Un succès controversé ? Lors d’une visite chez un concessionnaire Stellantis à Joinville-le-Pont (Seine-et-Marne), Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, s’est réjoui de l’engouement pour le leasing social. Cette mesure gouvernementale vise à soutenir financièrement les ménages les plus modestes dans l’acquisition, ou du moins dans la location à long terme, d’une voiture électrique. L’idée, développée par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2022, était de permettre l’achat d’un véhicule électrique pour un loyer mensuel d’environ 100 euros. La mesure a été lancée en décembre dernier. Cependant, en raison de la diversité d’une quinzaine de modèles proposés, les loyers varient de 54 euros pour la Citroën ë-C3 à 149 euros pour une Jeep Advenger ou une Peugeot e-2008.
Selon le ministre de la Transition écologique, 90 000 Français ont souhaité être informés des modalités du leasing social et 35 000 ont été contactés par des concessionnaires pour bénéficier de ce dispositif ouvert aux ménages les plus modestes (ayant un revenu fiscal de référence de 15 400 euros par part et par an) et parcourant plus de 8 000 km par an.
Problème : mi-décembre, l’Élysée et Bercy avaient évoqué un objectif de 20 000 à 25 000 dossiers de leasing social en 2024. Il est vrai que ce dispositif coûte cher à l’État, qui le finance à hauteur de 13 000 euros par véhicule. Le gouvernement a-t-il décidé d’élargir un peu plus les cordons de la bourse en 2024 pour financer 35 000 véhicules ? Il semblerait que les différents ministres concernés par cette mesure ne soient pas tous sur la même longueur d’onde.
Une offre abondante des constructeurs
Lorsque le gouvernement a lancé le leasing social, le manque de disponibilité des voitures électriques répondant aux nouveaux critères environnementaux semblait être un obstacle. En effet, depuis la fin de l’année dernière, l’État ne subventionne plus les voitures produites en Asie ou aux États-Unis dont les émissions totales de CO2 dépassent un certain seuil. Mais un mois après la mise en place de la plateforme de réservation des véhicules en leasing, les constructeurs se bousculent pour placer leurs voitures.
Stellantis propose neuf modèles. Le groupe dirigé par Carlos Tavares a même ajouté la Peugeot e-208 à sa liste, alors qu’il affirmait l’été dernier que ce modèle serait trop cher pour être éligible. Aujourd’hui, le groupe se félicite d’avoir déjà enregistré 20 000 commandes : “Stellantis réalise 80 % des volumes prévus dans le cadre du dispositif initial, démontrant que son offre de leasing est pertinente et abordable”, se vante le groupe.
Renault, qui ne proposait initialement que deux modèles, la Twingo électrique (en fin de vie) et la Megane E-Tech, a finalement ajouté la ZOE (elle aussi en fin de vie) et la Kangoo. Le coréen Hyundai a également réagi avec la Kona électrique fabriquée en République tchèque. Tous cherchent à profiter de ce coup de pouce de l’État pour leurs voitures électriques, alors que les commandes sont actuellement peu nombreuses.
“Nous discutons avec les concessionnaires. Nous sommes en train de consolider ces disponibilités”, a souligné Christophe Béchu, rappelant que le nombre initial de 25 000 locations avait été fixé “en fonction de la disponibilité des véhicules”, qui a depuis évolué. Mais alors que Christophe Béchu est enthousiaste, Bercy calme les esprits. Le budget dédié au soutien à l’achat de véhicules électriques – comprenant le bonus écologique (accessible avec ou sans condition de revenus), le leasing social, l’aide à l’acquisition d’un deux-roues électrique, etc. – ne dépassera pas 1,5 milliard d’euros, rappelle Bercy. Si le nombre de bénéficiaires du leasing social augmente, cela se fera au détriment du bonus écologique. Et il se pourrait que les clients de deux-roues soient exclus pour respecter cette limite budgétaire. Ces ajustements budgétaires seront examinés de près dans les prochains jours. Les résultats de cet équilibre subtil seront annoncés la semaine prochaine.