L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) lance une campagne de sensibilisation sur la transmission et les risques liés au papillomavirus afin d’encourager les jeunes à se faire vacciner. Chaque année, ce virus, connu sous le nom de HPV, est responsable de centaines de milliers de cas de cancer.
En France, le gouvernement a lancé une campagne de vaccination en février 2023. Actuellement, la couverture vaccinale est de 37 % pour les filles et 9 % pour les garçons, alors que la stratégie de lutte contre les cancers 2021-2030 vise un objectif de 80 % d’ici sept ans.
Nous avons interrogé le docteur Océane Sorel, virologue, qui travaille en collaboration avec les Nations Unies pour diffuser des informations scientifiques vulgarisées et vérifiées. Elle est également très active sur Instagram (@TheFrenchVirologist), où avec humour, elle contribue à lutter contre la désinformation.
Qu’est-ce que le papillomavirus et comment se transmet-il ?
Le papillomavirus humain, également connu sous le nom de HPV, est une famille de virus qui infectent les humains. Il existe plus de 150 types de HPV différents, dont environ 40 sont transmis par contact sexuel. Certains de ces papillomavirus, qualifiés de “à haut risque oncogène”, peuvent causer des cancers tels que le cancer du col de l’utérus, du pénis, de l’anus ou encore de la sphère ORL. Environ 600 000 cancers par an dans le monde sont attribués au HPV, dont le cancer du col de l’utérus.
Les HPV sont très contagieux et se transmettent par contact avec la peau ou les muqueuses, notamment lors de rapports sexuels, qu’il y ait pénétration ou non. Le simple contact peau à peau ou muqueuse à muqueuse suffit, donc le préservatif ne permet pas de se protéger complètement contre l’infection à HPV.
Comment savoir si j’ai contracté un papillomavirus, y a-t-il des signes d’infection ?
L’infection à HPV est souvent asymptomatique et transitoire, c’est-à-dire que le système immunitaire se débarrasse généralement du virus dans la plupart des cas. La plupart des hommes et des femmes seront infectés par un ou plusieurs HPV au cours de leur vie. Certaines infections transitoires peuvent causer des lésions au niveau du col de l’utérus, mais dans 85% des cas, ces anomalies disparaissent spontanément après quelques mois, voire quelques années, lorsque le système immunitaire élimine le virus. Dans certains cas, lorsque l’HPV à haut risque oncogène persiste dans l’organisme, il peut provoquer des cancers chez les femmes (principalement le col de l’utérus) et les hommes (pénis, anus, sphère ORL).
Comment le papillomavirus peut-il mener au cancer du col de l’utérus ? Est-ce systématique ?
Dans le cas d’une infection persistante par un HPV oncogène et en l’absence d’élimination du virus par le système immunitaire, les anomalies cellulaires au niveau du col de l’utérus peuvent évoluer en lésions précancéreuses, puis en cancer. Cette évolution est lente et prend plusieurs années (environ 10 à 20 ans) entre le moment de l’infection et l’apparition du cancer.
Quels sont les facteurs de risque pour le développement du cancer du col de l’utérus ?
Le principal facteur de risque est l’infection par un ou plusieurs des 14 types de HPV qui peuvent provoquer des cancers. Parmi eux, les HPV 16 et 18 sont responsables d’environ 70% des cancers du col de l’utérus.
D’autres facteurs augmentent significativement le risque de développer un cancer du col de l’utérus, tels que les rapports sexuels à un jeune âge, les multiples partenaires sexuels, le tabagisme, l’utilisation prolongée de la pilule contraceptive, l’immunosuppression, les infections à Chlamydia et la multiplicité des grossesses menées à terme.
Comment prévenir et dépister le cancer du col de l’utérus ? À quel rythme faut-il effectuer des tests ?
Depuis 2006, des vaccins sont disponibles et recommandés chez les jeunes adolescents pour prévenir les infections à HPV et donc les cancers liés à ces virus. Toutefois, les vaccins ne suffisent pas à prévenir 100% des cancers du col de l’utérus, il est donc toujours recommandé d’effectuer un dépistage régulier par frottis cervico-utérin.
En France, le dépistage régulier du cancer du col de l’utérus est recommandé pour toutes les femmes de 25 à 65 ans, qu’elles soient vaccinées ou non. Pour plus d’informations concernant les types de tests et les intervalles recommandés, consultez votre médecin.
Pourquoi le test HPV n’est-il pas recommandé pour les femmes de moins de 30 ans ?
En France, le dépistage par examen cytologique est recommandé dès l’âge de 25 ans pour détecter d’éventuelles cellules anormales. Cependant, le test HPV n’est pas recommandé avant l’âge de 30 ans, car les infections à HPV sont très fréquentes chez les jeunes. Le pic d’infection survient peu de temps après le début de la vie sexuelle. La plupart de ces infections sont transitoires et disparaissent d’elles-mêmes après quelques mois grâce au système immunitaire. Réaliser un test HPV chez les jeunes femmes de moins de 30 ans entraînerait un grand nombre d’examens inutiles et de traitements potentiellement invasifs, pouvant augmenter le risque de complications lors de futures grossesses, alors que la plupart de ces infections se résolvent d’elles-mêmes sans traitement.
Y a-t-il plusieurs vaccins ? Pourquoi ? Quelle est leur efficacité ?
Il existe trois vaccins : Cervarix, Gardasil et Gardasil9, qui protègent tous contre les HPV 16 et 18, responsables de la majorité des cancers liés au HPV. Les vaccins Gardasil et Gardasil9 protègent également contre certains HPV responsables des verrues génitales. Le Gardasil9 cible également d’autres HPV responsables de 20% supplémentaires des cancers du col de l’utérus. L’efficacité des vaccins dans la prévention de l’infection par les HPV ciblés est de plus de 90% si la vaccination est réalisée avant les premiers rapports sexuels.
Qui doit se faire vacciner et quand ?
En France, la Haute Autorité de Santé recommande de vacciner contre les HPV :
- Les filles et les garçons de 11 à 14 ans selon un schéma à 2 doses.
- Un rattrapage est possible pour tous les adolescents et jeunes adultes de 15 à 19 ans selon un schéma à 3 doses.
- La recommandation de vaccination peut être étendue jusqu’à 26 ans pour les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.
Le vaccin a-t-il des effets secondaires connus ?
Les effets secondaires répertoriés des vaccins contre les HPV sont assez courants et similaires à ceux observés lors de l’initiation de la réponse immunitaire, tels que douleur au site d’injection, fièvre, fatigue, etc. Les études récentes ont démontré qu’il n’y a pas de lien entre la vaccination et l’apparition de maladies auto-immunes.
Peut-on se faire vacciner contre le papillomavirus après les premiers rapports sexuels ?
Oui, mais jusqu’à un certain âge. Cependant, l’efficacité du vaccin diminue à 50-60% s’il est administré après les premiers rapports sexuels. En effet, le pic d’infection par les HPV survient peu de temps après le début de la vie sexuelle, d’où l’importance de se faire vacciner à un jeune âge.
Faut-il se faire dépister si on est vacciné ?
Oui. Les vaccins sont une méthode de prévention primaire contre le cancer du col de l’utérus, mais aucun vaccin n’est efficace à 100% et ils ne protègent pas contre tous les types de HPV oncogènes. Par conséquent, la vaccination ne dispense pas du dépistage régulier par frottis cervico-utérin.
La vaccination contre les HPV a récemment été étendue aux garçons en France et dans d’autres pays du monde pour plusieurs raisons. Tout d’abord, 4 cancers sur 10 liés au HPV surviennent chez les hommes. De plus, la vaccination des garçons permet de protéger les filles contre les infections à HPV. Enfin, la vaccination contribue à réduire la circulation des HPV et pourrait à terme conduire à l’éradication des HPV à haut risque oncogène.
Sources :
- e-cancer.fr
- has-sante.fr
- CDC
- OMS
- Fiche d’information de l’OMS : papillomavirus
- En Belgique : Vaccination contre les infections à papillomavirus humain
- Au Luxembourg : Papillomavirus (HPV) : Faites-vous vacciner !
- “Human Papillomavirus Vaccines: an update” – Cheng et al. Vaccines 2020.
- “Review of HPV-related diseases and cancer” – Brianti et al. New Microbiol. 2017.