Une production délocalisée en Espagne
Le nouveau SUV compact Renault Austral, dévoilé ce mardi 8 mars, sera produit à Palencia en Espagne. Une décision qui remplace la production actuelle des Mégane thermiques et du Kadjar, tous deux assemblés en Espagne. Ce concurrent du Peugeot 3008, mesurant 4,51 mètres de long, arrivera sur le marché français en octobre-novembre. De plus, une version rallongée à sept places sera lancée l’an prochain pour remplacer les monospaces Grand Scénic, actuellement fabriqués à Douai (Nord) en fin de carrière. Cette version concurrente du Peugeot 5008 pourrait d’ailleurs reprendre l’appellation mythique Espace, un nom présent chez Renault depuis 1984. La production de cette déclinaison sera également assurée par le site espagnol.
Des moteurs également produits en Espagne
Les nouveaux modèles Renault Austral seront équipés de moteurs à essence et hybrides, fabriqués en Espagne. Ces moteurs sont les clones techniques des nouveaux Nissan Qashqai et X-Trail. Le moteur 1,3 TCe à quatre cylindres, développé en collaboration avec Mercedes, est produit à Valladolid. Il offre une puissance de 140 et 160 chevaux, tout comme l’Arkana. Un tout nouveau moteur trois cylindres plus sobre de 1,2 litres, conçu pour réduire les émissions de CO2, est également au programme. Développant une puissance de 130 chevaux avec une hybridation de 48 volts, il est également fabriqué à Valladolid. La version hybride E-Tech de ce même moteur sera également produite en Espagne. Cette nouvelle version, plus performante, offre une puissance de 160 ou 200 chevaux (avec une tension de 400 volts), en remplacement de l’actuelle version 1,6 E-Tech, dont le moteur thermique était fourni par Nissan. Ce moteur équipe actuellement les modèles Clio, Captur et Arkana E-Tech. Le Renault Austral avec sa nouvelle version E-Tech affiche des émissions de CO2 très basses, d’environ 105 g/km de CO2 (sous réserve d’homologation).
La stratégie de délocalisation de Renault
Renault renforce ainsi sa stratégie de délocalisation en produisant la majorité de ses véhicules en dehors de la France. Tous les best-sellers de la marque sont délocalisés, comme la Clio en Turquie et en Slovénie, la Dacia Sandero en Roumanie et au Maroc, le Captur en Espagne et le Dacia Duster en Roumanie. En 2020, seulement 408 400 véhicules ont été assemblés en France, soit seulement 14,5% de la production totale de véhicules du constructeur Renault dans le monde, et 27% de sa production en Europe (y compris la Turquie). En 2014, Renault assemblait encore 640 000 véhicules en France, soit 23% de sa production mondiale.
Les délocalisations de Renault depuis les années 2000
Renault a commencé à délocaliser sa production dès les années 2000, avant PSA qui est devenu Stellantis en janvier 2021. Ce mouvement de délocalisation a notamment été symbolisé par le transfert des mini-Twingo de Flins vers Novo Mesto en Slovénie en 2007, ainsi que par le développement de la gamme roumaine Dacia. En 2019, Renault a arrêté complètement la fabrication des emblématiques Clio à Flins avec le passage à la cinquième génération.
Cette délocalisation massive, aussi bien de la part de Renault que de PSA, explique le déficit commercial historique de l’industrie automobile française, qui s’élève à 18 milliards d’euros en 2021. Les fabrications automobiles en France ont considérablement chuté et le pays est le plus touché en Europe, pire que l’Italie ou le Royaume-Uni.
Des coûts de main-d’œuvre moins élevés
Les entreprises automobiles françaises ont délocalisé leur production afin de réduire les coûts et maintenir des prix de vente acceptables pour les clients. En France, le coût horaire dans l’industrie s’élève à 38,7 euros (selon Rexecode), contre 23,6 euros en Espagne, 18,4 euros en Slovénie et seulement 6,6 euros en Roumanie. Les coûts extrêmement bas en Roumanie expliquent en partie le succès des modèles Dacia, dont les prix attractifs (moins de 10 000 euros pour une Sandero de base) séduisent les automobilistes français. Le coût de la main-d’œuvre représente environ un quart du prix de revient total d’un véhicule, selon la Fédération des équipementiers (Fiev).
En échange de la délocalisation des petits modèles, PSA en particulier a tenté de spécialiser ses usines françaises dans les modèles de gamme moyenne, qui sont moins sensibles aux coûts. Toutefois, les politiques fiscales et écologiques françaises ont favorisé les petits modèles délocalisés, considérés comme moins émetteurs de CO2. Aujourd’hui, ces petits modèles représentent près de 60% des ventes de véhicules neufs en France, contre seulement 40% au début des années 1990.
Renault produit ses utilitaires en France
Contrairement à PSA, Renault a concentré sa production en France sur les véhicules utilitaires, qui dégagent des marges plus importantes que les véhicules particuliers. Ainsi, les célèbres Kangoo (fourgonnettes et ludospaces) sont fabriqués à Maubeuge (Nord), y compris pour les partenaires de Renault, Nissan et Mercedes. Les fourgons Trafic sont produits à Sandouville (Seine-Maritime) et les utilitaires Master à Batilly (Meurthe-et-Moselle). Renault a également misé sur la renaissance de son haut de gamme avec des modèles tels que les berlines et breaks Talisman, ainsi que les monospaces Espace et Scénic de dernière génération, produits à Douai (Nord). Cependant, le manque de succès de ces modèles a conduit à une production limitée à moins de 50 000 véhicules en 2020. En conséquence, Luca De Meo, directeur général de Renault, a décidé de spécialiser l’usine de Douai dans la production de véhicules électriques, un choix audacieux. Par ailleurs, le site historique de Flins (Yvelines) cessera sa production de véhicules en 2024.