C’est une histoire captivante. Une histoire d’injustice, de mort, et de résurrection.
Dans les années 1960, le M&M rouge était la star incontestée parmi les cinq couleurs de M&M qui défilaient sur les lignes de production de l’entreprise Mars. Des millions de personnes étaient folles de ce petit bonbon en forme de lentille. Mais en 1976, le M&M rouge a soudainement disparu.
Pendant une décennie entière, personne ne l’a revu. Zachary Crockett explique dans un article de Priceonomics que « la mort et la renaissance du M&M rouge sont une histoire d’incompétence gouvernementale et de pouvoir collectif des consommateurs ».
Au cœur de cette étrange affaire se trouve le colorant rouge n°2, également connu sous le nom d’amarante. C’était le colorant alimentaire le plus utilisé au XXe siècle, présent dans une variété de produits d’une valeur totale de 10 milliards de dollars : boissons, friandises, crème glacée, hot dogs, et bien d’autres. Mais en 1970, des scientifiques russes ont lié ce colorant à l’apparition de tumeurs chez des rats de laboratoire.
Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a mené sa propre enquête et a réalisé plusieurs études sur l’amarante. Bien qu’aucune preuve de risque pour la santé publique n’ait été trouvée, le commissaire de la FDA, Alexander Schmidt, a finalement cédé à la pression populaire et a interdit l’utilisation de ce colorant en 1976.
Les médias se sont emparés de l’affaire et ont frénétiquement dénoncé le rouge n°2, le qualifiant d’agent cancérigène. La population américaine a paniqué. L’hystérie collective a poussé des centaines de marques à rappeler leurs produits contenant ce colorant.
Et le M&M rouge dans tout ça ? Ironiquement, il n’a jamais contenu de rouge n°2. Mars a préféré utiliser le rouge n°40. Mais pour éviter toute confusion dans l’esprit des consommateurs, Mars a décidé de remplacer le M&M rouge par le M&M orange.
Il a fallu attendre neuf ans pour que le combat héroïque d’un étudiant du Tennessee permette au M&M rouge de sortir de son exil forcé. Paul Hethmon, étudiant en première année à l’Université du Tennessee, a fondé la Société pour la restauration et la préservation du M&M rouge. Ses appels à Mars, à la FDA et même au président américain, Ronald Reagan, sont restés sans réponse. Mais le mouvement a rapidement pris de l’ampleur et des milliers de lettres de soutien ont afflué du monde entier.
Finalement, Mars a cédé à la vague d’émotion et a réintroduit le M&M rouge en grande pompe lors des fêtes de Noël en 1985. Le M&M orange est quant à lui resté au côté du M&M rouge pour ne pas faire de mécontents.
Depuis lors, le M&M rouge est revenu sur le devant de la scène, redevenant l’emblème de la marque. Cependant, il reste marqué par son passé. « Le Rouge a du mal à montrer ses émotions. Sa seule manière de dire « Je t’aime », c’est avec les bonbons », résume Jason Lucas, directeur créatif pour l’agence de publicité qui représente les M&M’s.
L’étrange histoire de la disparition du M&M rouge est donc celle d’une résurrection, d’un retour triomphal et d’une rédemption pour ce petit bonbon qui a ravi des millions de personnes à travers les générations.