La schizophrénie est une maladie psychiatrique complexe caractérisée par une variété de symptômes, dont les plus impressionnants sont les délires et les hallucinations. Cependant, ce sont les difficultés cognitives et le retrait social qui sont les plus invalidants. Heureusement, une prise en charge adaptée, combinant traitement pharmacologique et thérapie psychosociale, permet à environ un tiers des patients de connaître une rémission durable. Les chercheurs s’efforcent de mieux comprendre cette pathologie, ainsi que ses facteurs de risque, afin d’intervenir le plus tôt possible et de prévenir les formes sévères de la maladie.
Comprendre la schizophrénie
La schizophrénie est une maladie psychiatrique chronique caractérisée par une perception perturbée de la réalité, des manifestations productives telles que les délires et les hallucinations, et des manifestations passives telles que le retrait social et le détérioration des facultés cognitives. Les symptômes varient d’un patient à l’autre en termes de nature et de gravité.
Trois types de symptômes peuvent se manifester de manière chronique ou épisodique :
- Les symptômes productifs (ou positifs) sont les plus spectaculaires, regroupant les délires et les hallucinations. Ils peuvent se traduire par un sentiment de persécution, une mégalomanie, des idées délirantes invraisemblables et excentriques, ainsi que des hallucinations sensorielles.
- Les symptômes négatifs (ou déficitaires) correspondent à un appauvrissement affectif et émotionnel. Le patient se retire progressivement de ses relations sociales et familiales, communique moins et présente une émotivité réduite.
- Les symptômes dissociatifs se caractérisent par une désorganisation de la pensée, de la parole, des émotions et des comportements. La cohérence et la logique du discours et de la pensée sont perturbées.
La schizophrénie débute souvent par un épisode psychotique inaugural qui passe souvent inaperçu. Elle évolue ensuite de manière fluctuante, avec des symptômes chroniques et parfois des épisodes aigus de psychose. Les symptômes résiduels varient en intensité d’une personne à l’autre. Le pronostic dépend des caractéristiques de la maladie et de la précocité de la prise en charge.
L’adolescence, période critique de vulnérabilité
La schizophrénie touche environ 0,7 à 1% de la population mondiale, soit environ 600 000 personnes en France. Elle affecte aussi bien les femmes que les hommes, avec des formes plus précoces et invalidantes chez ces derniers. Elle semble également plus fréquente chez les personnes vivant en milieu urbain et celles ayant un parcours d’immigration.
La maladie se manifeste généralement pendant l’adolescence, entre 15 et 25 ans, mais elle peut débuter plus tôt sous une forme atténuée. Cette spécificité épidémiologique s’explique par les mécanismes biologiques impliqués dans la maladie. En effet, le cerveau est en constante évolution et sa plasticité est altérée par le stress, les infections ou l’exposition à des substances. Pendant l’adolescence, une phase intensive de maturation cérébrale se produit, ce qui rend cette période critique pour le bon fonctionnement cérébral futur. Une intervention thérapeutique précoce peut donc être particulièrement efficace.
Une maladie d’origine génétique et environnementale
La schizophrénie résulte de l’interaction complexe entre des facteurs génétiques et environnementaux. Des prédispositions génétiques légères ont été identifiées, mais elles ne sont pas suffisantes pour déclencher la maladie. Certaines mutations génétiques rares ont un impact majeur sur le risque de développer la schizophrénie. Cependant, le rôle de la génétique reste modéré, car la fréquence de la maladie est environ 10 fois plus faible que la fréquence de ces facteurs génétiques de vulnérabilité.
Différents facteurs environnementaux peuvent favoriser le développement de la schizophrénie, en particulier pendant l’adolescence et le début de l’âge adulte. Le stress, les infections précoces, l’inflammation du cerveau et la consommation de cannabis sont autant de facteurs de risque établis. Ces éléments altèrent la plasticité cérébrale et peuvent favoriser l’apparition de la maladie. D’autres aspects liés au mode de vie, tels que la qualité du sommeil, la nutrition et les facteurs neurotrophiques, jouent également un rôle significatif.
Des premiers symptômes aux diagnostics
Le diagnostic de la schizophrénie est souvent difficile à poser, ce qui entraîne parfois un délai entre l’apparition des premiers symptômes et la prise en charge de la maladie. Les symptômes de la schizophrénie peuvent être confondus avec ceux de la dépression, des troubles anxieux ou des troubles bipolaires, surtout lorsque les symptômes négatifs sont prédominants.
Dans environ trois quarts des cas, la schizophrénie ne se manifeste pas brutalement. Elle commence par des symptômes atténués, souvent peu spécifiques, associés à des difficultés cognitives. Ces symptômes annonciateurs, appelés “prodromiques”, augmentent le risque de transition vers un trouble psychotique mais ne garantissent pas son développement. Seul un tiers des personnes concernées évolueront vers un premier épisode psychotique, et seulement la moitié d’entre elles développera par la suite une schizophrénie chronique.
Il est essentiel de ne pas banaliser les modifications de comportement chez un adolescent, mais de solliciter une consultation médicale en cas de signes tels que des changements de comportement, un retrait social, des idées délirantes ou des perceptions altérées. L’isolement social et la baisse des résultats scolaires accompagnent souvent les premiers symptômes. Une évaluation médicale précoce permet une prise en charge adaptée et peut prévenir l’évolution vers un trouble psychotique avéré.
Prise en charge médicamenteuse et thérapie psychosociale
La prise en charge d’un premier épisode psychotique est globale, multidisciplinaire et adaptée aux besoins spécifiques de chaque patient. Elle combine des approches médicamenteuses et psychosociales, en accordant une attention particulière aux addictions éventuelles, qui constituent des facteurs de risque de mauvaise observance, de rechute et d’hospitalisation.
Les médicaments antipsychotiques de deuxième génération (ou “atypiques”) sont couramment prescrits en traitement de première intention. Ils atténuent les symptômes positifs de la maladie et réduisent les risques de rechute. Un suivi médical est essentiel pour ajuster la posologie et assurer une bonne tolérance et efficacité. Certains patients peuvent présenter une résistance aux antipsychotiques, auquel cas d’autres traitements, tels que la clozapine, peuvent être prescrits.
La réhabilitation psychosociale occupe une place importante dans la prise en charge de la schizophrénie. Elle vise à améliorer la qualité de vie des patients en les aidant à développer leurs capacités et leur autonomie dans différents domaines (cognitif, social, professionnel…). Différentes approches, telles que la réhabilitation cognitive et les thérapies cognitivo-comportementales, sont utilisées en fonction des besoins du patient. L’éducation thérapeutique du patient et le soutien de l’entourage jouent également un rôle clé dans le processus de rétablissement.
Les enjeux de la recherche
Les chercheurs travaillent à mieux comprendre les anomalies cérébrales associées à la schizophrénie. Bien que ces anomalies ne soient pas spécifiques à la maladie, elles peuvent aider à caractériser le diagnostic et le pronostic. Ils s’intéressent également aux facteurs de risque génétiques et environnementaux afin de mettre en place des mesures de prévention et d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques.
La recherche vise également à identifier des marqueurs prédictifs de l’évolution de la maladie et à différencier les différentes formes de schizophrénie. Actuellement, le diagnostic précoce reste difficile en raison de critères cliniques peu spécifiques. Des marqueurs génétiques et moléculaires complémentaires sont nécessaires pour améliorer l’identification des patients à haut risque. Il est également essentiel de classer les différentes formes de schizophrénie afin d’adapter les prises en charge médicales.
En France, des programmes de recherche tels que PsyCARE visent à améliorer la détection, la prise en charge et l’accompagnement des patients schizophrènes. Ils regroupent des structures de recherche et de soins spécialisées et s’appuient sur des avancées technologiques pour faciliter le diagnostic et l’intervention précoce.
Pour aller plus loin
- Vivre avec une schizophrénie – Guide patient (ALD n° 23), Haute autorité de santé (2007)
- La schizophrénie, une maladie très invalidante – Fondation Fontamental
- Schizophrénie – Repères OMS
- Schizophrénie – Orphanet
Associations de patients
- Schizo-oui
- PROfamille et malades : éduquer, soutenir, surmonter ensemble les schizophrénies
- Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques