Pourquoi la voiture électrique ne causera pas la destruction massive d’emplois

Pourquoi la voiture électrique ne causera pas la destruction massive d’emplois

La transition vers la voiture électrique, bien qu’applaudie par les municipalités, suscite des inquiétudes dans les usines. Une récente étude de l’IG Metall, la principale organisation professionnelle d’Europe avec 2,4 millions de membres en Allemagne, a révélé que le succès de la voiture électrique pourrait entraîner une perte d’emplois dans les chaînes de production d’ici dix ans.

L’impact sur les emplois

Selon l’étude réalisée par l’Institut Fraunhofer de génie industriel, parmi les 210 000 emplois dans l’industrie automobile allemande, 75 000 pourraient être menacés dans les dix prochaines années. Ce chiffre pourrait augmenter jusqu’à 100 000 en cas de succès plus rapide et plus important de la voiture électrique. Bien que cette étude ne mentionne pas les constructeurs français, il est important de noter que ces chiffres soulèvent des préoccupations quant à l’avenir de l’emploi dans ce secteur.

Pourquoi moins de main-d’œuvre est-elle nécessaire dans l’électrique?

La voiture électrique nécessite moins de main-d’œuvre dans le secteur automobile en raison de la simplicité de fabrication de ses composants. Par exemple, la production de batteries demande cinq fois moins de travail humain que celle des moteurs, une boîte de transmission électrique est six fois plus simple à fabriquer et l’assemblage d’un véhicule électrique nécessite 30% de temps en moins par rapport à ses équivalents thermiques. Avec une part de marché estimée à 25% des ventes totales de véhicules en Allemagne d’ici 2030, la voiture électrique est promise à un avenir prometteur sur le continent européen.

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Des prévisions exagérées?

Cependant, Jean-Pierre Corniou, ancien directeur des systèmes d’information de Renault et auteur de “L’avenir de l’automobile”, ne partage pas ces prévisions alarmistes. Il estime qu’il est peu probable d’atteindre de tels chiffres dans une décennie pour les véhicules purement électriques. Actuellement, les voitures électriques ne représentent qu’une infime partie du parc automobile européen (1% des ventes en France) et elles sont confrontées à des contraintes en termes d’autonomie et de prix, ce qui les rend difficilement vendables en masse. Par conséquent, il est peu probable qu’elles bouleversent les chaînes de production des constructeurs. De plus, selon un rapport de France Stratégie, le véhicule électrique ne connaîtra une véritable expansion que lorsqu’il sera accessible aux classes moyennes et populaires.

L’hybride comme solution?

L’électrique favorise également l’emploi automobile, particulièrement en Allemagne où les véhicules hybrides rechargeables, tels que ceux de Volkswagen, Porsche et Mercedes, connaissent un grand succès. Ces voitures, dont les ventes dépassent désormais celles des voitures électriques, offrent une autonomie électrique raisonnable pour une utilisation quotidienne et bénéficient d’une portée étendue grâce à leur moteur thermique. Par leur complexité, elles nécessitent davantage de main-d’œuvre. En revanche, les véhicules 100% électriques nécessitent une révolution technologique au niveau des batteries pour pouvoir réellement décoller.

La vraie menace: le déclin du diesel

La véritable menace pour l’emploi en Allemagne et en France réside plutôt dans le déclin relatif du diesel. Alors qu’il détenait 73% de part de marché en 2012, le diesel ne représente plus que 40% des ventes de voitures en France, en raison de normes de plus en plus strictes et de politiques fiscales moins favorables. Cette évolution représente une perte pour les constructeurs qui ont massivement investi dans des chaînes de montage spécifiques au diesel. En revanche, les moteurs à essence sont beaucoup plus simples à fabriquer que leurs homologues diesel.

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La demande d’un nouvel écosystème automobile

La plupart des emplois liés à l’industrie automobile restent stables, bien que certaines filières de production de mécanismes de pompage ou d’injection de carburant soient confrontées à des risques plus élevés avec l’abandon progressif du diesel. Par ailleurs, la création d’un écosystème autour de la voiture électrique, autonome et rechargeable générera une demande considérable en main-d’œuvre qui compensera les effets néfastes de la baisse des ventes de véhicules thermiques. La France, si elle oriente correctement sa politique industrielle, pourra également bénéficier de cette création d’emplois. Les moteurs à hydrogène, les bornes de recharge et les batteries sont des secteurs sous-investis dans le pays. Pour combler ce retard, France Stratégie propose trois axes de développement: une recherche et développement conséquente, des efforts de formation initiale et continue des employés afin de faciliter leur reconversion, et une politique qui stimule la demande telle que des bonus à l’achat de véhicules électriques ou à l’installation de bornes de recharge. L’objectif est d’étendre rapidement le marché pour créer une demande croissante en infrastructures et, par conséquent, en emplois.