Les défis de la recharge d’une voiture électrique en lieu public

Les limites de la recharge d’une voiture électrique en lieu public

J’ai relevé un défi risqué avec ma voiture électrique : parcourir 200 km, soit un aller-retour Strasbourg-Mulhouse, en comptant sur une recharge rapide dans un supermarché Cora. Voici comment cela s’est déroulé…

Des places limitées pour la recharge

Je voulais rendre visite à mes parents à Mulhouse, déjeuner avec eux puis repartir le soir vers Strasbourg. Pour cela, j’ai pris le risque – en toute connaissance de cause – de compter sur la recharge disponible au supermarché Cora de Wittenheim. En gros, si la recharge à Cora était impossible, je ne pourrais pas rentrer chez moi le soir-même…

Le trajet s’est bien déroulé, j’ai pris l’autoroute et j’ai maintenu une vitesse constante de 95 km/h tout au long du trajet (100 km). Au-delà, je sais que je n’arriverai pas à destination (du moins, je ne prends pas ce risque), car l’autonomie diminue très rapidement lorsque l’on roule “vite”. Prévu pour 19h, je me suis arrangé pour arriver à Cora Wittenheim vers 18h, où je savais qu’un chargeur rapide installé par Nissan, Cora et la Région Alsace m’attendait.

En arrivant, j’ai eu quelques sueurs froides : les deux places réservées aux véhicules électriques étaient occupées par une C-ZERO et une iOn ! Je précise que nous étions un samedi soir, donc un moment de grande affluence. Il faut également savoir que c’était la seule borne de recharge “publique” du côté de Mulhouse.

Seule la C-ZERO était en train de se charger sur la prise CHADEMO. L’autre voiture ne se rechargeait pas, probablement car elle ne disposait pas du câble nécessaire pour la prise de Type 2. Au passage, je n’ai jamais vu personne se recharger sur ces prises de type 2 dans la région…

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J’étais donc bloqué, je ne pouvais pas me recharger tant que ces voitures étaient stationnées là. À ce moment-là, je me suis rendu compte qu’il était absolument nécessaire d’intégrer un système de contact entre membres sur ChargeMap. En effet, cela aurait été tellement pratique de pouvoir contacter l’un des propriétaires de ces voitures électriques pour lui demander de déplacer son véhicule. Apparemment, la recharge n’était peut-être pas aussi vitale pour eux que pour moi !

Une attente sous la pluie

Étant donné qu’il pleuvait, je me suis résigné à m’abriter à l’intérieur du magasin. Par chance, l’entrée en verre me permettait de garder un œil sur la voiture… J’ai donc patienté une petite demi-heure, passant différents appels téléphoniques en attendant que la place se libère.

La nuit commençant à tomber, il n’était pas non plus évident de voir si la place était libre. Pendant que j’attendais, un petit espoir est apparu : une C-ZERO blanche circulait dans une allée ! Pourtant, les deux autres voitures identiques étaient toujours sur les places réservées… “C’est comme ça en Alsace !” me suis-je dit, à la fois fier de voir tous ces véhicules électriques et en même temps, il faut l’avouer, un peu embêté !

Je suis donc allé trouver le conducteur de la C-ZERO qui venait de se garer pour utiliser la prise CHADEMO tant convoitée. Je lui ai demandé s’il pouvait déplacer la voiture en lui expliquant que j’avais besoin de me recharger. Il m’a sympathiquement laissé la place, certainement en se demandant qui était ce gars assez fou pour faire l’aller-retour Strasbourg-Mulhouse dans la journée avec une voiture électrique…

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Soulagé, j’ai lancé la recharge et je suis allé faire quelques courses et prendre un café. À force, je commence à bien connaître les centres commerciaux Cora de la région ! Au bout d’une quarantaine de minutes, je suis retourné vérifier l’état de ma recharge : elle s’était arrêtée à 80% (c’est le cycle normal de la borne). Il aurait été plus pratique d’avoir une charge à 100%…

J’ai donc essayé d’ajuster le niveau de charge à 100% : impossible. En même temps, pressé, je n’ai pas cherché trop longtemps à comprendre : il pleuvait, il faisait froid et j’étais en retard. J’ai rapidement calculé que si je restais quelques heures chez mes parents, je pourrais recharger presque entièrement ma batterie sur leur prise domestique.

Le compteur de la Nissan LEAF

C’est donc ce que j’ai fait, j’ai utilisé le câble fourni avec ma LEAF pour me recharger sur la prise installée par mon père dans la cour. À 22h00, j’ai voulu repartir, mais il m’a fallu encore une demi-heure pour que la charge soit terminée.

J’ai effectué le trajet du retour sans encombres, même si rouler à une allure modérée sur l’autoroute le soir n’est pas non plus idéal ! En journée, j’aurais pu choisir de rouler plus rapidement et de faire une autre recharge rapide à Cora Colmar (sur le chemin entre Strasbourg et Mulhouse). Mais voilà, les bornes des supermarchés ne sont pas accessibles la nuit et le dimanche…

Conclusion

Cette expérience m’a permis de confirmer ce que je savais déjà : les bornes de recharge ont un intérêt limité si elles ne permettent pas de connaître leur disponibilité en temps réel et si l’on ne peut pas réserver sa place à l’avance. On parle souvent du problème du modèle économique des bornes de recharge : dans ce cas-là, j’aurais été prêt à payer jusqu’à une dizaine d’euros pour pouvoir réserver ma place et être certain d’avoir une recharge…

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Autre point : il est primordial que les infrastructures de recharge (en particulier les rapides) soient accessibles 24h/24 ! Je sais que cela ne rapporte rien aux commerces, mais c’est très important pour les utilisateurs. Encore une fois, il ne me semble pas aberrant de faire payer la recharge dans ces cas-là.

Après, les propriétaires de voitures électriques pourraient dire qu’ils préfèrent que la recharge reste gratuite. Pour ma part, je suis convaincu que ce n’est qu’en faisant payer la recharge que nous développerons un réseau de bornes qui soit réellement utile. Pour l’instant, les bornes gratuites proposent un service minimum (et nous sommes déjà contents de les avoir), mais elles ne fournissent qu’une “recharge de complaisance” : on s’y recharge quand on a la chance d’en trouver une de libre, mais on ne peut pas vraiment compter dessus lorsque nous en avons réellement besoin.

Je ne pense pas que “Monsieur-tout-le-monde” soit prêt à patienter comme je l’ai fait pour une recharge… même si, avec cette expérience, je suis sorti du cadre d’utilisation classique d’une voiture électrique, il faut le reconnaître !