Il y a 4 ans et demi, Peugeot a présenté lors du salon de Francfort un concept de voiture urbaine électrique appelée BB1. Malgré les réactions très positives obtenues lors du “BB1 tour” qui a suivi, les dirigeants de l’époque ont finalement décidé de ne pas donner suite au projet. Aujourd’hui, alors que l’État français et le chinois Dong Feng s’apprêtent à entrer au capital de PSA, la frustration est à son comble…
I. Peugeot, leader des crossover en Europe
Alors que l’Europe peine à réduire sa dépendance excessive au pétrole et au gaz russe, peu de constructeurs automobiles se sont réellement penchés sur la question pour sortir de cette spirale infernale de consommation. Peugeot est l’une des rares marques à revendiquer fièrement son statut de leader des crossover en Europe. On le sait bien, pour voir la ville sous un autre angle, les crossovers (diesel) sont sans conteste la meilleure invention de notre siècle. Pendant ce temps, les technologies hybrides et électriques continuent d’être négligées par le groupe PSA. La technologie HYbrid4, qui est intrinsèquement coûteuse, est réservée aux véhicules haut de gamme du groupe (508, 3008, DS5) et ne permet pas les économies promises sur le papier. De plus, l’offre électrique se limite à une variante de la Mitsubishi i-MiEV, dont les jours sont désormais comptés.
II. BB1 : Un fleuron du savoir-faire français
Les experts en mobilité répètent sans cesse que l’innovation ne se trouve plus uniquement dans le produit lui-même, mais également dans les services proposés aux consommateurs. Il est évident qu’un véhicule comme la BB1 aurait aujourd’hui beaucoup plus de succès en offrant des services d’autopartage électrique haut de gamme dans les métropoles du monde entier, plutôt qu’en proposant une Bluecar à la finition plus que basique ! Apple l’a compris depuis longtemps : le design et l’esthétique sont aujourd’hui plus importants que jamais, et il ne faut pas les négliger au risque de se retrouver avec un produit de très basse qualité et dépourvu de valeur ajoutée. La BB1, avec ses dimensions ultra-compactes (2,50 mètres de long) et son poids plume (environ 600 kg à vide), reste un modèle de véhicule urbain parfaitement adapté à la densité des villes. Sa batterie lithium-ion offrait déjà à l’époque une autonomie d’environ 100 km, ce qui était largement suffisant pour une utilisation urbaine, y compris pour l’autopartage.
III. L’influence de Dong Feng, le constructeur chinois
La Chine, confrontée à des problèmes de pollution hors normes, a de grandes ambitions dans le domaine des véhicules électriques. Bien que l’électricité en Chine soit encore largement produite à partir de sources carbonées, la stratégie chinoise en matière de mobilité électrique vise d’abord à rendre l’air des villes un peu plus respirable, avant de réduire les émissions de CO2 du pays. Les constructeurs automobiles chinois ne comptent évidemment pas rester les bras croisés dans cette situation. L’entrée de Dong Feng au capital de PSA devrait logiquement accélérer considérablement l’hybridation et surtout l’électrification des véhicules. Ne pourrait-on pas sortir des tiroirs le génial concept qu’est la BB1 ? À l’époque, le projet avait été estimé à environ 300 millions d’euros pour le transformer en un projet industriel concret, ce qui est à comparer aux 3 milliards d’euros annoncés dans le cadre de l’augmentation de capital à laquelle l’État français et Dong Feng doivent participer à parts égales.
IV. Quelles perspectives pour l’électrique “made in France” ?
D’un côté, la Chine s’approprie d’anciens groupes industriels européens tels que PSA ou Volvo, et de l’autre côté, les nouveaux arrivants, comme Tesla Motors, annoncent des initiatives spectaculaires en matière de production de batteries. Pour le moment, l’Europe semble être le parent pauvre des investissements et de la mise en place de nouvelles filières industrielles autour des véhicules électriques. Pour ceux qui en doutaient encore, le monde de demain sera très différent de celui d’hier ou d’aujourd’hui. Espérons que les acteurs européens se réveilleront à temps pour essayer de contrer, ne serait-ce qu’en partie, les initiatives en cours ailleurs dans le monde…