Ces dernières années, les constructeurs automobiles ont misé sur les voitures hybrides rechargeables, également appelées “plug-in”. Ces modèles dotés à la fois d’un moteur à essence et d’un moteur électrique, accompagnés d’une petite batterie rechargeable sur secteur, ont séduit de nombreux Suisses en quête de mobilité décarbonée.
Des émissions sous-évaluées
Cependant, une étude commandée par l’organisation écologiste européenne Transport & Environment (T&E) met aujourd’hui en doute l’argument écologique mis en avant par les constructeurs. Des tests réalisés par l’entreprise britannique Emissions Analytics sur trois véhicules (BMW X5, Volvo XC60 et Mitsubishi Outlander) révèlent des émissions de CO2 jusqu’à 12 fois supérieures aux normes d’homologation.
Andreas Burgener, directeur d’Auto Suisse, n’est pas surpris par ces résultats. Selon lui, c’est le comportement de l’automobiliste qui fait la différence : “Si la batterie n’est pas rechargée, il est évident que la consommation d’essence ou de diesel sera plus élevée. C’est la logique même de ce système. C’est une question de discipline dans l’utilisation de ce produit !”, argumente-t-il en tant que représentant des importateurs de voitures en Suisse.
Cependant, l’Association transports et environnement (ATE) estime que, quel que soit le comportement du conducteur, le recours aux carburants pétroliers par les voitures hybrides est un problème majeur : “Nous déconseillons l’achat de voitures hybrides rechargeables. Il est préférable d’opter pour les véhicules électriques, les transports en commun ou le vélo. Une mobilité sans énergie fossile n’est pas possible avec un véhicule hybride”, souligne Martin Winder, responsable de projet pour l’ATE.
Plus populaires que les Diesel
Pourtant, la technologie hybride est actuellement en pleine expansion. Le nombre de voitures hybrides mises en circulation cette année a même dépassé celui des véhicules diesel, dont les ventes ont été plombées par le scandale.
L’argument écologique n’est toutefois pas le seul à influencer les ventes. Les professionnels, comme les chauffeurs de taxi, optent de plus en plus pour ces modèles hybrides en raison notamment de leur coût. Les voitures hybrides sont moins chères à exploiter que les voitures essence ou diesel, surtout en milieu urbain : “Nous économisons tout de même 50 % de carburant”, affirme Abdellah Faouzi, chauffeur de taxi. Il conduit un modèle hybride, tout comme 65 % de ses collègues chez Taxiphone.
Une stratégie de marketing bien réfléchie
Du côté des constructeurs, il semble également qu’ils ne veulent pas franchir rapidement ce cap, du moins selon leur stratégie marketing. Selon le cabinet d’études Media Focus, la publicité consacrée aux voitures électriques a effectivement doublé entre 2019 et 2020, passant de 5 à 11 %. Mais l’effort publicitaire pour les voitures hybrides a été encore plus important, passant de 6 à 18 %. Quant à la publicité pour les voitures thermiques, elle représente toujours la majorité écrasante, bien qu’elle ait nettement diminué de 89 % à 71 %.
Pour les conducteurs genevois, une transition vers une voiture entièrement électrique serait idéale. Cependant, des obstacles subsistent : “Ce serait la meilleure solution, mais il faut d’abord disposer des infrastructures nécessaires. Aujourd’hui, nous n’avons pas suffisamment de bornes de recharge pour franchir cette étape”, affirme un chauffeur de taxi.
Auto Suisse insiste également sur la nécessité de créer des incitations, notamment fiscales, pour le développement des bornes de recharge. Interrogé sur la question de savoir si la technologie hybride n’est qu’une étape de transition vers les modèles 100 % électriques, Andreas Burgener avance une estimation : “D’ici 2030, nous aurons 50 % de voitures thermiques ou hybrides et 50 % de véhicules entièrement électriques, qu’ils soient équipés de batteries ou de piles à hydrogène.”
Pascal Jeannerat, Feriel Mestiri