Les Bookmakers : Une Plongée dans le Monde des Paris Sportifs

C'est quoi un bookmaker ?

Vous avez certainement entendu parler des bookmakers depuis la création de l’ARJEL en 2010. Mais savez-vous que ces parieurs étaient là bien avant la régulation des jeux d’argent en ligne ? Pour mieux comprendre qui sont les bookmakers, jetons un coup d’œil dans le passé.

Les jeux d’argent dans l’histoire

Les paris sportifs font partie intégrante de l’univers du jeu. Ils existent depuis aussi longtemps que l’argent lui-même. Si certains historiens rapportent que les Grecs aimaient parier sur les combats de coqs, l’histoire retient surtout l’amour des Romains pour les paris sur les combats de gladiateurs. Dès l’arrivée des combats de gladiateurs sous l’empereur Vespasien, les Romains ont voué un véritable culte aux jeux d’argent, allant jusqu’à prier la déesse Fortuna pour avoir de la chance dans leurs paris. Ces paris étaient très prisés, car non taxés par Rome contrairement à la plupart des revenus de l’époque.

Les parieurs avaient même droit à un programme détaillé sur les combats, le “Munerarius libellus”, qui comportait les caractéristiques des combattants, leur historique de victoires et de défaites, ainsi que des informations sur leur domination (droitier ou gaucher). On peut dire qu’ils étaient des turfistes avant l’heure !

“Bookmaker” : définition et étymologie

Mais que signifie réellement le terme “bookmaker” et d’où vient-il ? Ce mot anglais trouve son origine au milieu du XIXe siècle, dans le monde des courses hippiques. D’après une définition rapportée par un vétérinaire français, Jean Déhès, le bookmaker est une personne dont le métier est de prendre des paris à cote fixe pour une course de cheval, et qui les enregistre dans un livre.

Harry Ogden : le premier bookmaker de l’histoire

Selon de nombreux médias anglais, le tout premier bookmaker à avoir pignon sur rue s’appelait Harry Ogden. Ce bookie du Lancashire, qui officiait sur l’hippodrome de Newmarket Heath dans les années 1790, aurait été le premier à proposer des cotes différentes pour chaque cheval. En étudiant le profil et la forme de chaque cheval, il fixait des cotes qui représentaient la probabilité de succès de chaque cheval de course.

Certains parieurs pouvaient alors jouer la sécurité en pariant sur les favoris, tandis que d’autres tentaient leur chance avec les outsiders pour espérer empocher une belle somme.

Dessin de 1870 sur les parieurs hippiques
Dessin de 1870 paru dans le journal anglais “Harpers Weekly” et intitulé “Betting on the favorite” (Source : Wikipédia)

En France, il a fallu attendre 1891 pour voir naître le premier bookmaker légal et officiel. À cette époque, les paris à cote fixe proposées par les bookmakers clandestins étaient interdits. C’est alors qu’un brillant émigré espagnol du nom de Joseph Oller eut une idée révolutionnaire : mutualiser les sommes jouées afin que les parieurs jouent les uns contre les autres. Fini les cotes arbitraires ! L’organisateur des paris se rémunérait uniquement grâce à une marge fixée à l’avance. C’est ainsi qu’est né le Pari Mutuel Urbain ou PMU !

Les premiers bookmakers anglais

En Angleterre, les premiers bookmakers à avoir vu le jour s’appellent Ladbrokes et William Hill. Ce sont les plus anciens bookmakers en Angleterre, des sociétés qui existent encore de nos jours et qui brassent des milliards.

Pendant longtemps, les paris hippiques étaient strictement interdits au Royaume-Uni. Cependant, le parlement anglais a autorisé ces paris par le biais du Gaming Act de 1845. Bien que cette activité soit strictement encadrée, les paris illégaux fleurissaient partout. À l’instar des fameux Peaky Blinders, de nombreux bookmakers illégaux faisaient des affaires florissantes, tels que Bella Thomasson, bénéficiant même des faveurs des autorités locales.

Ladbrokes a été la première grande entreprise spécialisée dans les jeux d’argent. Fondée en 1886 par deux agents de courses, elle comptait en 2016 plus de 16 000 employés à travers le monde.

William Hill, du nom de son fondateur, a quant à lui ouvert la première agence de paris hippiques à Londres en 1934. Vingt ans plus tard, William Hill est devenu le premier groupe spécialisé dans les paris sportifs à être coté en bourse.

Les années 2000 : la bulle Internet et les sites de paris en ligne

Depuis la fin des années 2000, de nouveaux types de bookmakers ont prospéré aux quatre coins du monde : les sites de paris sportifs en ligne. Contrairement aux opérateurs anglais qui disposaient d’un réseau physique de boutiques, ces sites étaient entièrement en ligne.

Grâce aux premières licences délivrées par des États tels que l’Antigua et les Barbades, les premiers sites de paris en ligne ont vu le jour dans les années 1990. Deux géants des paris en ligne sont nés la même année en 1997 : BetandWin (aujourd’hui Bwin) et Unibet.

Aperçu du site Betandwin (aujourd'hui Bwin) lancé en 1999
Aperçu du site Betandwin (aujourd’hui Bwin) lancé en 1999

Ces sites, à l’image de Bwin, ont connu une ascension fulgurante. Comment ne pas résister à l’appel de plus de 8 000 paris par jour proposés sur une quarantaine de disciplines sportives ? Du football au tennis, en passant par le basket-ball, le ski, les fléchettes et même le water-polo, les possibilités étaient infinies, 24 heures sur 24.

En 2006, près de 3,3 millions d’Européens avaient déjà succombé aux paris en ligne, dont une majorité venait du Royaume-Uni. Bwin pesait alors 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires et commençait à s’afficher sur les maillots des joueurs de football.

En résumé, la folie des bookmakers en ligne s’est emparée de l’Europe, et l’Union européenne ne voyait pas cela d’un mauvais œil !

2010 : création de l’ARJEL

Le succès de tous ces bookmakers représentait une véritable menace pour les monopoles nationaux sur les paris sportifs et hippiques, détenus par le PMU et la Française des Jeux.

Après une décennie d’incertitudes juridiques, au cours de laquelle la France a tenté de faire interdire les opérations des bookmakers étrangers sur son sol, elle a finalement dû ouvrir son marché. Une jurisprudence de la Cour européenne de justice a même déclaré que tous les acteurs des paris sportifs, qu’ils soient publics ou privés, nationaux ou étrangers, devaient bénéficier du même cadre juridique.

Ainsi, un an avant la Coupe du Monde de 2010, Eric Woerth, alors Ministre du Budget, a présenté son projet de loi pour une ouverture maîtrisée du marché des paris sportifs en ligne. Ce projet a notamment conduit à la création de l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL), une autorité administrative indépendante.

Les principales missions de l’ARJEL comprennent la protection des mineurs, la lutte contre les sites illégaux et l’addiction aux jeux d’argent, ainsi que la délivrance des agréments permettant aux opérateurs de jeux de travailler en toute légalité. Les bookmakers ARJEL étaient nés !

En juin 2020, l’ARJEL est devenue l’ANJ, l’Autorité Nationale des Jeux. Outre les casinos, l’ANJ contrôle et régule l’ensemble des jeux d’argent en France, y compris les courses hippiques (PMU), les jeux de grattage, les loteries, les paris sportifs et le poker.

Le monde des bookmakers a connu de nombreux rebondissements au fil de l’histoire. Aujourd’hui, ces parieurs continuent de susciter l’engouement des amateurs de paris sportifs et de jeux d’argent.