Salvatore Montana est un véritable maître dans l’art de la réparation des vieilles voitures. À 80 ans, aucun moteur ne peut lui résister. Cet immigré italien a acquis son savoir-faire à l’usine renommée de Maranello, en Italie, où il a eu l’occasion de côtoyer le célèbre fondateur de la Scuderia, le légendaire Enzo Ferrari. Dans son garage à Saint-Jean-sur-Richelieu, Salvatore se remémore sa jeunesse, une période où la course automobile était sa passion ultime.
L’expertise des vieux bolides
“J’ai réalisé des miracles pour réparer des voitures”, se souvient l’ancien mécanicien, vainqueur des 24 heures du Mans en 1964. “Ferrari m’a formé pour les courses. Ils ont remarqué que je n’étais pas un garçon comme les autres.” Salvatore possède un don unique : comprendre les problèmes d’un pilote sur la piste en un clin d’œil. “Il veut de la vitesse. J’avais la capacité de le rendre heureux en réparant sa voiture.”
Chauffé en blouse et bonnet de mécanicien, l’octogénaire se tient à son poste tous les jours, faisant ce qu’il aime le plus au monde. Il peut compter sur François, un mécanicien qu’il appelle “un ange” et admire pour ses compétences, ainsi que son fils Anthony, qui gère le Garage Salvatore de la rue Jacques-Cartier.
Un amour pour les voitures anciennes
L’entreprise familiale, qui a plus de 50 ans d’expérience, est spécialisée dans la réparation des vieilles voitures. La passion brûle toujours en Salvatore, qui a une oreille fine pour détecter les anomalies juste en écoutant le son du moteur. “Si je ne suis pas là le matin, Anthony m’appelle immédiatement !” raconte-t-il, tandis qu’ils examinent une ancienne Ferrari qui refuse de démarrer.
Le visage du patriarche s’illumine lorsqu’il contemple les photos en noir et blanc accrochées dans la petite salle d’exposition du garage. Parmi elles, une Alfa Romeo 1750 GT de 1969, qu’il qualifie affectueusement de “mon bébé”. “J’ai lâché les gaz dans cette voiture. J’ai dépassé des Corvette et des Camaro dans les virages. Et bien sûr, elle fonctionne toujours. Je vais la sortir cet été !”
Un homme au service de Ferrari
Peu de Québécois ont des photos-souvenirs avec le grand patron de Ferrari, mais Salvatore en possède quelques-unes sur lesquelles il apparaît discrètement dans son rôle de mécanicien aux côtés du Commendatore.
“Il fallait toujours s’incliner et le saluer, ne jamais l’appeler ‘Monsieur Ferrari’. Il fallait dire ‘le Commendatore’, sinon il levait le nez. Je le trouvais gentil.” À peine âgé de 18 ans, Salvatore a séjourné pendant six mois à l’usine de Maranello, en Italie.
“Avec mon équipe, je participais aux courses de voitures de grand tourisme. Je travaillais jour et nuit pour mettre au point nos bolides. Je me souviens que le pilote belge Willy Mairesse m’aimait bien, il me faisait confiance. Avec Ferrari, j’ai remporté toutes les grandes courses !”
À la recherche de la vérité
Salvatore évoque le film “Ford contre Ferrari” sorti en 2019, qui raconte comment Henry Ford II a tenté de freiner la domination des équipes d’Enzo Ferrari lors des 24 heures du Mans en 1966. “Je n’ai pas encore vu le film”, avoue Salvatore en cachant son visage avec sa main, un peu gêné, mais en riant de bon cœur.
À l’époque, Salvatore était un jeune mécanicien plein d’entrain, fier de défendre les couleurs de Ferrari. “Je me suis battu avec les mécaniciens de Ford, à mains nues”, avoue-t-il en riant. “Il fallait régler les choses une fois pour toutes.”
Un choix de vie
Salvatore a quitté les circuits européens en 1965, un an avant la victoire de Ford aux 24 heures du Mans. “J’ai choisi une autre vie”, explique-t-il. “Mon beau-frère vivait au Québec et nous a suggéré d’immigrer là-bas, où j’aurais de bonnes opportunités professionnelles. Mon employeur a tout fait pour me retenir, mais j’ai refusé. Il était un peu fâché et prétendait que j’allais chez les Indiens…”
À leur arrivée au Canada en 1966, les Montana ont connu des moments difficiles. “J’ai dû convaincre les garagistes de m’embaucher malgré la renommée encore limitée de Ferrari au Canada. Après quelques années, j’ai décidé d’ouvrir mon propre garage.”
Aujourd’hui, Salvatore Montana est toujours aussi passionné par son métier. À l’aube de ses 81 ans, il continue de transmettre son savoir aux jeunes mécaniciens. “Si tu veux être heureux dans la vie, fais le métier qui te plaît, avec amour et passion. Sinon, va ailleurs, tu vas t’empoisonner la vie.” Salvatore Montana, le sorcier des vieux moteurs, est une source d’inspiration pour tous ceux qui souhaitent suivre leur passion et exercer leur métier avec talent et dévouement. Ne sortez pas le drapeau à damier, Salvatore a encore quelques tours de piste devant lui.