L’utilisation des nitrites et des nitrates comme additifs alimentaires, notamment dans la charcuterie et la viande transformée, a été récemment associée à une augmentation du risque de cancer colorectal, selon une déclaration de l’Anses le 12 juillet dernier. Pour réduire l’exposition de la population à ces substances, l’Agence recommande de mettre en place des mesures volontaires pour limiter l’exposition par voie alimentaire.
Historiquement, les charcutiers ont utilisé les nitrates pour prolonger la durée de conservation des produits et prévenir la croissance de bactéries dangereuses. Au cours des dernières années, les industriels ont été pressés par l’opinion publique de trouver des alternatives. Des fabricants tels que Herta et Fleury Michon ont ainsi lancé des gammes de jambon “sans nitrites”. Cependant, l’Anses met également en garde contre ces produits de substitution, tels que ceux contenant des “extraits végétaux”, qui contiennent naturellement des nitrates qui se transforment en nitrites sous l’effet des bactéries. Ces produits contiennent donc des “nitrites cachés” selon l’Agence. Voici six questions sur cet additif controversé.
Le jambon cuit est-il toujours rose ?
NON. Le jambon cuit fabriqué sans nitrites, également connu sous le nom de “sel de nitrite”, de “nitrate de sodium” ou d’E250 dans la liste des ingrédients, est de couleur plus pâle et plus grise.
Le nitrite de sodium est-il indispensable à la fabrication du jambon ?
NON. Cet additif réduit le temps de fabrication du jambon et lui donne une couleur rose. Les industriels soutiennent sa présence en invoquant des raisons de sécurité, affirmant qu’il agit comme un conservateur et qu’il est nécessaire pour éliminer des éléments pathogènes tels que le botulisme, la listériose ou la salmonellose. Cependant, le journaliste Guillaume Coudray, dans une enquête passionnante parue en septembre dernier sous le titre “Cochonneries, Comment la charcuterie est devenue un poison” (éditions La Découverte), démontre que ce n’est pas le cas. Le nitrate de sodium sert uniquement à donner une couleur plus attrayante à la viande et à accélérer le processus de fabrication.
Est-ce plus cher de fabriquer du jambon sans nitrites ?
OUI. Les jambons sans nitrites nécessitent plus de temps de préparation, ce qui a des conséquences sur les coûts de production pour les fabricants et, par conséquent, sur le prix final pour le consommateur.
Est-ce la charcuterie enrichie en nitrites qui est cancérogène et non le nitrite de sodium pris séparément ?
OUI. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a déclaré en 2015 que la charcuterie enrichie en nitrites était cancérogène. Michèle Rivasi explique dans un communiqué que le nitrate et le nitrite ne sont jamais cancérogènes eux-mêmes, quelle que soit la dose ingérée, ni pour les animaux ni pour les humains. Cependant, une fois injectés dans la viande, ils se décomposent et se combinent avec la matière carnée, produisant ainsi trois types de molécules cancérogènes : le fer nitrosylé, les nitrosamines et les nitrosamides. Il est important de souligner cette précision car l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) exploite cette nuance dans deux rapports publiés en 2017 pour affirmer que l’utilisation des nitrites ne pose pas de problème pour la santé publique, justifiant ainsi le statu quo.
Cette polémique est-elle récente ?
NON. Elle remonte à plus d’un siècle. Des scientifiques britanniques ont commencé à s’inquiéter de la présence de cet agent colorant dès 1908, comme le raconte Guillaume Coudray dans son livre.
Les nitrites sont-ils interdits dans la charcuterie labellisée bio ?
NON. Les nitrites sont autorisés dans les produits bio. Cependant, la réglementation bio impose une limite de 80 mg/kg.