Conseiller et accompagner les étrangers dans leurs démarches pour demander l’asile en France est l’activité centrale des 113 permanences d’accueil de La Cimade réparties sur l’ensemble du territoire français, tant en métropole qu’en outre-mer.
Les réfugiés, un sujet d’actualité brûlant
Selon les données du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), en 2018, plus de 70 millions de personnes ont été déplacées de force, un chiffre sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. En plus des guerres civiles “totales”, telles que celle en Syrie, qui provoquent l’exode de millions de personnes, la question des réfugiés qui craignent la persécution en raison de leur religion, de leurs idées politiques, de leur genre ou de leur orientation sexuelle, est de nouveau d’une grande actualité. Chaque année, le nombre de réfugiés victimes des dérèglements climatiques, notamment dans les zones arides ou exposées aux cyclones, ne cesse d’augmenter.
Les raisons qui poussent les personnes à partir sont multiples et complexes. Elles comprennent des situations de violence généralisée voire de génocide, des économies en déclin, la kleptocratie et la corruption, l’absence de démocratie, un avenir bloqué dans des pays où l’État est défaillant ou inexistant. Les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels ne sont toujours pas garantis pour une grande partie de l’humanité.
La migration devient de plus en plus tragique et éprouvante, en raison des barrières ou des murs érigés par les politiques de contrôle des États. L’existence de réseaux de trafiquants d’êtres humains est une conséquence de ces politiques de fermeture des frontières. Ceux et celles qui ont recours à ces réseaux sont victimes de pratiques d’extorsion, de violences et de mensonges.
Aux yeux des autorités publiques, ces hommes, femmes et enfants sont considérés comme des migrants qu’il faut dissuader de poursuivre leur fuite désarmée, plutôt que comme des réfugiés nécessitant une protection. On met en place des opérations militaires pour les bloquer en amont des frontières, au lieu de leur offrir une protection.
Accompagnement dans les permanences
Depuis 80 ans, La Cimade s’engage aux côtés des personnes exilées et réfugiées en les défendant et en leur apportant un soutien juridique dans leurs demandes d’asile. Elle les aide à accéder à la procédure auprès des guichets uniques des demandeurs d’asile (GUDA) et, si nécessaire, les représente devant la justice. La Cimade accompagne également les personnes “dublinées” en les aidant à comprendre les mécanismes du règlement européen Dublin. Elle les soutient dans la défense de leurs droits aux conditions d’accueil (allocation pour demandeur d’asile et hébergement dans un CADA) auprès de l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII). De plus, elle les accompagne dans leurs démarches à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), notamment en assistant aux entretiens OFPRA et en intervenant volontairement devant la CNDA. La Cimade intervient régulièrement devant les juridictions (CNDA, Conseil d’État) sur les questions juridiques relatives au droit d’asile. Pour trouver la permanence la plus proche, consultez les pages régionales.
Le regard citoyen sur les entretiens OFPRA
La loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile permet à une personne étrangère demandant l’asile d’être accompagnée par un avocat ou un représentant d’association habilité par le directeur général de l’OFPRA. La Cimade est habilitée, avec 30 autres associations, à remplir cette mission. Elle souhaite avant tout apporter un regard citoyen lors de ce moment clé de la procédure d’asile, au cours duquel la personne est interrogée par un officier de protection de l’OFPRA, en présence d’un interprète si nécessaire. Pour être accompagné par un représentant de La Cimade lors de l’entretien personnel à l’OFPRA, il faut envoyer un courriel à observations.ofpra@lacimade.org au moins dix jours avant l’entretien, en précisant en objet : demande d’accompagnement tiers, avec votre nom, la date, l’heure de l’entretien et la division concernée (mentionnée sous la signature de la convocation jointe au courrier électronique). Pour en savoir plus, consultez le rapport sur la présence de tiers lors des entretiens OFPRA publié par La Cimade en juin 2017.
Les “personnes dublinées”
En 1990, une convention signée à Dublin a donné naissance au règlement 604/2013/UE du 26 juin 2013, qui définit les critères et les procédures pour déterminer quel État est responsable de l’examen d’une demande d’asile (dans l’Union européenne et quatre pays associés). Ce règlement n’interdit pas à une personne de déposer une demande d’asile dans plusieurs pays, mais en fonction de critères familiaux, de séjour ou d’entrée réguliers ou irréguliers, ou de l’enregistrement d’une demande d’asile, un seul État est responsable et les autres doivent transférer la personne vers cet État.
Au cours des six dernières années, le nombre de personnes concernées par ce règlement a considérablement augmenté en France et en Europe : 12 000 en 2015, 22 000 en 2016, 41 000 en 2017, et 45 000 en 2018 et 2019. Cette augmentation est due à l’afflux de personnes arrivant par la Méditerranée et les Balkans depuis 2015, ainsi qu’au démantèlement des campements de Calais et de Paris, où vivaient de nombreuses personnes passant par un autre pays européen. Cependant, le nombre de personnes effectivement transférées vers un autre pays européen reste faible, avec seulement 525 transferts en 2015, 1 300 en 2016, 2 330 en 2017, 3 533 en 2018 et 5 300 en 2019, soit 10 % des procédures.
Les autres personnes concernées devraient pouvoir déposer une demande d’asile en France après plusieurs mois d’attente, durant lesquels elles vivent dans la peur de l’expulsion, souvent sans ressources ni logement, dans une grande précarité.
Qu’est-ce qu’un demandeur d’asile ?
Un demandeur d’asile est une personne étrangère qui a demandé la protection de la France et qui n’a pas encore reçu de réponse de l’OFPRA ou de la CNDA en appel. Ce terme désigne également les personnes ayant demandé l’asile, mais dont la demande relève de la responsabilité d’un autre État européen (on parle alors de “dublinées”).
Quelles conditions remplir pour être reconnu comme demandeur d’asile en France ?
Si vous souhaitez demander l’asile en France, voici les différentes étapes à suivre :
Étape 1
Présentez-vous à la structure de premier accueil pour demandeurs d’asile (SPADA), qui vous donnera un rendez-vous au guichet unique des demandeurs d’asile le plus proche.
Étape 2
Rendez-vous au guichet unique des demandeurs d’asile à la date et à l’heure indiquées sur votre convocation. Lors de cette étape, la préfecture prendra vos empreintes, vous remettra une attestation de demande d’asile indiquant le type de procédure (normale, accélérée ou Dublin) et vous fournira le dossier de demande d’asile à compléter et à envoyer à l’OFPRA dans un délai de 21 jours.
Si vous relevez de la procédure Dublin, cela signifie qu’un autre pays de l’Union européenne est responsable de votre demande d’asile et la préfecture ne vous remettra pas le dossier de l’OFPRA.
Pendant cette étape, vous rencontrerez également l’OFII, qui est chargé de vous fournir les conditions matérielles d’accueil. L’OFII vous fera une offre d’hébergement et vous délivrera une allocation pour demandeur d’asile (ADA). Notez que l’OFII peut refuser immédiatement les conditions matérielles d’accueil si vous refusez leur offre, de partir dans une autre région ou si vous présentez votre demande plus de 90 jours après votre arrivée.
Si vous n’êtes pas orienté vers un hébergement, vous retournez à la SPADA, qui vous domiciliera pour que vous puissiez recevoir votre courrier. La SPADA vous aidera également à compléter votre dossier OFPRA en français et à traduire votre histoire.
Étape 3
Vous recevrez par le biais de l’espace usager de l’OFPRA une “lettre d’introduction” qui atteste que votre dossier a bien été introduit auprès de l’OFPRA.
Étape 4
Vous recevrez une convocation pour un entretien personnel à l’OFPRA. Lors de cet entretien, vous aurez droit à un interprète, et vous serez reçu dans un bureau en présence d’un officier de protection et de l’interprète. Notez que les convocations seront à terme délivrées par voie électronique.
Étape 5
Vous recevrez la décision de l’OFPRA par le biais de l’espace usager. Si la décision est positive, vous serez reconnu réfugié (pour une durée de 10 ans) ou obtiendrez une protection subsidiaire (carte pluriannuelle valable 4 ans). Si la décision est négative, vous pouvez demander une aide juridictionnelle (avocat gratuit) dans un délai de 15 jours à compter de la date de téléchargement de la décision de l’OFPRA dans l’espace usager. Vous aurez ensuite la possibilité de faire un recours auprès de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de l’OFPRA.
Étape 6
Vous recevrez une lettre d’enregistrement de votre recours à la CNDA.
Étape 7
Vous recevrez une convocation pour une audience à la CNDA, au cours de laquelle vous devrez de nouveau expliquer votre histoire et les persécutions que vous avez subies ou que vous craignez de subir.
Étape 8
Vous recevrez la décision de la CNDA par courrier. Si la décision est positive, vous serez reconnu réfugié ou obtiendrez une protection subsidiaire. Si la décision est négative, cela signifie que vous êtes débouté du droit d’asile, n’avez plus le droit de séjourner en France et pouvez faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Notez que l’OQTF peut être notifiée dès la lecture publique de la décision à la CNDA, avant même la réception de la décision par courrier.
Quels sont les droits des demandeurs d’asile ?
Les demandeurs d’asile ont les droits suivants :
Le droit de séjourner en France pendant l’examen de leur demande, avec une autorisation de séjour appelée “attestation de demande d’asile”, qui leur permet d’être en situation régulière et de circuler sur l’ensemble du territoire français, mais pas de franchir les frontières, même dans l’espace Schengen. Cette attestation peut être refusée ou retirée dans certaines situations, en fonction de la procédure appliquée.
Le droit à des conditions matérielles d’accueil, comprenant un hébergement et une allocation calculée en fonction de la taille de la famille et de la disponibilité ou non d’un hébergement gratuit. Ces conditions peuvent être refusées ou retirées dans certains cas.
Le droit à une domiciliation, à une aide sociale et à une assistance juridique pendant la procédure.
Le droit à une assurance maladie, à condition d’avoir résidé en France pendant au moins trois mois.
Le droit de travailler, si la demande d’asile a été enregistrée depuis plus de six mois et à condition d’obtenir l’autorisation du préfet (ce qui est rarement le cas). La personne peut également recevoir une formation professionnelle, mais ne peut pas suivre des études universitaires.
Le droit de s’exprimer librement, de rejoindre une association ou un parti politique, dans les limites prévues par la loi (pas d’incitation à la violence ou de propos haineux).
La liberté d’avoir une vie privée et familiale, par exemple de se marier (bien que son statut précaire complique les démarches), sauf dans le cas d’une union polygame.