Optimiser les Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) – Un Mode d’Emploi pour une Meilleure Prise en Charge des Patients

Optimiser les Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) – Un Mode d’Emploi pour une Meilleure Prise en Charge des Patients

Les Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) ont été créées au début des années 2000, dans le cadre du premier Plan Cancer, dans le but d’optimiser et de standardiser la prise en charge des patients atteints de cancer. Depuis, elles se sont étendues à de nombreux autres domaines de la médecine, notamment chez les patients atteints de maladies chroniques graves ou complexes. L’objectif est de réunir les professionnels de santé impliqués dans la prise en charge d’un patient afin d’optimiser les démarches diagnostiques et thérapeutiques, réduire les inégalités de soins et permettre l’accès aux thérapies innovantes. La rigueur dans la mise en place et le suivi des RCP garantit leur succès et leur pérennité.

L’obligation de soin est un principe fondamental du droit français, les médecins étant tenus de fournir des soins “consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science” depuis l’arrêt Mercier de la Cour de Cassation en 1936. Cependant, l’accès équitable aux soins fait face à plusieurs défis :

  • L’évolution rapide de la démographie médicale, avec une concentration des praticiens dans les centres urbains.
  • Les progrès médicaux nombreux et rapides, qui entraînent une hyperspécialisation des praticiens et la complexité croissante des examens complémentaires.

Dans le cadre du Plan Cancer de 2003, les autorités publiques ont institutionnalisé la tenue des Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) pour améliorer la qualité des soins aux patients et faciliter l’accès aux thérapies innovantes. Actuellement, les RCP sont légalement reconnues uniquement en oncologie, mais les autorités sanitaires souhaitent les développer dans d’autres domaines médicaux. Les maladies rares et chroniques sont particulièrement propices au développement des RCP, car leur prise en charge n’est pas toujours bien codifiée. Ainsi, les patients peuvent accéder à des techniques diagnostiques ou thérapeutiques coûteuses et complexes, qui ne font pas partie des soins courants et dont la prise en charge par la Sécurité sociale serait impossible sans les RCP. Pendant longtemps, il existait dans tous les services des réunions de type “staffs” permettant de discuter de ce type de patients, mais la traçabilité des décisions n’était pas toujours assurée avec précision.

Qu’est-ce qu’une RCP ?

Les RCP rassemblent des professionnels de santé de différentes disciplines, dont les compétences sont essentielles pour prendre des décisions garantissant la meilleure prise en charge du patient en fonction de l’état actuel de la science. Au cours des RCP, les dossiers des patients sont discutés collectivement. Les décisions prises sont consignées, puis présentées et expliquées au patient. Les décisions peuvent concerner tous les aspects d’un cas, tels que :

  • L’établissement d’une stratégie diagnostique.
  • La validation du diagnostic.
  • L’établissement d’une stratégie de prise en charge initiale ou secondaire.
  • Voire la décision de stratégie palliative.
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Les RCP sont particulièrement utiles pour les patients atteints de maladies rares et/ou complexes, comme c’est souvent le cas pour les maladies neuromusculaires. Dans notre domaine, la prise de décision collégiale permet de surmonter l’isolement d’un généticien moléculaire face à un nouveau variant de pathogénicité incertaine, ou d’un clinicien confronté à une caisse de Sécurité sociale réticente à l’idée de prendre en charge un traitement hors AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) ou innovant.

Comment mettre en place une RCP ?

Le cadre législatif entourant les RCP en oncologie est strict, et le mode d’organisation des RCP en dehors de l’oncologie s’en inspire. Il est essentiel de fixer des objectifs clairs pour la RCP, afin que les participants soient assidus et que la RCP perdure. Il est tout à fait possible de transformer un “staff” en RCP, mais il est nécessaire de formaliser cette transition, par exemple, en établissant une charte. Voici les principaux éléments à préciser :

  • Le titre de la RCP : celui-ci définit le domaine de la RCP. Il peut être large, tel que “RCP de neurologie périphérique”, ou plus spécifique, comme “RCP amylose à transthyrétine”, en fonction des objectifs visés.
  • La définition du périmètre de la RCP en termes d’ouverture : limitée à un service, un pôle, un établissement, ou ouverte aux professionnels extérieurs (libéraux, Centres Hospitaliers Généraux, etc.).
  • La définition des intervenants : un coordonnateur, chargé d’organiser et d’animer les réunions, des médecins représentant chaque spécialité nécessaire au caractère pluridisciplinaire de la RCP (neurologues, neurophysiologistes, radiologues, pathologistes, généticiens, cardiologues, médecins de médecine physique et de réadaptation, etc.), ainsi que d’autres professionnels de santé impliqués dans la prise en charge du patient (psychologues, kinésithérapeutes, assistantes sociales, infirmières, etc.).
  • La définition de la périodicité des réunions et de leur durée maximale : en général, deux heures suffisent pour rester concentré lors d’une réunion.
  • La définition des critères de sélection des dossiers à étudier : la problématique diagnostique, thérapeutique ou l’intérêt pédagogique pour la communauté médicale, par exemple.
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Il est recommandé de s’appuyer sur un secrétariat efficace pour :

  • Organiser et planifier les réunions sur une période de 6 mois à 1 an, afin que les participants puissent s’organiser.
  • Communiquer aux professionnels le calendrier des RCP.
  • S’assurer de la disponibilité des locaux, en particulier pour les RCP multisites utilisant des moyens de visioconférence.
  • Établir la liste des dossiers à analyser en collaboration avec le coordonnateur.
  • Assurer la traçabilité du compte rendu de la RCP dans le dossier du patient (papier ou électronique) ainsi que sa diffusion.

Comment se déroule une RCP ?

Chaque participant signe la liste d’émargement en début de réunion. Pendant la RCP, chaque dossier est discuté en quatre étapes :

  1. Présentation du cas par le médecin référent.
  2. Discussion du cas entre les professionnels.
  3. Prise de décision collégiale.
  4. Rédaction du compte rendu, qui peut être effectuée pendant la séance ou rapidement après par le secrétaire de séance. Ce compte rendu est intégré au dossier médical du patient et peut être communiqué aux autres professionnels de santé, comme le médecin traitant. Il doit systématiquement contenir les informations suivantes :
  • La date de la réunion.
  • Le nom et la qualité des intervenants.
  • La décision de la RCP, et éventuellement les alternatives possibles.
  • Les références scientifiques utilisées, lorsque cela est possible.
  • Le nom du médecin référent chargé de suivre la décision.

Une RCP n’implique pas nécessairement un lieu unique. En effet, bien qu’il soit plus facile d’organiser une RCP avec tous les participants dans la même pièce, il est possible de réaliser des “RCP connectées” par visioconférence ou en utilisant des outils de communication en ligne. Cela nécessite cependant un mécanisme sûr de partage du dossier médical, permettant à tous les participants d’accéder aux mêmes informations, tout en préservant la confidentialité des données.

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Si le médecin référent du patient ne suit pas la décision de la RCP, les raisons doivent être explicitement argumentées et consignées dans le dossier du patient. En plus de la traçabilité du compte rendu dans chaque dossier patient, le secrétariat responsable de la RCP doit tenir un registre pour noter le nom des participants à chaque réunion, les patients dont les dossiers sont évalués, ainsi que les décisions prises. Ces éléments permettront au responsable de la RCP de produire un rapport d’activité annuel. Ce rapport doit inclure :

  • Le nombre de réunions annuelles.
  • Le nombre de cas discutés.
  • Les critères de sélection des cas : cas complexes, cas fréquents et/ou pédagogiques.
  • L’adéquation des décisions avec les recommandations, les Protocoles Nationaux de Diagnostic et de Soins, etc.
  • La concordance entre les propositions de la RCP et leur mise en pratique.
  • La liste des actions d’amélioration entreprises ou finalisées suite à la RCP, par exemple : l’accès à des thérapies innovantes, etc.

Quels sont les avantages et les risques d’une RCP ?

L’instauration et la systématisation des RCP ont des effets positifs pour les patients et pour l’équipe médicale en charge de leur suivi. En oncologie, les RCP ont permis de standardiser les prises en charge et d’améliorer le suivi des patients. Les concertations pluridisciplinaires favorisent la transparence de l’information entre tous les acteurs impliqués dans la prise en charge du patient et peuvent être utilisées en cas de litige. De plus, les RCP favorisent la recherche translationnelle en permettant :

  • Un diagnostic plus précis, notamment du point de vue moléculaire.
  • Une meilleure communication entre les équipes médicales.
  • La confrontation des idées entre praticiens et chercheurs, favorisant l’émergence de nouvelles études.
  • Une accélération du recrutement des patients pour les essais thérapeutiques.

Afin que la RCP ne s’oppose pas à la liberté de prescription de chaque praticien, il est essentiel que les décisions soient clairement collégiales et argumentées. Lorsque les membres de la RCP ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la prise en charge d’un patient, cela doit être consigné dans le compte rendu, ce qui permettra au médecin référent de choisir l’option qui lui semble la meilleure. En cas de “RCP connectée”, il est fondamental de s’appuyer sur l’expertise de la Direction des Services Informatiques des hôpitaux pour assurer la sécurité des échanges.

Références

médecine/sciences – Inserm