Par Jean-Pierre Riou, chroniqueur indépendant sur l’énergie, membre du bureau énergie du Collectif Science Technologies Actions.
Une première mondiale par l’AIE
L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE), en collaboration avec la Nuclear Energy Agency (NEA), vient de publier une étude révolutionnaire sur le coût de production d’électricité. Cette étude inclut des informations sur les coûts des technologies de stockage, des piles à combustible et l’exploitation à long terme des centrales nucléaires. Elle est également accompagnée d’un calculateur en ligne du coût actualisé du courant produit, qui permet d’analyser l’impact de diverses variables.
Cette étude fournit des données détaillées sur les coûts de construction de 243 centrales électriques de différentes technologies qui seront mises en service d’ici 2025 dans 24 pays. Elle met en évidence l’importance du taux de charge des installations.
Un regard sévère sur le débat public français
L’AIE consacre une section entière à l’évaluation du débat public en France sur la révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Elle souligne le caractère essentiellement politique du débat entre le nucléaire et les énergies renouvelables, qui n’a pas pris en compte la dimension européenne du système électrique. L’absence d’analyses économiques détaillées a empêché le public de comprendre les avantages et les inconvénients des différentes options proposées. De plus, le débat français a négligé la problématique des émissions de CO2, malgré le fait que le secteur de l’électricité soit déjà décarboné à 93%.
La prolongation des réacteurs, production la plus économique
L’étude révèle que la prolongation des réacteurs nucléaires est l’option la moins chère, avec un coût de production de 30,7 dollars par mégawattheure (MWh). En comparaison, le photovoltaïque coûte 33,94 dollars par MWh, l’éolien terrestre 56,08 dollars par MWh, et l’éolien offshore 89,82 dollars par MWh. Les projets de 3ème génération nucléaire français (1650 MW) ont un coût de production de 71,10 dollars par MWh, contre 42,02 dollars par MWh pour la 3ème génération nucléaire russe (1122 MW). Le charbon n’est plus compétitif, avec un coût compris entre 70,54 dollars (Inde) et 146,49 dollars (États-Unis) par MWh.
L’AIE, un auteur chaudement recommandé
L’AIE est vivement recommandée pour ses analyses sur la sécurité énergétique et son expertise mondiale. Ses recommandations sont essentielles pour renforcer la coopération politique en matière de sécurité énergétique. Il est important de mieux faire connaître les analyses de l’AIE, car les groupes financiers qui bénéficient des subventions aux énergies renouvelables ont intérêt à entretenir des idées fausses sur la sécurité des énergies intermittentes.
La cannibalisation des énergies renouvelables
L’étude soulève la question de la cannibalisation des énergies renouvelables, c’est-à-dire le fait qu’elles réduisent leur propre valeur lorsque les conditions météorologiques leur sont favorables. Cela pose un problème dans un marché de l’électricité libéralisé, où les énergies renouvelables bénéficient de compléments de rémunération alors que la présence de centrales pilotables reste nécessaire. De plus, les directives européennes interdisent les aides d’État.
Le temps des questions
Il est temps de remettre en question le dogme de la transition énergétique et d’adopter une politique énergétique efficace et durable à long terme. Il est primordial de prendre en compte le contexte européen et l’importance du nucléaire en tant que plus grand exportateur mondial. Il est également crucial de ne pas se focaliser uniquement sur les énergies renouvelables intermittentes et de se demander quels sont les avantages réels de cette transition.
Sources:
- Calculateur du coût actualisé de l’électricité de l’AIE
- Étude de l’AIE sur les coûts de production d’électricité
- Carence climatique de l’État : quatre ONG saisissent la justice
- Mise en garde de l’Otan sur les menaces “hybrides”
- Sécurité d’approvisionnement électrique en Europe
- RTE incite les Français à réduire leur consommation d’électricité
- VGE : un modèle pour l’économie de l’Europe et un changement de paradigme