L’émission diffusée par TF1 vendredi dernier, intitulée “Garagistes contre experts : la guerre des prix !”, a provoqué l’indignation de l’Alliance Nationale des Experts en Automobile (ANEA), qui ne s’attendait pas à un tel titre. Ce reportage, diffusé juste après le Congrès annuel de l’Alliance, était censé mettre en valeur le métier d’expert. Cependant, les journalistes de TF1 ont fait preuve d’une réelle volonté de comprendre et d’expliquer toute la complexité des enjeux qui opposent les assureurs aux carrossiers.
Une bataille de prix entre garagistes et assureurs
Dès le début du sujet, présenté par Claire Chazal, on comprend que nous allons plonger au cœur du sujet : “Les garagistes se disputent avec les compagnies d’assurance. Les préparateurs ont longtemps été accusés d’augmenter artificiellement leurs tarifs, tandis que les experts en évaluation des dommages tentent d’imposer d’autres prix. Une charte de bonnes pratiques a été mise en place, mais les carrossiers se sentent lésés…”
Le reportage commence alors. “C’est un véritable cauchemar pour les garagistes : l’expert en automobile ne fait aucun compromis, il voit tout”. Dès le début, on nous montre un expert chez un carrossier pendant une expertise. L’expert, qui est également responsable de la communication de l’ANEA, inspecte minutieusement la voiture et donne ses directives. Il explique ensuite la procédure du débat contradictoire qui doit aboutir à un accord entre les parties.
Le libre choix et les conditions d’accréditation
Le journaliste s’intéresse ensuite à la réalité quotidienne des carrossiers, qui sont agréés par plusieurs compagnies d’assurance et bénéficient ainsi d’un volume de travail conséquent. En contrepartie, ils doivent proposer des prix attractifs, avec des coûts de main-d’œuvre réduits et des remises sur les pièces détachées. Le journaliste aborde également la question du “libre choix” : “Mais l’assuré est libre de choisir son artisan, conformément à la loi Hamon de janvier 2014. Cette loi protège les garagistes indépendants, comme Dominique qui a toujours refusé les conditions imposées par les assurances”. Dominique Carducci, réparateur indépendant chez MM CAR, précise : “J’accepterai d’être agréé si nous convenons d’un tarif raisonnable. À 35 euros de l’heure, ce n’est pas possible”.
Le reportage poursuit en dénonçant les réparateurs qui perdent leurs agréments, malgré des baisses de prix consenties. Laurent Bonnet, agent Renault, témoigne : “Nous étions agréés depuis 25-30 ans, puis nous avons reçu une lettre recommandée qui mettait fin au contrat. L’un de nos voisins a été agréé par cette même compagnie, à des tarifs nettement inférieurs”.
Des réparateurs contraints de se plier
Le reportage montre également les réparateurs qui doivent se plier aux contraintes, non sans difficultés. Le témoignage anonyme d’un troisième réparateur sous agrément est révélateur : “C’est simple, quand vous avez des employés et que vous ne voulez pas les licencier, vous devez faire avec”.
Les enjeux de l’affrontement assureurs/carrossiers
Le reportage conclut en soulignant les enjeux pour les assureurs et les carrossiers. En dix ans, plus de 15% des carrossiers ont fait faillite. Les garagistes pointent du doigt les experts. Sylvain Girault, expert en automobile et responsable de la communication de l’ANEA, explique le rôle essentiel de sa profession : “Il faut comprendre que le coût de la réparation a un impact sur la charge des sinistres. Au final, c’est l’assuré qui paiera si les coûts de réparation dérivent”.
Cependant, cette affirmation est immédiatement contredite par Yves Levaillant, président de la branche Carrosserie du CNPA : “Certains réparateurs partent à la retraite sans pouvoir céder leur fonds de commerce. Pourquoi ? Parce que leur bilan n’est pas bon. Et leur bilan n’est pas bon car ils travaillent à perte depuis quelques années”.
Au terme de ce reportage de seulement 2 minutes et 18 secondes, diffusé à une heure de grande écoute, TF1 a réussi à exposer les principaux enjeux qui opposent les assureurs aux carrossiers. Même s’il reste encore beaucoup à dire sur ce sujet complexe, il est indéniable que cette émission a contribué à sensibiliser le grand public à ces problématiques.
