. C’est cette dernière qui appliquera les mesures qu’elle juge adéquates.
La procédure du droit d’alerte en cas de risque pour la santé publique et l’environnement
En cas de risque pour la santé publique et l’environnement, le CSE doit suivre la procédure suivante :
- Le représentant du personnel au CSE constate, par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe un risque grave pour la santé publique ou l’environnement ;
- Il alerte immédiatement l’employeur de la nature des événements ;
- L’alerte est consignée par écrit ;
- L’employeur examine la situation conjointement avec le représentant du personnel au CSE qui lui a transmis l’alerte et l’informe de la suite qu’il réserve à celle-ci ;
- En cas de divergence entre l’employeur et le CSE, le salarié ou le représentant du personnel au CSE peut saisir le représentant de l’Etat dans le département.
La procédure du droit d’alerte économique
En cas d’alerte économique, le CSE doit respecter la procédure suivante :
- Demander à l’employeur des explications sur les faits que le Comité social et économique estime préoccupants ;
- Inscription de la demande d’explication à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Comité social et économique ;
- Établissement d’un rapport par le CSE si la réponse donnée par l’employeur n’est pas suffisante ou s’il y a confirmation du caractère préoccupant de la santé financière de la société ;
- Transmission du rapport de la réunion au commissaire aux comptes et à l’employeur ;
- Voter sur la nécessité de saisir ou non l’organe en charge de l’administration ou de la surveillance si l’entreprise dispose de ces organes. Dans le cas contraire, informer les associés ou les membres des groupements d’intérêt économique.
La procédure du droit d’alerte sociale
En cas d’alerte sociale, le CSE doit effectuer la procédure suivante :
- Inviter l’employeur à s’expliquer à l’occasion de la prochaine réunion du Comité social et économique ;
- Saisir l’inspection du travail en cas d’abus de recours à des contrats précaires ;
- Communiquer à l’employeur le rapport établi par l’inspection du travail ;
- Communication par l’employeur du rapport aux salariés, avec les mesures à prendre pour remédier au recours abusif de contrats précaires.
Le Comité social et économique peut-il être sanctionné pour l’utilisation du droit d’alerte ?
Par principe, le Comité social et économique qui utilise son droit d’alerte ne peut être sanctionné. Cependant, le droit d’alerte doit être exercé de bonne foi.
Ainsi, le droit d’alerte ne doit pas être utilisé dans le but de nuire à l’entreprise ou à une personne déterminée. Le Code pénal sanctionne la dénonciation d’un fait totalement ou partiellement inexact. En effet, l’article 226-10 du Code pénal sanctionne la dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, de 5 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Peu utilisé, le droit d’alerte constitue un moyen de pression pour l’employeur et un gage de sécurité pour les salariés. Téléchargez votre guide CSE.