L’écriture inclusive, une pratique controversée
L’écriture inclusive, qu’est-ce que cela signifie réellement et pourquoi suscite-t-elle autant de débats ? Depuis quelques années, cette méthode d’écriture fait couler beaucoup d’encre et divise les opinions en France. Voyons de plus près ce qu’est l’écriture inclusive et pourquoi elle fait tant parler d’elle.
Qu’est-ce que l’écriture inclusive ?
En mars 2017, l’éditeur Hatier a publié un manuel destiné aux élèves de CE2, utilisant une nouvelle méthode d’écriture qui consiste à féminiser les mots en ajoutant, entre des points médians, la terminaison féminine. Ainsi, dans cet ouvrage scolaire, les métiers exercés par les hommes et les femmes sont orthographiés de la manière suivante : “agriculteur·rice·s”, “artisan·e·s”, “commerçant·e·s”. L’objectif est de mettre fin à la prédominance du masculin sur le féminin au pluriel, et de garantir l’égalité entre les deux sexes. Hatier défend cette démarche en affirmant que les manuels scolaires reflètent la société et ses évolutions. Selon eux, l’inclusion des femmes dans le langage est une responsabilité qui contribue aux valeurs de la République.
Les principes de l’écriture inclusive
L’écriture inclusive repose sur trois principes principaux :
- Accorder les grades/fonctions/métiers/titres selon le genre. Ainsi, on écrira “une autrice”, “une pompière”, “une maire”.
- Au pluriel, le masculin ne prédomine plus sur le féminin, mais inclut les deux sexes grâce à l’utilisation du point médian. Par exemple, on écrira “les électeur·rice·s”, “les citoyen·ne·s” ou encore “les maçonnes et les maçons”.
- Éviter d’utiliser les termes “homme” et “femme” au profit de termes plus universels comme “les droits humains” (au lieu de “les droits de l’homme”).
Ceux qui défendent l’écriture inclusive
Depuis 2015, le Haut Conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes défend l’écriture inclusive et a publié un guide intitulé “Pour une communication publique sans stéréotype de sexe”. Selon cet organisme, il est important d’accorder les noms de métiers, titres et grades en fonction du sexe des personnes qui les occupent afin de ne pas invisibiliser les femmes. Eliane Viennot, professeure de littérature à l’université et auteure de “Non le masculin ne l’emporte pas sur le féminin”, soutient également cette pratique. Elle affirme que le langage structure notre pensée et que le fait d’expliquer aux enfants que “le masculin l’emporte sur le féminin” ne peut pas favoriser la construction d’une société égalitaire. Selon elle, le langage inclusif permet de prendre en compte toutes les personnes appartenant à un groupe, quel que soit leur genre.
Ceux qui sont contre l’écriture inclusive
Cependant, cette nouvelle approche de l’orthographe ne fait pas l’unanimité parmi les défenseurs de la langue française “traditionnelle”. Sur le plan politique, l’écriture inclusive compte de nombreux détracteurs. Une circulaire datant de 2017, rédigée par l’ancien Premier ministre Édouard Philippe, “invite” les ministres à ne pas utiliser l’écriture inclusive dans les textes destinés à être publiés au Journal officiel de la République française. Une proposition de loi débattue en octobre 2023, portée par la droite, envisage même d’interdire l’écriture inclusive dans tous les cas où le législateur et le pouvoir règlementaire exigent un document en français. Cette interdiction concernerait une large gamme de documents tels que les modes d’emploi, les contrats de travail, les règlements intérieurs d’entreprises, ainsi que les actes juridiques. Les sénateurs demandent également l’interdiction des néologismes grammaticaux tels que “iel” (une contraction de “il” et “elle”) et “celleux” (contraction de “celles” et “ceux”). Cette proposition de loi prévoit également d’inscrire l’interdiction de l’écriture inclusive dans le code de l’éducation. Par ailleurs, l’Académie française qualifie cette pratique de “péril mortel” pour la langue française. Le chef de l’État Emmanuel Macron lui-même a récemment critiqué l’écriture inclusive, affirmant qu’il n’était pas nécessaire d’ajouter des points ou des tirets aux mots pour rendre la langue lisible.
Et ailleurs ? Le cas du Québec
Au Québec, l’écriture inclusive a été adoptée. Elle est considérée comme une pratique visant à promouvoir l’égalité entre les genres. Cependant, il est important de souligner que chaque pays adopte sa propre position vis-à-vis de l’écriture inclusive, et que les débats autour de cette pratique sont encore loin d’être clos.
En conclusion, l’écriture inclusive reste un sujet de débat brûlant en France. Si certains la défendent en tant qu’outil de lutte contre les inégalités de genre, d’autres la rejettent, la considérant comme une atteinte à la langue française traditionnelle. Le débat se poursuit, et il est intéressant de suivre les évolutions de cette pratique tant controversée.