Lorsque l’on parle de la réforme des retraites, une question se pose : les femmes seront-elles les grandes perdantes ? Cette réforme, qui vise à relever l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et à augmenter la durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein, soulève de nombreuses critiques. Le gouvernement la présente comme une réforme “juste” et porteuse de “progrès social”, mais des disparités subsisteront entre les femmes et les hommes.
Des départs à la retraite différents pour les femmes et les hommes
Selon une étude d’impact, les femmes partiront plus tard que les hommes à la retraite. En 2020, l’âge moyen de départ à la retraite est de 62 ans et 4 mois pour les retraités résidant en France. Les femmes partent en moyenne 7 mois après les hommes : 62 ans et 7 mois pour les femmes et 62 ans pour les hommes.
Un effort supplémentaire demandé aux femmes
Cette réforme demandera un effort supplémentaire aux femmes par rapport aux hommes. Les femmes nées en 1972 verront leur âge moyen de départ augmenter de neuf mois en moyenne contre cinq mois pour les hommes de la même génération. Les femmes nées à partir de 1980 seront encore plus touchées, avec un départ à la retraite de huit mois supplémentaires, contre quatre mois pour les hommes.
Les trimestres validés pour la maternité réduits à néant
Les femmes partent plus tard à la retraite en raison de leurs comportements d’activité. Lors de la naissance d’un enfant, huit trimestres sont attribués. Cependant, le décalage de l’âge légal de départ à la retraite efface le bénéfice de ces trimestres validés pour la maternité. “Ces femmes qui pouvaient enfin partir avec une carrière complète grâce à ces trimestres, vont devoir attendre 64 ans. Les droits familiaux sont mis à mal”, explique Rachel Silvera, spécialiste des inégalités de genre sur le marché du travail.
Une réforme qui ne tient pas compte des femmes
La période de congé parental sera prise en compte dans le dispositif des carrières longues, mais seulement dans la limite de quatre trimestres et uniquement pour les femmes ayant commencé à travailler avant l’âge de 20 ans. Cette mesure ne concernera donc qu’une infime partie des femmes partant à la retraite chaque année. Au final, cette réforme représente “beaucoup de mots pour beaucoup de maux pour les femmes”, souligne Rachel Silvera.
Une décote qui touche les femmes de plein fouet
La décote reste fixée à 67 ans dans cette réforme des retraites. Cette mesure est censée être favorable aux femmes, qui sont souvent contraintes d’interrompre leur carrière. Cependant, une femme qui travaille jusqu’à ses 67 ans pour prendre sa retraite “à taux plein” verra le montant de sa retraite diminuer, car elle n’aura pas réuni le nombre de trimestres suffisant. Une décote jugée injuste par Rachel Silvera.
Une pension minimale insuffisante pour réduire les écarts
La réforme propose de revaloriser la pension minimale à 1 200 euros brut par mois, en cas de carrière complète. Cette mesure sera bénéfique pour certaines femmes, mais elle ne réduira pas significativement les écarts de pension entre les femmes et les hommes, qui s’élèvent actuellement à 40%. Les inégalités de genre à la retraite sont le reflet des inégalités sur le marché du travail et dans la vie en général, souligne la spécialiste des inégalités de genre sur le marché du travail.
Les critères de pénibilité ne prennent pas en compte les métiers féminisés
Les critères de pénibilité ne seront pas modifiés dans cette réforme des retraites, ce qui pose problème selon Rachel Silvera. En effet, ces critères ne prennent pas en compte la pénibilité des métiers les plus féminisés. “Il y a une invisibilité complète. Je pense aux contraintes physiques mais aussi émotionnelles qui sont invisibilisées. Il y a toujours un angle mort : la place des femmes là-dedans.”
Il est donc clair que la réforme des retraites actuelle pénalise les femmes. Les mesures proposées ne permettent pas de réduire les écarts de pension et ne tiennent pas compte des spécificités liées à la maternité. Il est essentiel de prendre en compte ces inégalités de genre pour construire une réforme des retraites véritablement égalitaire.