Les dessous de la sortie pédagogique annulée à Calais sous la pression de l’extrême droite

Les dessous de la sortie pédagogique annulée à Calais sous la pression de l’extrême droite

Des pressions de l’extrême droite ont réussi à annuler une simple sortie scolaire. À Valenciennes, une professeure en classe préparatoire littéraire au lycée Watteau avait entamé dès juin 2021 l’organisation d’une excursion à Calais avec ses étudiants près d’un camp de migrants. Prévu pour le 2 décembre 2022, l’événement a finalement été annulé à la dernière minute. La raison en est une levée de boucliers et des menaces de militants d’extrême droite sur les réseaux sociaux, comme le rapporte la Voix du Nord mercredi.

Menaces et diffamation

Une initiative qui n’a pas échappé à l’extrême droite. Le 28 novembre, le réseau “Parents vigilants” – proche du parti Reconquête! dirigé par l’ancien candidat à la présidentielle Eric Zemmour – a diffusé les détails du programme de cette journée sur le site “Protégeons nos enfants”. À quelques jours seulement de la date prévue, les pressions de l’extrême droite se sont multipliées.

Toujours avec les mêmes méthodes virulentes, les militants se sont emparés du sujet, faisant monter la polémique. Le délégué départemental de Reconquête !, Simon Flahaut, a rapidement critiqué sur Twitter le “combat idéologique” de l’enseignante. Un communiqué de la délégation locale du parti a également suivi, dans lequel les délégués locaux qualifient la professeure de “militante pro-immigration” qui “impose son idéologie avec une sortie scolaire auprès des migrants de Calais”. Eric Zemmour lui-même s’est exprimé sur Twitter, estimant que les étudiants sont “instrumentalisés par leur professeur”.

Du côté du Rassemblement national, des élus des Hauts-de-France n’ont pas hésité à adopter un discours similaire à celui de Reconquête !, avec des messages évoquant une “propagande pour l’immigration”. Sur le plateau de Public Sénat, le député RN Sébastien Chenu insiste : pour lui, la professeure aurait agi “en militante et pas en éducatrice”.

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Cette avalanche de réactions a même mené à “diverses menaces personnelles” à l’encontre de l’enseignante, qui a été “largement diffamée”, déplore le rectorat.

Dépôt de plainte

Face à ces “réactions violentes”, le rectorat a annoncé dans un communiqué avoir pris la décision, en collaboration avec l’établissement Watteau, d’annuler cette activité éducative et pédagogique, car les conditions de sécurité n’étaient pas réunies. Suite à ces événements, la rectrice a accordé à l’enseignante le “bénéfice de la protection juridique du fonctionnaire” et a déclaré qu’elle “condamnait fermement les menaces portées à son égard et portait plainte”. Selon la Voix du Nord, la professeure a également annoncé qu’elle saisirait la justice.

En réaction, le Parti Socialiste et les écologistes critiquent vigoureusement le parti Reconquête sur les réseaux sociaux. “Cette histoire est édifiante. Le parti de Zemmour utilise les mêmes méthodes et intimidations que les islamistes radicaux pour faire pression sur les enseignants”, dénonce le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, sur Twitter, y voyant une “légitimation de la violence” qui a abouti à l’assassinat de Samuel Paty il y a deux ans.

De son côté, le député écologiste Benjamin Lucas a demandé dans un communiqué “la dissolution du mouvement” de Zemmour, dénonçant les “mêmes procédés terrorisants que les islamistes, en faisant déferler menaces et injures”. Il appelle le gouvernement à “protéger les personnels éducatifs, les élèves et la communauté scolaire”.