L’urgence de réduire la taille des voitures électriques est soulignée dans une étude du WWF publiée ce jeudi 9 novembre. Selon cette ONG, si des mesures ne sont pas prises rapidement, la France pourrait faire face à une pénurie de métaux “critiques”. Actuellement, ces modèles sont exemptés de malus sur le poids, en raison de la masse élevée des batteries et de la transition en cours vers les motorisations “zéro émission”.
Les SUV en ligne de mire
“La transition écologique a besoin du véhicule électrique, mais le problème réside dans sa taille”, a déclaré Jean Burkard, directeur du plaidoyer chez WWF France, lors d’une conférence de presse. Il souligne notamment que les SUV représentent désormais 41% des ventes de ces véhicules.
Le problème est que “un grand SUV électrique consomme trois fois plus de cuivre et d’aluminium, ainsi que cinq fois plus de lithium, de nickel et de cobalt qu’une petite citadine électrique”, révèle l’étude. Or, ces métaux sont “critiques” car indispensables à la transition énergétique, mais ils sont disponibles en quantité limitée.
La demande en métaux rares pourrait donc être multipliée par 30 au cours des 20 prochaines années. Étant donné que ces métaux sont très peu produits en France, cela entraîne des “risques géostratégiques”, selon Jean Burkard, et signifie qu’en cas de pénurie, “nous devrons choisir entre avoir des véhicules électriques, des éoliennes ou des réseaux électriques”.
Un scénario de “sobriété” pour éviter les pénuries
L’étude du WWF examine trois scénarios “réalistes” et leurs conséquences : le scénario du “laisser-aller”, où rien ne change par rapport à aujourd’hui, le scénario “intermédiaire”, où les politiques actuelles ont un effet sur la demande, et enfin le scénario de “sobriété”, avec des politiques plus volontaristes visant à réduire la taille des véhicules et la dépendance à la voiture.
Les résultats sont sans appel : “Si nous n’adoptons pas ce scénario de sobriété”, la demande de métaux “critiques” en France sera entre 5% et 15% supérieure à ce qui est économiquement justifié, explique Jean Burkard.
En revanche, dans le scénario de sobriété, la demande serait inférieure de 25% par rapport au poids économique du pays, ouvrant même la voie à l’exportation du lithium – un métal précieux dont le cours a explosé, passant de 13 000 à 70 000 euros la tonne entre 2020 et 2021. Ce serait un atout important pour la balance commerciale française, souligne-t-il.
“Désuver” le marché électrique grâce à une approche sobre permettrait déjà de réduire la demande de métaux critiques de 17% d’ici 2035, par rapport à un scénario de laisser-aller, ajoute le rapport.
Des mécanismes pour limiter l’obésité automobile
Le WWF appelle le gouvernement à instaurer “un malus poids spécifique” pour réduire la taille des véhicules électriques. En parallèle, l’organisation propose de “réserver le bonus écologique” aux voitures électriques pesant moins de 1,6 tonne, contre 2,4 tonnes actuellement. Cette limite actuelle n’a d’ailleurs pas beaucoup de sens, puisque les véhicules électriques de 2,4 tonnes sont généralement déjà trop chers pour être éligibles au bonus écologique.
L’association préconise également d’exiger des constructeurs automobiles la publication annuelle du poids moyen des voitures électriques immatriculées. Elle suggère aussi la création d’une pénalité européenne de 5 euros par kilo dès que le seuil de 1,6 tonne est dépassé.
En anticipation des objections, le WWF propose d’introduire une dérogation pour les familles nombreuses qui sont contraintes d’opter pour un véhicule plus volumineux, bénéficiant ainsi d’un “régime particulier”. Des exceptions qui existent déjà d’ailleurs pour éviter de payer un malus CO2 ou un malus sur le poids.