Lorsqu’il s’agit de SARS-CoV-2, les mutations du virus suscitent de vives inquiétudes quant à leur impact sur la transmission et la pathogénicité. La capacité du virus à évoluer rapidement est remarquable, avec une fréquence de mutation d’environ 8 × 10-4 nucléotides/génome par an, ce qui est très élevé même pour un virus à ARN. Cependant, les coronavirus possèdent une exonucléase qui réduit leur taux d’erreur de réplication in vitro d’environ 15 à 20 fois, ce qui entraîne un taux de mutation viral in vivo environ 10 fois plus faible que celui de la grippe. Selon une étude menée de décembre 2019 à octobre 2020, le virus SARS-CoV-2 a acquis environ deux mutations par mois au sein de la population mondiale.
Les principales préoccupations liées aux variants résident dans leur capacité potentielle à échapper à la neutralisation des anticorps et à réduire l’efficacité des vaccins. Les variants qui se sont répandus et ont montré une plus grande transmissibilité, une plus grande gravité des symptômes et/ou une réduction de la neutralisation par les anticorps ont été classés comme des variants préoccupants (VOCs) par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Le premier signe d’une pression de sélection génétique évolutive sur le SARS-CoV-2 est apparu lorsque, début 2020, une nouvelle variante du virus contenant la mutation “D614G” est apparue et a rapidement atteint une prévalence d’environ 100% en juin 2020.
Après l’apparition de la mutation D614G, une augmentation de la fréquence d’une substitution d’acide aminé, “N439K”, a été observée en Écosse en mars 2020, au sein du motif de liaison au récepteur. Alors que cette première lignée contenant N439K (appelée B.1.141) a rapidement été remplacée, une autre lignée (B.1.258) qui avait acquis indépendamment N439K s’est également propagée. Jusqu’à fin 2020 et début 2021, plusieurs variants avec des mutations récurrentes (en plus de D614G) ont été signalés, principalement situés dans la protéine Spike.
La mutation N439K entraîne une augmentation de l’affinité de liaison avec le récepteur ACE2 et réduit l’activité neutralisante de certains anticorps monoclonaux et polyclonaux. Une autre mutation d’acide aminé dans le RBD, “Y453F”, qui est associée à une affinité de liaison accrue avec ACE2, a suscité une attention considérable après sa découverte, en particulier une lignée identifiée au Danemark, initialement appelée “Cluster 5” (maintenant B.1.1.298).
La lignée B.1.1.298 présente également une délétion “Δ69-70” dans le domaine aminoterminal (NTD), qui perturbe partiellement les tests de RT-PCR et entrave l’infectiosité virale, conduisant à une évasion immunitaire chez les patients immunodéprimés.
La délétion “Y144/145del” altère apparemment la forme de la protéine Spike, lui permettant d’échapper à certains anticorps.
La mutation “P681H” est située juste à côté du site de clivage de la furine, ce qui suggère un possible rôle dans le traitement de la protéine Spike.
La mutation “E484K” (présente dans les variants Beta et Gamma) semble avoir un impact sur la réponse immunitaire et peut potentiellement réduire l’efficacité des vaccins, car elle est associée à une affinité accrue de liaison avec le ACE2 humain et peut empêcher la reconnaissance du virus par les anticorps.
La mutation “N501Y” (présente dans les variants Alpha, Beta et Gamma) augmente l’affinité de la protéine Spike avec ACE2 via une liaison par pont hydrogène avec ACE2 Y41, et augmente la réplication virale dans les cellules humaines des voies respiratoires supérieures. Cependant, N501Y n’affecte pas la liaison et la neutralisation de la plupart des anticorps monoclonaux.
La mutation “K417N” (présente dans les variants Beta et Gamma) ne contribue pas à la liaison avec ACE2, mais, tout comme E484K, elle est un épitope clé pour la liaison des anticorps neutralisants, ce qui permet d’échapper à la réponse humorale.
La mutation “L452R” (présente dans le variant Delta) a montré en laboratoire une plus grande affinité du virus muté pour le récepteur ACE2 et une infectiosité accrue. Des données expérimentales en laboratoire suggèrent également que cette mutation entraîne une modification des propriétés antigéniques.
En conclusion, les mutations du Spike-Protein de SARS-CoV-2 peuvent avoir des effets significatifs sur la transmission du virus, la gravité des symptômes et l’efficacité des vaccins. Il est essentiel de surveiller ces mutations de près afin de mieux comprendre leur impact sur la santé publique et d’adapter en conséquence les mesures de prévention et de contrôle.