Si vous êtes propriétaire d’une copropriété au Québec parmi les 350 000 logements collectifs, et que vous envisagez de vous équiper d’un véhicule électrique, vous vous retrouvez rapidement face à une problématique actuelle. Ce sujet alimente les discussions lors des réunions de syndicats de copropriété. La principale question concerne l’installation de bornes de recharge dans les anciennes constructions qui ne sont pas équipées.
Qui paie et combien cela coûte-t-il ?
Une question se pose alors : qui doit payer pour l’installation des bornes de recharge ? Est-ce la responsabilité de tous les copropriétaires ou seulement de ceux qui en font la demande ? De plus, combien cela coûte-t-il ? Existe-t-il des aides gouvernementales ? Est-ce que l’immeuble a la capacité d’accueillir toutes les bornes ? Toutes ces interrogations préoccupent de nombreux Québécois souhaitant adopter les véhicules électriques, notamment depuis l’annonce récente du gouvernement interdisant la vente de véhicules à essence neufs dès 2035.
En 2016, le Québec comptait 12 500 véhicules électriques sur ses routes. Aujourd’hui, ce nombre a dépassé les 100 000. On estime qu’en 2030, ce chiffre atteindra 1,5 million, représentant 30 % du parc automobile québécois. Vous pouvez donc imaginer le nombre de véhicules électriques qui devront être rechargés chaque nuit.
Le retard du Québec dans les bornes de recharge
“Le Québec accuse un retard énorme au chapitre des bornes de recharge”, déclare David Corbeil, responsable des infrastructures de recharge à l’Association des véhicules électriques du Québec (AVÉQ). “C’est d’autant plus étonnant que nous sommes très en avance en matière de pénétration des véhicules électriques.”
Le principal enjeu réside dans l’adaptation des immeubles construits il y a plusieurs années. Actuellement, ce sont principalement les copropriétaires qui prennent l’initiative d’installer des bornes de recharge lorsqu’ils font l’acquisition d’un véhicule électrique. En général, c’est le copropriétaire lui-même qui assume les coûts liés à l’installation d’une borne de 240 volts et au raccordement à son compteur. Plus l’immeuble est élevé, plus les frais seront importants. Certains compteurs se trouvent même sur le toit de l’immeuble, ce qui complique davantage les choses.
Les coûts pour l’installation et le raccordement d’une borne varient entre 2000 $ et 15 000 $. Toutefois, les copropriétaires et les syndicats de copropriété peuvent bénéficier d’une aide gouvernementale pour réaliser ces modifications.
Certains syndicats acceptent de partager les frais en cas de difficultés, mais d’autres non. “Il arrive que l’on installe des bornes pour deux ou trois copropriétaires, mais certaines administrations (très rares) décident d’installer une infrastructure pour l’ensemble des résidents”, ajoute Adrien Vallat, conseiller principal recherche et analyse au RGCQ.
Chaque immeuble est unique et chaque syndicat adopte une approche différente. “Il existe différentes cultures de gestion des immeubles”, explique David Corbeil, également président de la société Recharge Véhicule Électrique (RVE). “Il faut prendre en compte les dynamiques, les fonds de prévoyance et les habitudes des copropriétaires.”
L’avenir des nouvelles constructions
Qu’en est-il des nouvelles constructions à logements multiples ? Devrions-nous les équiper dès leur construction de bornes de recharge pour véhicules électriques ?
De plus en plus, les promoteurs intègrent cette dimension dans leurs projets. Un ami m’a confié que son immeuble récent propose non seulement des bornes de recharge pour les résidents, mais aussi des voitures Tesla mises à disposition. Nous assistons à une véritable révolution.
Cependant, l’équipement des nouvelles constructions reste à la discrétion des constructeurs.
Des groupes de militants en faveur d’une meilleure électrification plaident pour l’obligation faite aux promoteurs d’immeubles à logements multiples d’inclure des bornes de recharge dans leurs nouvelles constructions, comme cela est déjà en vigueur depuis 2018 pour les maisons unifamiliales et les bâtiments de quatre logements superposés ou moins.
L’AVÉQ et le RGCQ, entre autres, ont récemment fait front commun pour demander au gouvernement d’intervenir. “Il s’agit d’un manque flagrant de vision et de cohérence de la part du gouvernement, dont les efforts en matière d’électrification des transports seront vains s’il n’y a pas un changement rapide de cap”, peut-on lire dans un communiqué récemment publié.
Ce regroupement demande au gouvernement du Québec de prendre des décisions concrètes et rapides pour combler le retard et nous permettre de prendre le virage de l’électrification. Les ministères de l’Environnement et des Affaires municipales sont particulièrement ciblés.
Les municipalités ont également un rôle important à jouer dans ce domaine. En Colombie-Britannique, 17 villes exigent désormais l’installation de bornes de recharge. Au Québec, celles qui adopteraient une position similaire pourraient devancer la Régie du bâtiment, dont la prochaine révision réglementaire aura lieu en 2024.
Il est surprenant que l’administration Plante, pourtant considérée comme l’une des plus écologiques que Montréal ait connues, n’ait encore rien fait en ce sens. Peut-être que cette idée émergera lors de la prochaine campagne électorale ?
Nous parlons ici des bornes de recharge dans les propriétés privées, mais le manque de bornes dans l’espace public est également un problème urgent.
En conclusion, l’électrification des véhicules est largement soutenue et promue, mais nous avons oublié un petit détail crucial : les infrastructures nécessaires pour recharger nos véhicules. Heureusement, des solutions existent et il est temps de les mettre en œuvre.
Image: Condo avec borne de recharge