La guerre, ce fléau qui a marqué l’histoire de l’humanité depuis des millénaires, continue de susciter des interrogations profondes. Frédéric Gros, philosophe spécialisé dans les questions de guerre et de sécurité, se penche sur cette problématique dans son dernier ouvrage intitulé “Pourquoi la guerre ?”. Lors de son passage à l’émission de Laure Adler, il a abordé les raisons qui poussent les êtres humains à se faire la guerre et les implications de cette violence dans notre société.
Une malédiction de nos sociétés
La guerre est-elle une composante naturelle de notre existence ? Est-ce que l’homme est naturellement enclin à la violence envers ses semblables ? Selon Frédéric Gros, bien que la guerre ait été présente tout au long de notre histoire, cela ne signifie pas pour autant que la guerre et l’homme sont indissociables : “La guerre est inscrite dans l’histoire de l’humanité depuis l’apparition des premières sociétés humaines au Néolithique. Cependant, cette violence nous choque toujours et nous pousse à penser que nous sommes plutôt faits pour la paix, l’amour, la fraternité. La guerre est une malédiction où se mêlent de sombres passions qui dégénèrent systématiquement, mais cela ne signifie pas que nous sommes destinés à la guerre.”
Deux philosophies face à la guerre : Hobbes et Kant
Frédéric Gros évoque deux courants de pensée qui permettent d’approcher la complexité de la guerre dans l’évolution de la mentalité humaine. Selon lui, si la philosophie de Hobbes considère que “l’homme est un loup pour l’homme” et qu’il est nécessaire de construire un ordre artificiel pour contenir cette violence naturelle, la philosophie de Kant prône la bonté naturelle de l’homme et l’idée qu’il peut s’épanouir sans guerre (bien que l’absence totale de conflits n’ait jamais été constatée).
Les différentes acceptions du mot “guerre”
Frédéric Gros ouvre son livre en explorant les différentes significations du mot “guerre” à travers l’histoire. Il constate que ce terme s’est diversifié pour englober d’autres secteurs et enjeux sociétaux qui ne sont pas nécessairement liés à la fatalité de la “mort” associée à la guerre classique. Ainsi, dans les dernières décennies, on a utilisé le mot “guerre” de manière métaphorique pour illustrer des situations difficiles dans divers domaines tels que les relations entre les générations, les rapports entre les sexes, la compétition économique ou encore les luttes sociales. Cependant, Frédéric Gros souligne qu’il existe une différence d’intensité entre ces situations et la guerre interétatique conventionnelle, comme celle qui se déroule actuellement entre la Russie et l’Ukraine.
La guerre écologique : une menace contre l’humanité et la nature
La lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de notre environnement ont conduit à l’utilisation du terme “guerre” pour décrire les enjeux cruciaux auxquels nous sommes confrontés. Frédéric Gros considère que le capitalisme est une “guerre totale” déclarée à la nature, caractérisée par une exploitation abusive, prédatrice et destructrice de notre planète. La question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment réinventer des modes d’appropriation écologique pour préserver notre habitat et garantir un avenir aux générations futures.
La guerre, une énigme qui a marqué notre histoire et qui continue d’interroger notre humanité. Grâce à des réflexions philosophiques approfondies, Frédéric Gros nous invite à remettre en question les fondements de la guerre et à chercher des alternatives pour construire un monde plus pacifique et respectueux de notre environnement.