Peut-on rouler à l’E85 sans boîtier ?

Peut-on rouler à l’E85 sans boîtier ?

Tandis que les carburants traditionnels dépassent allègrement la barre des 2 €/L, certains automobilistes sont tentés de faire leur plein à l’E85. Compatible avec les moteurs essence, le superéthanol est particulièrement économique : il est actuellement vendu autour de 0,90 €/L. Mais que risque-t-on à rouler à l’E85 sans utiliser ce coûteux kit ? Comment rouler au E85 sans boîtier ?

Qu’est-ce que l’E85 ?

L’E85 ou « superéthanol » est un carburant alternatif composé de 65 à 85 % d’éthanol (un alcool) et de 15 à 35 % d’essence sans-plomb, les proportions fluctuant selon la saison. Il s’agit d’un agrocarburant, l’éthanol étant fabriqué par transformation de matières issues de l’agriculture : principalement du colza, des betteraves, céréales et résidus organiques.

Ce carburant présente l’avantage d’être nettement moins émetteur de dioxyde de carbone d’origine fossile. Le CO2 rejeté lors de la combustion provient en effet majoritairement des végétaux, qui l’ont capté lors de leur croissance. Ce dioxyde de carbone « de surface » a donc un impact limité sur le réchauffement climatique.

Le superéthanol serait aussi plus faiblement émetteur de polluants dangereux pour la santé que l’essence. Cet aspect ne fait toutefois pas consensus dans la communauté scientifique, certains composés nocifs propres à ce carburant tels que le formaldéhyde et l’acétaldéhyde pourraient en effet être libérés lors de sa combustion.

La France, grand producteur d’E85

Enfin, l’E85 contribue à réduire la dépendance envers les pays producteurs de pétrole. L’éthanol peut être fabriqué à tout endroit disposant de grandes surfaces agricoles et d’un climat favorable, comme la France. Notre pays est ainsi le 10e producteur mondial d’éthanol, avec 0,9 milliard de litres en 2018. L’Hexagone reste cependant très loin derrière les États-Unis, leader mondial avec près de 61 milliards de litres produits en 2018. Selon le ministère de la Transition écologique et solidaire, 83 % des matières premières utilisées pour fabriquer l’E85 étaient d’origine française et 99,6 % d’origine européenne en 2019.

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Quels véhicules peuvent rouler au E85 ?

Pour tous ces avantages, de nombreux pays encouragent le développement de l’E85. En France, les premiers litres sont arrivés en station-service en 2007. S’il était très compliqué de trouver une pompe il y a encore quelques années, plus de 30 % des stations en sont désormais équipées. Il faut dire que le superéthanol est proposé à un prix particulièrement intéressant. Fortement détaxé, il s’affichait autour de 0,70 €/L début 2021. Désormais vendu 0,92 €/L en moyenne suite aux fortes hausses liées au conflit russo-ukrainien, il reste 2 fois moins cher que le sans-plomb 95.

Essence VS Superéthanol : coût d’un plein

  • SP95-E5 : 102,3 €
  • SP95-E10 : 99,35 €
  • E85 : 46 €

Officiellement, l’E85 est un carburant réservé aux véhicules à moteur essence à injection électronique mis en circulation à partir de 2007. Selon le ministère de la Transition écologique, ils doivent disposer d’adaptations spécifiques du système d’injection et du moteur, avoir des matériaux plastiques et joints compatibles ainsi qu’un dispositif pour assurer le démarrage à froid.

Les voitures compatibles avec l’E85 sont dites « flex-fuel ». Elles peuvent l’être de série, comme les Ford Fiesta, Puma, Focus, Transit et Kuga FlexiFuel, ou être adaptées a posteriori grâce à un boîtier. Il s’agit d’un simple boîtier électronique à faire installer par un professionnel agréé. Ce petit appareil communique au moteur les instructions appropriées pour enflammer l’E85 de façon optimale.

Son coût est toutefois élevé : il est généralement vendu entre 700 et 2 000 € selon les véhicules, pose comprise. Certaines collectivités locales peuvent subventionner une partie de l’installation. La région Sud-PACA accorde par exemple une aide de 500 € à la conversion d’un véhicule à l’E85 dans la limite de 50 % du coût total.

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Est-il dangereux de rouler à l’E85 sans boîtier ?

Contrairement aux idées reçues, rouler à l’E85 ne risque pas de corroder les pièces en contact avec le carburant utilisé si le véhicule a été mis en circulation à partir de 2007. Si l’éthanol est légèrement plus corrosif que l’essence, les moteurs modernes sont parfaitement conçus pour y résister. Tous les sans-plomb contiennent en effet de l’éthanol depuis quelques années (5 % pour le SP95 et jusqu’à 10 % pour le SP95-E10).

Les véhicules essence récents peuvent donc fonctionner à l’E85 sans crainte, avec ou sans boîtier. De très nombreux automobilistes incorporent de l’E85 sans boîtier à leur réservoir et les retours concernant des pannes ou problèmes majeurs incriminant directement l’E85 sont assez rares.

Les ventes d’E85 plus rapides que les conversions

La croissance de l’E85 est d’ailleurs totalement désynchronisée des ventes de boîtiers de conversion. Environ 135 000 voitures sont actuellement équipées d’un boîtier e85 en France, alors qu’il s’est vendu 468 000 m³ d’E85 dans notre pays en 2020. Seulement 30 000 nouvelles voitures ont été converties entre 2020 et 2021 (soit 0,19 % du parc national de voitures particulières à essence), mais le bio éthanol a connu une hausse phénoménale de ses ventes : +33 % sur la même période.

Cet écart trahit probablement une très forte utilisation de l’E85 dans des véhicules non équipés. Jusqu’à ce jour, il n’a pourtant pas été signalé de ruée vers les réparateurs pour des avaries liées à ce carburant.

Peut-on rouler à l’E85 sans boîtier ?

Une surconsommation de 15 à 40 % avec l’E85

Le superéthanol e85 contenant moins d’énergie par litre que l’essence sans-plomb (environ 6,5 kWh/L pour l’E85 contre 10 kWh/L pour le SP95-E10), il est normal de constater une surconsommation de l’ordre de 15 à 40 %, ainsi qu’une perte de puissance. Le phénomène risque simplement d’être beaucoup plus marqué sur un véhicule non équipé d’un boîtier.

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Sans boîtier, le tableau de bord affichera très probablement un voyant moteur orange, signalant la plupart du temps un mélange de carburant trop pauvre. Cela signifie que le ratio air – carburant est légèrement déséquilibré (trop d’air et pas assez de carburant).

Inutile de s’alarmer : rouler « trop pauvre » au superéthanol n’a pas les mêmes conséquences qu’avec l’essence. L’E85 dispose d’un indice d’octane élevé et s’enflamme en générant moins de chaleur. Le risque de cliquetis, un phénomène potentiellement destructeur pour le moteur, n’est donc pas significativement augmenté.

Gare au contrôle technique et à la garantie constructeur

Attention : le voyant moteur est un motif de contre-visite lors du contrôle technique. Veillez donc à le faire disparaître en roulant de nouveau à l’essence traditionnelle avant de passer l’examen.

Vous pouvez éventuellement vérifier le message d’erreur lié au voyant avec un lecteur OBD et une application smartphone, afin de vous assurer qu’il ne s’agit pas d’un problème plus important.

Sachez aussi que l’éthanol est moins facile à vaporiser et donc enflammer par temps froid. Lorsque le mercure est inférieur à 10 °C, il est possible (mais pas systématique) que le moteur « broute » quelques dizaines de secondes avant de démarrer, sans conséquence sur son fonctionnement une fois chaud.

Vous ne risquez donc pas grand-chose à rouler avec tout ou partie de votre réservoir rempli d’E85 sans boîtier si votre véhicule est récent. S’il est toujours sous garantie, évitez cependant de faire le plein de superéthanol. Cela violerait le contrat de garantie et le constructeur pourrait attribuer une panne à l’utilisation de ce carburant, même si ce dernier n’est pas en réalité pas impliqué.