Les experts automobiles secoués par un nouveau scandale: les épaves roulantes

Les experts automobiles secoués par un nouveau scandale: les épaves roulantes

Des centaines de voitures accidentées réparées à la va-vite et remises en circulation par un professionnel peu regardant : après une première affaire et une arnaque mortelle, la profession d’experts automobiles est à nouveau secouée par un scandale d’épaves roulantes.

Des réparations douteuses

Début avril, 1 030 conducteurs ont reçu un courrier de la délégation interministérielle à la Sécurité routière, les invitant à faire expertiser d’urgence leur véhicule. En effet, des doutes sérieux existent quant à la qualité des réparations effectuées, rendant leur véhicule potentiellement dangereux, selon la lettre consultée par l’AFP.

Tous les véhicules concernés ont été autorisés à reprendre la route par un seul et même expert automobile de 37 ans, faisant l’objet d’une enquête préliminaire du parquet d’Évry (Essonne) et d’une interdiction administrative d’exercer. Bien qu’il travaillait dans le Val-de-Marne, ses actions néfastes se sont répercutées dans toute la France.

Les automobilistes ont jusqu’au 30 juin pour faire examiner leur véhicule, sous peine d’interdiction de rouler. À fin mai, 180 expertises avaient été réalisées, dont plus d’un tiers des véhicules (66) ont été classés comme “dangereux” et impropres à la circulation par la Confédération française des experts en automobile (CFEA).

Dans la liste des anomalies découvertes lors des expertises, on retrouve des absences ou des non-conformités d’airbags, des trains roulants mal réglés entraînant une tenue de route aléatoire, ainsi que des soudures incorrectes sur des éléments de sécurité.

Des victimes impuissantes

Une des victimes, Sylvie Thirion, enseignante-chercheuse à l’université d’Aix-Marseille (Bouches-du-Rhône), pensait se faire plaisir en achetant une Twingo d’occasion avec un toit ouvrant. Deux mois après son acquisition, elle se retrouve dans l’incapacité de conduire son véhicule. L’expertise demandée par l’État a révélé que sa voiture est bonne pour la casse.

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La Twingo avait été accidentée au printemps 2016, puis remise sur le marché après un simple “maquillage”. Sylvie Thirion s’indigne : “La faire réparer correctement me coûterait 7 000 euros, autant que je l’ai achetée”, et se sent “désespérée”.

Des précédents inquiétants

Ce n’est pas la première fois que la profession d’experts automobiles est touchée par un scandale. En 2015, le ministère de l’Intérieur avait rappelé 5 000 véhicules remis frauduleusement en circulation par trois experts du Val d’Oise, qui sont actuellement mis en examen. Parmi ces véhicules, 1 100 étaient considérés comme des épaves roulantes “dangereuses” et 1 600 ont été déclarés interdits de rouler faute de réponse des propriétaires.

Dans une autre affaire, un expert de la région parisienne avait été condamné en décembre pour homicide involontaire à quatre ans de prison, dont deux fermes. La Clio qu’il avait remise en circulation à la va-vite avait causé la mort d’un jeune homme de 22 ans en Essonne.

Un système frauduleux

Le mode opératoire de cette fraude reste le même : un garagiste malhonnête répare des véhicules gravement endommagés, appelés “VGE” (véhicules gravement endommagés), qui peuvent ensuite être revendus après un accident par les assurances. Un expert sans scrupules valide les réparations, souvent effectuées avec des pièces d’occasion ou volées. Celui du Val-de-Marne a certifié 1 000 véhicules en trois ans.

“Ce professionnel n’a aucun lien avec les affaires précédentes, ce qui prouve l’existence du système ailleurs”, affirme un enquêteur à l’AFP, ajoutant : “On se demande combien il y en a en France.”

La profession, qui compte 3 300 experts agréés, estime être victime d’éléments malveillants qu’il est impossible de quantifier, selon Olivier Robert, porte-parole de la CFEA.

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Florian Mourgues, du Syndicat des experts automobile indépendants, dénonce quant à lui la responsabilité des assurances : “Elles abusent de leur position dominante pour agréer leurs propres experts et leur attribuent toutes leurs missions, laissant peu d’opportunités aux autres professionnels.”

La profession compte rétablir l’ordre avec une nouvelle commission disciplinaire, supervisée par le gouvernement. Bien que tardive, elle tiendra sa première session en juin.

Cependant, des experts du dossier jugent ces efforts insuffisants : “Il suffirait d’inspecter 10 % des experts et de vérifier qu’ils disposent des photos des réparations effectuées ainsi que des factures des pièces remplacées”, estime une source judiciaire, dénonçant “un manque de volonté” de la part du gouvernement.

Source : Évry (AFP) – © 2017 AFP