Devant la simplicité apparente de leur mécanique compacte et alimentée en électrons, de nombreux consommateurs ont tendance à penser que les véhicules électriques nécessitent peu ou pas d’entretien. Mais la réalité est bien plus nuancée. Pierre Henry, formateur à l’Atelier branché, un centre de formation mécanique spécialisé dans les véhicules électriques basé à Saint-Hubert, nous aide à y voir plus clair.
Les freins
Un problème courant associé aux freins des voitures électriques résulte de leur utilisation réduite. La conduite à pédale unique, très appréciée par de nombreux propriétaires de véhicules électriques, permet de récupérer de l’énergie pendant le freinage et de ralentir le véhicule sans utiliser la pédale de frein. Cependant, cela entraîne une sous-utilisation du système de freinage. “La rouille s’accumule souvent dans les freins”, avertit M. Henry. Il recommande donc un entretien annuel des étriers pour éviter qu’ils se grippent, ainsi qu’un changement périodique du liquide de frein, qui peut se contaminer avec le temps.
Le système de refroidissement et le boîtier de réduction
Le système de refroidissement est un autre élément crucial à ne pas négliger sur un véhicule électrique. Il joue un rôle essentiel dans la régulation thermique de la batterie et, par conséquent, dans ses performances. Il est beaucoup plus complexe que celui d’une voiture à essence traditionnelle. “Sur une Chevrolet Bolt, par exemple, il y a trois systèmes de refroidissement à entretenir”, explique M. Henry. Il est donc nécessaire de faire inspecter régulièrement ces systèmes de manière préventive. Il est également important de remplacer le liquide de refroidissement conformément aux recommandations du constructeur pour préserver ses propriétés et éviter toute acidité ou alcalinité. M. Henry fait remarquer que le coût élevé de ce liquide, en particulier chez Hyundai et Kia, devrait diminuer grâce à une offre plus diversifiée sur le marché secondaire.
La climatisation joue également un rôle important dans le refroidissement de la batterie et de l’habitacle. Il est donc essentiel de surveiller son bon fonctionnement et de faire vérifier régulièrement ses composants. Par exemple, les véhicules Tesla nécessitent le remplacement d’un sachet déshydratant tous les deux à six ans, selon le modèle.
Un autre point d’entretien à noter est que certains véhicules électriques doivent faire une vidange d’huile, un aspect souvent négligé par certains propriétaires mal informés. Par exemple, le boîtier de réduction de la Ford F-150 Lightning et de la Tesla est lubrifié par de l’huile et dispose d’un filtre à huile. “Cette huile peut se détériorer considérablement”, explique M. Henry, et le filtre peut se corroder s’il n’est pas remplacé périodiquement. Les intervalles de remplacement sont beaucoup plus espacés que pour les véhicules à essence, mais il est important de le remplacer régulièrement pour assurer une bonne lubrification de ces engrenages essentiels.
Batterie, suspension et pneus
Tout comme les voitures à moteur thermique, les voitures électriques sont équipées d’une batterie de 12 V qui alimente l’électronique de bord. M. Henry recommande aux propriétaires de véhicules électriques de faire tester régulièrement la charge de cette batterie, car les signes de faiblesse ne sont pas aussi évidents que sur une voiture à essence qui peine à démarrer dans de telles situations.
En raison de leur batterie, les véhicules électriques sont particulièrement lourds, ce qui exerce une pression importante sur les pièces de suspension et de direction, un phénomène accentué par l’état déplorable de nos routes. Le mécanicien recommande donc de faire inspecter ces composants, ainsi que la batterie et les freins, au moins deux fois par an pour avoir l’esprit tranquille.
En raison du couple élevé des moteurs électriques, les pneus peuvent également s’user rapidement si le conducteur est un peu trop enthousiaste. Il est donc important de prendre en compte cette variable dans le budget d’entretien. Cependant, M. Henry affirme que si la conduite est douce, l’usure prématurée de la bande de roulement peut être évitée.
Enfin, le formateur estime qu’il est nécessaire d’appliquer un bon traitement antirouille pour préserver l’état du véhicule, malgré ce que peuvent dire les constructeurs. Il souligne même que les bons ateliers peuvent aller jusqu’à déboulonner la batterie haute tension pour effectuer ce traitement.
La batterie haute tension pose-t-elle réellement problème ?
La batterie haute tension, qui est essentielle au bon fonctionnement d’un véhicule électrique, suscite souvent des inquiétudes en raison de son coût élevé de remplacement. Cependant, Pierre Henry se veut rassurant quant à sa durée de vie. “C’est impressionnant de voir à quel point les batteries ne s’usent pas”, déclare-t-il avec enthousiasme. Il précise que seules les Nissan Leaf peuvent subir une dégradation plus rapide en raison de leur système de refroidissement à air, un problème d’autant plus marqué si le véhicule a passé la majeure partie de son temps dans un climat chaud.
M. Henry ne constate aucune usure prématurée des batteries liée aux recharges rapides et estime que c’est un faux débat. Il affirme qu’une batterie normale perd en moyenne “2 à 3 %” de sa capacité de charge par an, mais souligne qu’elle “dure souvent toute la vie de la voiture”. Il mentionne également les garanties généreuses offertes par de nombreux constructeurs pour appuyer cette affirmation.
En conclusion, il est essentiel de se renseigner et de suivre les recommandations des spécialistes spécifiques à votre modèle de véhicule électrique pour prolonger sa durée de vie. Bien que la transition vers la mobilité électrique présente de nombreux avantages, elle nécessite un entretien rigoureux pour profiter en toute quiétude de ces kilomètres silencieux.
