Ouvrir un robinet en France pour obtenir de l’eau potable est un geste simple et pratique au quotidien. Cela nous permet d’accéder à une eau de très bonne qualité microbiologique, ce qui est particulièrement utile, surtout pendant les chaudes journées d’été…
Pourtant, en 2020, un Français sur trois continuait de préférer l’eau en bouteille à celle du robinet, malgré les effets néfastes des déchets plastiques sur la santé et l’environnement, le coût plus élevé de l’eau en bouteille et la qualité parfois douteuse de cette dernière.
Dans cet article, nous allons explorer l’origine de l’eau du robinet et les raisons pour lesquelles elle est propre à la consommation.
D’où provient l’eau courante et comment devient-elle potable ?
Les deux tiers de l’eau potable produite en France sont prélevés dans les eaux souterraines, également appelées nappes phréatiques, tandis que le tiers restant provient des eaux de surface telles que les rivières, les fleuves, les lacs et les barrages. Ces sources sont alimentées par les précipitations sous forme de neige et de pluie, ainsi que par les écoulements et les infiltrations.
Les activités humaines, telles que l’agriculture, l’élevage et les conséquences telles que la déforestation, la destruction des zones humides et les changements climatiques, ont un impact significatif sur ce cycle et sur les flux d’eau qui y sont associés.
Une fois prélevée, l’eau est acheminée jusqu’à une usine de traitement pour être rendue potable. Le traitement appliqué dépend de la qualité initiale de l’eau prélevée. Dans le cas des eaux souterraines, dans trois quarts des cas, un simple traitement physique tel que la filtration et la décantation, ainsi qu’une désinfection, sont suffisants.
Pour les eaux de surface, des traitements physiques et chimiques plus avancés sont nécessaires en fonction de la qualité de l’eau à traiter. Dans certains cas, un traitement supplémentaire tel que l’ozonation, l’utilisation de charbons actifs et/ou la filtration membranaire sont appliqués afin de réduire au maximum la présence de matière organique dissoute et de micropolluants tels que les pesticides.
Une désinfection finale est toujours réalisée lors de la dernière étape du traitement, généralement par ajout de chlore, qui assure une désinfection durable et maintient la qualité de l’eau stockée dans les réservoirs jusqu’à sa distribution.
En France, la consommation moyenne d’eau potable par habitant est d’environ 150 litres par jour, dont 93 % sont utilisés à des fins d’hygiène personnelle (dont 20 % pour les sanitaires) et 7 % pour l’alimentation. La consommation domestique représente 20 % de la consommation totale, tandis que 35 % de l’eau potable est utilisée par l’industrie et l’électricité, et 45 % par l’agriculture, bien qu’il ne soit pas toujours nécessaire d’utiliser de l’eau potable. La réutilisation des eaux usées traitées est encore limitée en France en raison d’une réglementation stricte et reste minoritaire pour ces usages.
Une eau du robinet soumise à une réglementation stricte
Une fois traitée, l’eau distribuée doit répondre à des normes sanitaires définies dans le Code de la santé publique. Sa qualité fait l’objet d’un suivi régulier depuis les installations de traitement jusqu’aux châteaux d’eau utilisés pour le stockage, ainsi que tout au long du réseau de distribution.
Au total, une soixantaine de paramètres sont contrôlés, couvrant les aspects bactériologiques, physico-chimiques, organoleptiques et radiologiques de la qualité de l’eau du robinet. Cela fait de l’eau du robinet l’aliment le plus contrôlé en France.
Dans l’ensemble, la qualité de l’eau potable en ville est excellente en France, avec près de 100 % des communes de plus de 50 000 habitants et 98 % de la population totale ayant consommé une eau de très bonne qualité microbiologique tout au long de l’année 2020.
En ce qui concerne les pesticides, principalement issus des ruissellements et de l’infiltration dans les sols, 94 % de la population française a consommé une eau respectant les limites réglementaires tout au long de l’année 2020. Cependant, les dépassements détectés étaient limités en concentration et dans le temps, ce qui a rendu presque inutile la mise en place de restrictions de consommation d’eau du robinet.
Les effets à long terme de la consommation de pesticides à faibles doses sur la santé sont encore mal connus mais très probables, en particulier chez les populations dites “sensibles”, comme les enfants et les femmes enceintes.
Des problèmes ponctuels peuvent survenir dans les petites communes (moins de 500 habitants), ainsi que dans les zones rurales présentant une agriculture intensive ou viticole utilisant des pesticides, à proximité d’élevages où la présence de nitrates peut être importante, ou encore dans les zones situées à proximité de certaines industries.
En cas de dépassement des normes, il incombe aux responsables de la production ou de la distribution de prendre les mesures correctives nécessaires pour rétablir la qualité de l’eau. Des dérogations exceptionnelles peuvent être mises en place (en cas d’absence de risque sanitaire et avec obligation de remise en conformité rapide) ou des mesures plus strictes peuvent être rapidement appliquées, si nécessaire, par le préfet sur avis de l’agence régionale de santé correspondante. Par exemple, une restriction ou une interdiction temporaire de consommation d’eau a été mise en place cet été à Châteauroux (Indre).
La présence d’un plan de gestion de la sécurité sanitaire des eaux, indiquant les mesures à prendre en cas de problème, sera obligatoire d’ici 2027 grâce à la refonte de la directive “Eau potable” du 16 décembre 2020.
Pourquoi boire de l’eau du robinet plutôt que de l’eau en bouteille ?
En France, la consommation d’eau en bouteille est très répandue, principalement en raison d’un lobbying des marques qui ont convaincu les Français que l’eau embouteillée était de meilleure qualité que l’eau du robinet.
Il est tout d’abord important de préserver l’environnement, car l’eau minérale vendue en bouteille implique l’utilisation de contenants en plastique. La majorité de ces déchets (87 %) finit par se retrouver dans la nature, contribuant ainsi à la pollution plastique qui a un impact significatif sur la faune et la flore aquatiques. Même le tri de ces déchets dans des centres spécialisés ne résout pas complètement le problème, car seulement un quart des déchets plastiques est effectivement recyclé à l’échelle mondiale. Une étude sur le cycle de vie de l’eau minérale a révélé que son impact environnemental est parfois jusqu’à 1 000 fois supérieur à celui de l’eau du robinet.
Il s’agit également d’un enjeu de santé publique en raison de la présence de microplastiques dans les eaux. Ces microplastiques proviennent principalement de la dégradation de gros objets en plastique tels que les bouteilles. Chaque semaine, nous ingérons l’équivalent d’une carte de crédit en plastique, principalement par le biais de l’eau que nous buvons, qu’elle provienne du robinet ou de bouteilles, mais aussi dans une moindre mesure par le biais de la nourriture que nous consommons, notamment les crustacés, ou encore par l’air que nous respirons (ceci est une estimation mondiale moyenne et non spécifique à la France).
Réduire, voire éliminer, l’utilisation du plastique, notamment en arrêtant de consommer de l’eau en bouteille, contribuerait à réduire la présence de microplastiques dans les océans.
De plus, certaines eaux en bouteille fortement minéralisées sont recommandées pour une consommation ponctuelle et leur utilisation quotidienne est déconseillée. Pour neutraliser le goût potentiellement désagréable de l’eau du robinet dû au chlore, qui n’affecte en rien sa qualité sanitaire, il suffit de la laisser reposer au réfrigérateur quelques heures avant de la consommer.
Il est également important de souligner que l’eau en bouteille prélevée dans les ressources souterraines contient également de petites quantités de polluants tels que des pesticides ou des médicaments.
Enfin, la consommation d’eau en bouteille pour la boisson revient au moins 100 fois plus cher que la consommation d’eau du robinet.
Nous avons la chance en France de disposer d’une eau du robinet de qualité, il est donc judicieux de la consommer, que ce soit pour préserver la planète ou pour notre santé ! Vous pouvez consulter la qualité moyenne de l’eau de votre commune sur votre facture annuelle ou en ligne à tout moment.
- Alice Schmitt, post-doctorante en génie des procédés, Institut européen des membranes, Université de Montpellier ; Julie Mendret, maître de conférences, HDR, Université de Montpellier.